format pour impression
(imprimer)

DANS LA MEME RUBRIQUE :
Conseil d’Etat, Section, 12 mai 2004, n° 192595, Commune de la Ferté-Milon
Conseil d’Etat, 18 octobre 2002, n° 235239, Syndicat intercommunal de secours du Denaisis
Conseil d’Etat, 29 avril 2002, n° 235000, Chambre des métiers de la Haute-Corse
Conseil d’Etat, 26 septembre 2008, n° 294021, Commune de Souillac
Cour administrative d’appel de Nantes, 11 mars 2003, n° 00NT00977, M. Joel D.
Conseil d’Etat, 27 octobre 2008, n° 294914, Communauté de communes de la Tinée c/ M. K.
Cour administrative d’appel de Marseille, 27 mai 2003, n° 99MA00433, Association Montfavet Commune Libre
Conseil d’Etat, 12 juin 2002, n° 246618, Commune de Fauillet et autres
Tribunal administratif de Lille, 15 janvier 2004, n° 03-2844, M. et Mme D. et autres c/ Commune de Férin
Conseil d’Etat, 24 octobre 2001, n° 223294, Communauté urbaine de Lyon




Conseil d’Etat, 3 décembre 2014, n° 383865, Société Citelum

Le transfert par une commune de compétences à un établissement public de coopération intercommunale implique le transfert des biens, équipements et services nécessaires à l’exercice de ces compétences ainsi que les droits et obligations qui leur sont attachés

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 383865

SOCIETE CITELUM

Mme Charline Nicolas
Rapporteur

M. Gilles Pellissier
Rapporteur public

Séance du 14 novembre 2014
Lecture du 3 décembre 2014

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 2ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 août et 2 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la société Citelum, dont le siège est 37 rue de Lyon à Paris (75012) ; la société Citelum demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance n° 14LY01672 du 1er août 2014 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l’annulation de l’ordonnance n° 1305387 du 26 avril 2014 du juge des référés du tribunal administratif de Lyon prescrivant, à la demande de la commune de Châtillon-sur-Chalaronne, une opération d’expertise aux fins de déterminer la ou les causes de l’écart constaté, lors de la procédure de constat, entre les prestations prévues par le contrat conclu entre la commune et la société et les prestations réalisées par cette dernière ;

2°) statuant en référé, de faire droit à ses conclusions d’appel ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Châtillon-sur-Chalaronne le versement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 novembre 2014 présentée pour la société Citelum ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Charline Nicolas, auditeur,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la société Citelum, à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la commune de Châtillon-sur-Chalaronne, et à Me Ricard, avocat du syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l’absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d’expertise ou d’instruction. / Il peut notamment charger un expert de procéder, lors de l’exécution de travaux publics, à toutes constatations relatives à l’état des immeubles susceptibles d’être affectés par des dommages ainsi qu’aux causes et à l’étendue des dommages qui surviendraient effectivement pendant la durée de sa mission (.) " ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés de la cour administrative d’appel de Lyon que la commune de Châtillon-sur-Chalaronne a conclu le 13 juillet 2007, avec la société Citelum, un contrat de partenariat portant sur le financement, la conception, la réalisation, la gestion, l’exploitation et le renouvellement des installations nécessaires à la mise en lumière de la ville et au fonctionnement de l’éclairage public ; que par une lettre du 27 juin 2012, la commune a notifié à la société requérante la résiliation du contrat pour motif d’intérêt général, prenant effet le 31 décembre 2012 ; que par une délibération du 9 juillet 2013, la commune a transféré, en application des dispositions de l’article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales, sa compétence en matière d’éclairage public au syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain, à compter du 1er janvier 2013 ; que, saisi par la commune d’une demande d’expertise le 30 juillet 2013, sur le fondement de l’article R. 532-1 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a fait droit à cette demande par ordonnance du 26 avril 2014 ; que la société Citelum se pourvoit en cassation contre l’ordonnance du 1er août 2014 du juge des référés de la cour administrative de Lyon confirmant la mesure d’expertise ;

Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales : " Les communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale peuvent à tout moment transférer, en tout ou partie, à ce dernier, certaines de leurs compétences dont le transfert n’est pas prévu par la loi ou par la décision institutive ainsi que les biens, équipements ou services publics nécessaires à leur exercice (.). Le transfert de compétences est prononcé par arrêté du ou des représentants de l’Etat dans le ou les départements intéressés. Il entraîne de plein droit l’application à l’ensemble des biens, équipements et services publics nécessaires à leur exercice, ainsi qu’à l’ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés à la date du transfert, des dispositions des trois premiers alinéas de l’article L. 1321-1, des deux premiers alinéas de l’article L. 1321-2 et des articles L. 1321-3, L. 1321-4 et L. 1321-5. (.) " ; que, selon les deux derniers alinéas du même article : " L’établissement public de coopération intercommunale est substitué de plein droit, à la date du transfert de compétences, aux communes qui le composent dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes. / Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu’à leur échéance, sauf accord contraire des parties. La substitution de personne morale aux contrats conclus par les communes n’entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour le cocontractant. La commune qui transfère la compétence informe les cocontractants de cette substitution. " ;

Considérant qu’il résulte de ces dispositions que le transfert par une commune de compétences à un établissement public de coopération intercommunale implique le transfert des biens, équipements et services nécessaires à l’exercice de ces compétences ainsi que les droits et obligations qui leur sont attachés ; que, notamment, les dispositions de l’avant-dernier alinéa de ce même article ne visent que les délibérations et les actes se rapportant aux biens, équipements et services nécessaires à l’exercice des compétences transférées, et n’ont dès lors ni pour objet ni pour effet d’inclure les créances qui résultent de contrats conclus par la commune et venus à expiration avant le transfert ; que les créances détenues ou susceptibles d’être détenues par les communes sur le fondement de tels contrats, alors même qu’ils auraient été conclus dans le cadre de l’exercice de ces compétences ultérieurement transférées, sont distinctes des droits et obligations attachés à ces biens, équipements et services et transférés à l’établissement public de coopération intercommunale ; que ni ces dispositions ni aucune autre ne prévoient le transfert de telles créances à l’établissement public de coopération intercommunale nouvellement créé ;

Considérant qu’il résulte des énonciations non contestées de l’ordonnance attaquée que la commune de Châtillon-sur-Chalaronne, après résiliation du contrat de partenariat conclu avec la société Citelum en matière d’éclairage public, laquelle est intervenue avant la date de prise d’effet du transfert de cette compétence au syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain, a saisi le juge des référés afin d’obtenir une expertise, d’une part, pour déterminer les causes de l’écart constaté entre les prestations prévues au contrat de partenariat et les prestations effectivement réalisées par la société Citelum, ainsi que les préjudices de toute nature causés par cet écart, et en évaluer le montant et, d’autre part, pour obtenir tous éléments techniques ou de fait permettant à la juridiction de déterminer les responsabilités encourues ; que le juge d’appel a ainsi relevé l’intention de la commune d’obtenir tous les éléments utiles pour faire valoir la créance qu’elle estimait détenir sur la société Citelum au titre d’un contrat d’éclairage public résilié avant le transfert de cette compétence au syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain ;

Considérant qu’il résulte de ce qui a été dit au point 4 qu’une telle créance ne peut être regardée comme relevant des droits attachés aux biens, équipements et services transférés au syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain ; que, par suite, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Lyon n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que la commune restait compétente pour saisir le juge des référés afin d’obtenir une expertise dans le but de faire valoir la créance qu’elle estimait détenir sur la société Citelum ;

Considérant, en second lieu, que le juge des référés, saisi sur le fondement des dispositions de l’article R. 532-1 du code de justice administrative, peut appeler à l’expertise toute personne n’étant pas manifestement étrangère au litige ; qu’en estimant qu’il n’y avait pas lieu d’attraire à l’expertise le syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Lyon s’est livré à une appréciation souveraine des faits de l’espèce, exempte de dénaturation, et n’a pas entaché son ordonnance d’erreur de droit ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société Citelum doit être rejeté ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu’être rejetées ; qu’il y a lieu, en revanche, en application des mêmes dispositions, de mettre à sa charge les sommes de 2 000 euros à verser à la commune de Châtillon-sur-Chalaronne et de 2 000 euros à verser au syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain ;

D E C I D E :

Article 1er : Le pourvoi de la société Citelum est rejeté.

Article 2 : La société Citelum versera à la commune de Châtillon-sur-Chalaronne une somme de 2 000 euros et au syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Citelum, à la commune de Châtillon-sur-Chalaronne et au syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain.

 


©opyright - 1998 - contact - Rajf.org - Revue de l'Actualité Juridique Française - L'auteur du site
Suivre la vie du site