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NOTES ET COMMENTAIRES :
Chronique de Francis DONNAT et Didier CASAS, Libre administration des collectivités territoriales et intercommunalité, AJDA 2002, p.590

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Conseil d’Etat, 12 juin 2002, n° 246618, Commune de Fauillet et autres

L’établissement public de coopération intercommunale qui a commencé d’exercer, au lieu et place des communes requérantes, des compétences qui doivent lui être transférées ultérieurement porte une atteinte grave et manifestement illégale à la libre administration des collectivités locales, laquelle constitue une liberté fondamentale que l’article L. 521-2 du code de justice administrative vise à sauvegarder.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 246618

COMMUNE DE FAUILLET et autres

Mlle A.Robineau, Rapporteur

M. Séners, Commissaire du gouvernement

Séance du 5 juin 2002

Lecture du 12 juin 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 3ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour les COMMUNES DE FAUILLET, MONTPOUILLAN et SAINTE-MARTINE (Lot-et-Garonne), représentées par leur maire en exercice ; les COMMUNES DE FAUILLET, MONTPOUILLAN et SAINTE-MARTHE demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance du 3 mai 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté, sur le fondement de l’article L. 522-3 du code de justice administrative, leur demande tendant à la suspension de l’arrêté du 29 mars 2002 du préfet de Lot-et-Garonne portant extension-transformation de la communauté de communes Val-de-Garonne en communauté d’agglomération ;

2°) d’annuler l’arrêté préfectoral du 29 mars 2002 ou, à tout le moins, d’en suspendre l’exécution ;

3°) d’enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de retirer cet arrêté et de prendre toutes mesures utiles pour faire cesser son exécution ;

4°) d’enjoindre à la communauté d’agglomération Val-de-Garonne de retirer les actes déjà accomplis par celle-ci, de retirer la convocation à la séance du conseil de la communauté d’agglomération du 16 mai 2002 et de s’abstenir de prendre aucune mesure concernant ladite communauté ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle A.Robineau, Auditeur,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de la COMMUNE DE FAUILLET et autres et de la SCP Rouvière, Boutet, avocat de la communauté Val-de-Garonne,
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu’aux termes de l’article R.741-2 du code de justice administrative : "La décision mentionne que l’audience a été publique./ Elle contient le nom des parties, l’analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application (...)" ; qu’il ressort des pièces du dossier que les conclusions présentées à titre principal par les requérants ne sont mentionnées dans aucune des parties de l’ordonnance attaquée ; que, dès lors, les requérants sont fondés à demander l’annulation de l’ordonnance du 3 mai 2002 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, par application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au titre de la procédure de référé engagée par les COMMUNES DE FAUILLET, de MONTPOUILLAN et de SAINTE-MARTHE ;

Considérant qu’aux termes de l’article L.521-2 du code de justice administrative : "Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale (...)" ;

Sur les conclusions tendant à l’annulation de l’arrêté préfectoral du 29 mars 2002 :

Considérant que des conclusions à fin d’annulation présentées dans le cadre d’une instance en référé sont irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à la suspension de l’arrêté préfectoral du 29 mars 2002 et à ce qu’il soit enjoint au préfet de Lot-et-Garonne de retirer cet arrêté :

Considérant qu’il résulte de l’article 1er de l’arrêté préfectoral du 29 mars 2002 portant extension-transformation de la communauté de communes Val-de-Garonne en communauté d’agglomération que ses dispositions prennent effet à compter du 31 décembre 2002 ; que les requérantes ne sont, dès lors, pas fondées à soutenir qu’il y a urgence à suspendre l’exécution de cet arrêté et à enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de retirer cette décision ;

Sur les autres conclusions tendant à l’application de l’article L. 521-2 du code de justice administrative :

Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’alors même que l’arrêté du 29 mars 2002 portant extension-transformation de la communauté de communes Val-de-Garonne en communauté d’agglomération ne prend effet qu’à compter du 31 décembre 2002, le conseil communautaire a été convoqué le 16 mai 2002 afin de délibérer sur un certain nombre de mesures, notamment des contrats, engageant immédiatement la communauté d’agglomération ; que, ce faisant, l’établissement public de coopération intercommunale a commencé d’exercer, au lieu et place des communes requérantes, des compétences qui doivent lui être transférées ultérieurement ; que de telles mesures portent une atteinte grave et manifestement illégale à la libre administration des collectivités locales, laquelle constitue une liberté fondamentale que l’article L. 521-2 du code de justice administrative vise à sauvegarder ; que les requérantes sont fondées à soutenir qu’il y a urgence à y mettre un terme ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu d’enjoindre à la communauté de communes Val-de-Garonne de cesser de prendre toute mesure anticipant sur la mise en oeuvre de l’arrêté du 29 mars 2002 et de cesser d’appliquer les actes par lesquels elle a commencé d’exercer les compétences résultant dudit arrêté, qui ne lui seront qu’ultérieurement transférées ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser aux communes requérantes la somme qu’elles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L’ordonnance du juge des référés du 3 mai 2002 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint à la communauté de communes Val-de-Garonne de cesser de prendre toute mesure anticipant sur la mise en oeuvre de l’arrêté du 29 mars 2002 et de cesser d’appliquer tous les actes par lesquels elle a commencé d’exercer les compétences résultant dudit arrêté, qui ne lui seront qu’ultérieurement transférées.

Article 3 : Les conclusions des requérantes tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et le surplus des conclusions de leur demande devant le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux sont rejetés.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE FAUILLET, à la COMMUNE DE MONTPOUILLAN, à la COMMUNE DE SAINT-MARTHE, à la communauté de communes Val-de-Garonne, au préfet de Lot-et-Garonne et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

 


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