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Conseil d’Etat, 9 avril 2004, n° 255953, Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie c/ Caisse interfédérale de crédit mutuel de Bretagne

Les sociétés ne peuvent prendre la décision de porter dans leur bilan, à la réserve spéciale prévue par l’article 209 quater, le montant des plus-values nettes à long terme déclarées dans leurs résultats fiscaux qu’après la clôture de l’exercice au cours duquel ces résultats ont été acquis. Par suite, c’est seulement au cours de l’exercice suivant ce dernier exercice que l’obligation impartie aux sociétés par les dispositions du 1 de cet article peut être regardée comme ayant été, le cas échéant, méconnue. Si, au cours de ce second exercice, la société s’abstient de porter à ce compte de réserve le montant de sa plus-value nette, diminuée de l’impôt correspondant, elle doit être regardée comme ayant pris, au sujet de l’imposition de cette somme, une décision de gestion qui lui permet de rester libre de toute sujétion touchant à la distribution éventuelle de ladite somme aux actionnaires et qui est assimilable à un prélèvement sur la réserve spéciale au sens du 2 dudit article. Cette décision entraîne, par suite, l’assujettissement de ce prélèvement à l’impôt sur les sociétés à un taux égal à la différence entre la taux de droit commun et le taux de 15 %. Lorsqu’à la suite d’un contrôle, un redressement révèle le caractère imposable d’une plus-value nette à long terme réalisée par une société au cours d’un exercice et que, n’ayant été ni volontairement dissimulée ni distribuée, celle-ci donne lieu à l’imposition au taux réduit au titre de cet exercice, la seule circonstance que la société n’a pas doté la réserve spéciale au cours de l’exercice suivant la réalisation de la plus-value, ne peut être regardée comme une décision de gestion assimilable à un prélèvement à rapporter aux résultats imposables de cet exercice. Dans cette hypothèse, la société n’est en mesure de porter à ce compte de réserve le montant de la plus-value nette diminué de cette imposition qu’au cours de l’exercice suivant celui au cours duquel l’imposition au taux réduit a été établie et elle ne peut alors être réputée avoir pris avant la clôture de cet exercice une décision assimilable à un prélèvement sur cette réserve.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 255953

MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE
c/ Caisse interfédérale de crédit mutuel de Bretagne

M. Loloum
Rapporteur

M. Bachelier
Commissaire du gouvernement

Séance du 17 mars 2004
Lecture du 9 avril 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 8ème sous-section de la Section du contentieux

Vu le recours, enregistré le 10 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 27 décembre 2002 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté son recours dirigé contre les articles 3 et 4 du jugement du 18 décembre 1997 du tribunal administratif de Rennes accordant à la Caisse interfédérale de crédit mutuel de Bretagne une réduction de cotisations supplémentaires à l’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l’année 1986 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre de procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Loloum, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la Caisse interfédérale de crédit mutuel de Bretagne,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l’arrêt attaqué :

Considérant qu’aux termes du I de l’article 219 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable, pour le calcul de l’impôt sur les sociétés : "a) Le montant net des plus-values à long terme autres que celles visées au II de l’article 39 quindecies fait l’objet d’une imposition séparée au taux de 15 % dans les conditions prévues au 1 du I de l’article 39 quindecies et à l’article 209 quater" ; qu’aux termes de l’article 209 quater applicable au litige "1. Les plus-values soumises à l’impôt. à l’un des taux réduits de 15 % et ., prévus au troisième alinéa du I de l’article 219 diminuées du montant de cet impôt, sont portées à une réserve spéciale. 2. Les sommes prélevées sur cette réserve sont rapportées aux résultats de l’exercice en cours lors de ce prélèvement, sous déduction de l’impôt perçu lors de la réalisation des plus-values correspondantes" ;

Considérant que les sociétés ne peuvent prendre la décision de porter dans leur bilan, à la réserve spéciale prévue par l’article 209 quater, le montant des plus-values nettes à long terme déclarées dans leurs résultats fiscaux qu’après la clôture de l’exercice au cours duquel ces résultats ont été acquis ; que, par suite, c’est seulement au cours de l’exercice suivant ce dernier exercice que l’obligation impartie aux sociétés par les dispositions du 1 de cet article peut être regardée comme ayant été, le cas échéant, méconnue ; que si, au cours de ce second exercice, la société s’abstient de porter à ce compte de réserve le montant de sa plus-value nette, diminuée de l’impôt correspondant, elle doit être regardée comme ayant pris, au sujet de l’imposition de cette somme, une décision de gestion qui lui permet de rester libre de toute sujétion touchant à la distribution éventuelle de ladite somme aux actionnaires et qui est assimilable à un prélèvement sur la réserve spéciale au sens du 2 dudit article ; que cette décision entraîne, par suite, l’assujettissement de ce prélèvement à l’impôt sur les sociétés à un taux égal à la différence entre la taux de droit commun et le taux de 15 % ; que, lorsqu’à la suite d’un contrôle, un redressement révèle le caractère imposable d’une plus-value nette à long terme réalisée par une société au cours d’un exercice et que, n’ayant été ni volontairement dissimulée ni distribuée, celle-ci donne lieu à l’imposition au taux réduit au titre de cet exercice, la seule circonstance que la société n’a pas doté la réserve spéciale au cours de l’exercice suivant la réalisation de la plus-value, ne peut être regardée comme une décision de gestion assimilable à un prélèvement à rapporter aux résultats imposables de cet exercice ; que, dans cette hypothèse, la société n’est en mesure de porter à ce compte de réserve le montant de la plus-value nette diminué de cette imposition qu’au cours de l’exercice suivant celui au cours duquel l’imposition au taux réduit a été établie et elle ne peut alors être réputée avoir pris avant la clôture de cet exercice une décision assimilable à un prélèvement sur cette réserve ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu’à l’issue de la vérification de comptabilité de la société alors dénommée "Caisse fédérale du crédit mutuel de Bretagne" l’administration a, par notification du 8 juillet 1988, remis en cause des provisions pour dépréciations d’obligations ; que ce redressement a révélé au titre de l’exercice clos en 1985 le caractère taxable d’une plus-value nette à long terme pour un montant de 2 635 308 F (401 750, 11 euros) qui a été soumise à une imposition au taux de 15 % au titre de l’année 1985 ; que, se fondant sur l’absence d’inscription de cette plus-value nette diminuée de cette imposition au crédit du compte de la réserve spéciale au cours de l’exercice clos en 1986, l’administration en a réintégré le montant dans les résultats imposables au taux de droit commun de cet exercice ;

Considérant que la cour administrative d’appel de Nantes a jugé qu’il n’était pas contesté que la plus-value en cause était restée investie dans l’entreprise et que la société n’avait pu prendre, avant l’établissement de l’imposition au taux réduit, la décision de porter cette plus-value au compte de réserve spéciale, de sorte que l’administration ne pouvait réintégrer un prétendu prélèvement dans les résultats imposables de l’exercice clos en 1986 ; qu’en rejetant par ces motifs le recours du ministre, la cour n’a ni commis d’erreur de droit ni donné une inexacte qualification juridique aux faits de l’espèce ; que, par suite, le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Sur les conclusions présentées en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il y a lieu dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 300 euros que la Caisse interfédérale de crédit mutuel de Bretagne demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : L’Etat versera à la Caisse interfédérale de crédit mutuel de Bretagne la somme de 2 300 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE D’ETAT, MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE et à la Caisse interfédérale de crédit mutuel de Bretagne.

 


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