LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE,
Vu la demande de mesures conservatoires présentée le 5
octobre 1987 par la S.A.R.L. Pompes funèbres 77 à l’encontre
de la S.A. Pompes funèbres générales ;
Vu la lettre en date du 8 octobre 1987 par laquelle la chambre de métiers
du Sud de Seine-et-Marne déclare s’associer à la demande
susvisée ;
Vu l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative
à la liberté des prix et de la concurrence, modifiée,
ensemble le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 pris
pour son application ;
Vu les pièces du dossier ;
Le commissaire du Gouvernement et les parties entendus ;
Considérant que les dirigeants de la S.A.R.L. Pompes funèbres
77, immatriculée le 1er mai 1987 et installée à Fontainebleau
depuis le 25 mai 1987, affirment être victimes d’un détournement
de clientèle au profit de la Société anonyme des Pompes
funèbres générales ; que ces pratiques seraient abusives
; qu’elles seraient le fait d’une entreprise en situation de position dominante
; qu’en conséquence lesdits dirigeants demandent réparation
du préjudice subi par un dédommagement financier et le prononcé
de mesures conservatoires ;
Considérant que la chambre de métiers du Sud de Seine-et-Marne
est au nombre des personnes visées dans l’article 5 de l’ordonnance
n° 86-1243 ; qu’ainsi elle a la possibilité de se joindre à
la demande de la S.A.R.L. Pompes funèbres 77 ;
Considérant que ni l’article 12 de l’ordonnance ni son article
13 ne permettent au Conseil de la concurrence de se prononcer sur la demande
de la S.A.R.L. Pompes funèbres 77 tendant à obtenir une réparation
pécuniaire du préjudice subi ;
Considérant que les dispositions de l’article 12 de l’ordonnance
n° 86-1243 ne sont applicables que si les pratiques visées par
la demande sont susceptibles d’entrer dans le champ d’application des articles
7 et 8 de l’ordonnance ;
Considérant que lesdites pratiques ne sont visées par
le deuxième alinéa de l’article 8 de l’ordonnance n°
86-1243 que si elles révèlent notamment l’exploitation abusive
par une entreprise ou un groupe d’entreprise d’une position dominante sur
le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci
;
Considérant qu’il résulte des pièces du dossier
que la société anonyme des Pompes funèbres générales
est, d’une part, le concessionnaire du service extérieur des pompes
funèbres de la ville de Fontainebleau, au sens de l’article L. 362-1
du code des communes, et, d’autre part, le gestionnaire du funérarium
de cette ville dans lequel sont admises des personnes décédées
à l’hôpital ; que la S.A.R.L. Pompes funèbres 77 est
une agence de funérailles exerçant sur le marché des
prestations dites « libres » ; que les marchés des prestations
de service extérieur et des prestations « libres » sont
connexes ; que dans ces conditions les pompes funèbres générales
sont susceptibles de disposer à Fontainebleau de positions dominantes
tant sur le marché des prestations funéraires relevant du
service extérieur que sur celui des prestations « libres »
;
Considérant que la pratique alléguée de détournement
de clientèle par une entreprise en situation de position dominante,
à la supposer établie, pourrait revêtir un caractère
abusif et entrer dans le champ d’application de l’article 8 de l’ordonnance
susvisée ;
Considérant que, en application de l’article 12 de l’ordonnance
susvisée, des mesures conservatoires ne peuvent être prononcées
que si les pratiques dénoncées portent une atteinte grave
et immédiate à l’économie générale,
à celle du secteur intéressé, à l’intérêt
des consommateurs ou à l’entreprise plaignante ;
Considérant que les requérants allèguent que la
situation financière de leur société est grave, que
des apports personnels à hauteur de 40 000 F ont dû être
faits pour couvrir les frais fixes, qu’ils ne disposent plus d’aucune réserve,
que cette situation serait due à la pratique dénoncée
;
Considérant que la S.A.R.L. Pompes funèbres 77 est une
entreprise de petite taille de création récente ; que, de
ce fait et compte tenu de son secteur d’activité, sa situation est
précaire ; que, cependant, sa part de marché est significative
et que sa zone d’activité s’étend à d’autres communes
que Fontainebleau ; que, par ailleurs, l’hôpital de Fontainebleau
et le gestionnaire du funérarium ont récemment pris des dispositions
pour donner aux familles des défunts une information claire sur
les entreprises de pompes funèbres présentes sur les marchés
en cause ; que dans ces conditions, il n’est pas établi que le comportement
de la société anonyme Pompes funèbres générales
porte, à l’intérêt de l’entreprise demanderesse, une
atteinte grave et immédiate appelant une mesure d’urgence au titre
de l’article 12 de l’ordonnance susvisée ;