CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 212677
SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN)
M Edouard Philippe, Rapporteur
M Piveteau, Commissaire du gouvernement
Lecture du 19 Octobre 2001
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 septembre 1999 et 20 janvier 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN), dont le siège est à l’Hôtel de Ville à Seix (09140) ; le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 19 juillet 1999 de la cour administrative d’appel de Bordeaux en tant qu’il a annulé, à la demande de la société Sieba, le jugement du 13 février 1996 du tribunal administratif de Toulouse prononçant la déchéance de la société Sieba de ses droits dans la concession pour l’exploitation des remontées mécaniques et l’opération d’urbanisation des sites de Prat-Matuou et de Guzet tels qu’ils résultent de la concession signée le 28 avril 1969 ;
2°) de condamner la société Sieba à lui verser la somme de 35 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M Edouard Philippe, Maître des Requêtes,
les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) et de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la société Sieba,
les conclusions de M Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par une convention en date du 28 avril 1969, le syndicat intercommunal d’Aulus-la-Trappe-Ustou et la commune d’Ustou ont concédé à la société d’équipements touristique Pippi frères l’exploitation des remontées mécaniques et l’opération d’urbanisation des sites de Prat-Mataou et de Guzet ; qu’ afin de régler les difficultés survenues entre les autorités concédantes et la société concessionnaire, un protocole d’accord a été signé le 4 avril 1990 et a été annexé à l’avenant du 1er décembre 1990 à la convention de concession ; que, saisi d’une demande en ce sens présentée par le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN), qui s’était substitué au syndicat intercommunal d’Aulus-la-Trappe-Ustou, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé, par jugement en date du 13 février 1996, la déchéance du concessionnaire, la société industrielle d’exploitation du béton armé (Sieba) qui s’était substituée à la société d’équipements touristiques Pippi Frères ; que le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) se pourvoit contre l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux, en date du 19 juillet 1999, qui a annulé le jugement du 13 février 1996 et rejeté les conclusions du syndicat intercommunal tendant à ce que soit prononcée la déchéance ;
Considérant que, pour rejeter les conclusions du SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) tendant à ce que soit prononcée la déchéance du concessionnaire, la cour administrative d’appel de Bordeaux s’est fondée sur ce que les conditions déterminées par l’article 2 de l’avenant du 1er décembre 1990 à la convention de concession n’étaient pas remplies ; que si cet article énonce : "Il est expressément convenu que dans le respect des principes définis en la matière par la loi modifiée n° 85-30 du 9 janvier 1985 et ses dispositions d’application, l’irrespect des engagements résultant, pour le concessionnaire, du protocole d’accord du 4 avril 1990 pourra donner lieu à une décision de déchéance, dans les conditions forme, délais et réserves, notamment force majeure, prévues aux articles 20 et 21 du contrat de concession du 28 avril 1969", il stipule également que la déchéance ne pourra être évoquée "qu’à la condition que les concédants aient respecté et exécuté les obligations à eux imposées par ledit protocole" ; que, contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, les parties au contrat de concession n’ont méconnu aucune règle d’ordre public en subordonnant ainsi la possibilité de prononcer la déchéance du concessionnaire à la condition du respect par le concédant des engagements qu’il avait par ailleurs souscrits ; qu’il appartenait au juge du contrat de concession, saisi d’une demande tendant à ce qu’il prononçât la déchéance, de vérifier si cette condition était remplie ; qu’ainsi, en se livrant à cette vérification, la cour administrative d’appel n’a commis aucune erreur de droit ;
Considérant que c’est par une appréciation souveraine des faits de l’espèce, qui n’est entachée d’aucune dénaturation ni erreur matérielle, que la cour administrative d’appel de Bordeaux a estimé que les autorités concédantes ne s’étaient pas acquittées de leurs obligations contractuelles ;
Considérant que le moyen tiré de la nullité de la clause de la convention de concession par laquelle le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) s’était engagé à verser une subvention de 6,5 millions de francs à la société Sieba, qui n’avait pas été invoqué devant les juges du fond, ne ressortait pas des pièces du dossier qui leur a été soumis ; que, dès lors, ce moyen ne peut pas être invoqué pour la première fois devant le juge de cassation et doit, par suite, être rejeté comme irrecevable ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé le jugement du 13 février 1996 du tribunal administratif de Toulouse ;
Sur les conclusions du SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) et de la société Sieba tendant à l’application des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Sieba, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à verser au SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) à payer à la société Sieba la somme qu’elle demande au même titre ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête du SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN) est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Sieba tendant à l’application des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE GUZET-NEIGE (SIGN), à la commune d’Ustou, à la société Sieba et au ministre de l’équipement, des transports et du logement.