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Conseil d’Etat, 30 juin 2008, n° 276918, SCEA La Prune et autres

Le ministre chargé de l’agriculture, auquel il appartient de définir les mesures propres à prévenir la propagation des organismes nuisibles, a pu, sans méconnaître le champ de sa compétence, définir à ce titre les critères et les barèmes d’indemnisation des opérations d’arrachage des arbres fruitiers atteints ou menacés par le virus de la sharka, qui est au nombre des organismes mentionnés sur la liste prévue à l’article L. 251-3 précité du code rural.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 276918

SCEA LA PRUNE et autres

M. Laurent Cabrera
Rapporteur

M. Emmanuel Glaser
Commissaire du gouvernement

Séance du 7 mai 2008
Lecture du 30 juin 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 3ème sous-section de la section du contentieux

Vu l’ordonnance du 13 janvier 2005, enregistrée le 25 janvier 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Grenoble a transmis au Conseil d’Etat, en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal pour la SCEA LA PRUNE ;

Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2005 au greffe du tribunal administratif de Grenoble, présentée pour la SCEA LA PRUNE, dont le siège est quartier Bonlieu à Châteauneuf-sur-Isère (26300), M. Denis E., la SOCIETE DOMAINE DE BAYANNE, dont le siège est Bayanne à Alixan (26300), représentée par son gérant en exercice, l’EARL LES VERGERS DE GRANDS CHAMPS, dont le siège est quartier Saint-Maurice à Granges Les Beaumont (26600), M. Dominique D.la SCEA VALETTE, dont le siège est 40-44 rue du Vivarais à Saint-Marcel les Valence (26320), l’EARL CLAIRFOND FRERES, dont le siège est quartier Michaud de Laure à Valence (26000), M. Jean-Michel V. ; la SCEA LA PRUNE et autres demandent l’annulation de la circulaire DPEI/SPM/SDCPV/C2004-4058 du 9 novembre 2004 du ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche et des affaires rurales relative à la mise en œuvre des mesures d’indemnisation dans le cadre de la lutte contre la sharka sur les arbres fruitiers ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, et notamment son article 17 ;

Vu le code civil, et notamment son article 545 ;

Vu l’arrêté du 31 juillet 2000 établissant la liste des organismes nuisibles aux végétaux, produits végétaux et autres objets soumis à des mesures de lutte obligatoire ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cabrera, Auditeur,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SCEA LA PRUNE et autres demandent l’annulation de la circulaire du 9 novembre 2004 par laquelle le ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche et des affaires rurales a fixé les conditions d’indemnisation de la perte résultant, pour les arboriculteurs intéressés, des arrachages d’arbres fruitiers atteints par la maladie dite de la sharka ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 251-3 du code rural : " Le ministre chargé de l’agriculture dresse la liste des organismes nuisibles contre lesquels la lutte est organisée dans les conditions qu’il fixe. Sont considérés comme des organismes nuisibles tous les ennemis des végétaux ou des produits végétaux, qu’ils appartiennent au règne animal ou végétal ou se présentent sous forme de virus, mycoplasmes ou autres agents pathogènes " ; qu’aux termes du I de l’article L. 251-8 du même code : " Le ministre chargé de l’agriculture peut prescrire par arrêté les traitements et les mesures nécessaires à la prévention de la propagation des organismes nuisibles inscrits sur la liste prévue à l’article L. 251-3. Il peut également interdire les pratiques susceptibles de favoriser la dissémination des organismes nuisibles, selon les mêmes modalités " ; qu’aux termes enfin des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 251-9 de ce code : " Une allocation, ne dépassant pas les deux tiers de leur valeur, peut être accordée par décision du préfet et sur proposition du directeur départemental de l’agriculture et de la forêt, pour la perte résultant de la destruction des végétaux non contaminés ordonnée par mesure de précaution./ Aucune allocation n’est accordée pour la destruction des végétaux sur lesquels l’existence de l’organisme nuisible a été constatée toutes les fois que le propriétaire ou l’usager du terrain sur lequel se trouvent les végétaux n’a pas effectué la déclaration prévue à l’article L. 251-6 et ne peut prouver à dire de témoins ou de toute autre manière que des traitements ont été effectués en vue de leur destruction " ; qu’il résulte de ces dispositions que le ministre chargé de l’agriculture, auquel il appartient de définir les mesures propres à prévenir la propagation des organismes nuisibles, a pu, sans méconnaître le champ de sa compétence, définir à ce titre les critères et les barèmes d’indemnisation des opérations d’arrachage des arbres fruitiers atteints ou menacés par le virus de la sharka, qui est au nombre des organismes mentionnés sur la liste prévue à l’article L. 251-3 précité du code rural ; qu’ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la circulaire litigieuse serait entachée d’incompétence ;

Considérant que la circulaire, qui a pour objectif de lutter contre la sharka, ne saurait, en tout état de cause, méconnaître les dispositions de l’arrêté du ministre de l’agriculture et de la pêche du 31 juillet 2000, lequel se borne à établir la liste des organismes nuisibles aux végétaux, produits végétaux et autres objets soumis à des mesures de lutte obligatoire, au nombre desquels figure la sharka ;

Considérant que si les requérants soutiennent que la circulaire est illégale en ce qu’il résulte de ses dispositions une inégalité de traitement, selon l’année de contamination, entre les arboriculteurs dont les parcelles sont contaminées, dès lors qu’elle supprime toute indemnisation pour les arboriculteurs dont les parcelles ont un taux de contamination supérieur à 10 %, alors qu’auparavant les arboriculteurs ont perçu une indemnité forfaitaire par hectare de plantation arraché, le ministre a pu légalement, pour assurer l’efficacité des mesures prophylactiques, ne pas reconduire pour la nouvelle campagne ce régime d’indemnisation en vue d’inciter les exploitants à arracher les arbres contaminés dès l’apparition des premiers symptômes ;

Considérant enfin que la circulaire a pour seul objet d’organiser l’indemnisation des exploitants au titre des arbres arrachés ; que, par suite, les requérants ne sauraient utilement invoquer l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et soutenir qu’il ne pouvait être porté atteinte à leur droit de propriété que dans les conditions prévues à l’article 545 du code civil ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l’annulation de la circulaire du 9 novembre 2004 du ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche et des affaires rurales ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SCEA LA PRUNE, de M. Denis E., de la SOCIETE DOMAINE DE BAYANNE, de l’EARL LES VERGERS DE GRANDS CHAMPS, de M. Dominique D., de la SCEA VALETTE, de l’EARL CLAIRFOND FRERES et de M. Jean-Michel V. est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SCEA LA PRUNE, à M. Denis E., à la SOCIETE DOMAINE DE BAYANNE, à l’EARL LES VERGERS DE GRANDS CHAMPS, à M. Dominique D., à la SCEA VALETTE, à l’EARL CLAIRFOND FRERES, à M. Jean-Michel V. et au ministre de l’agriculture et de la pêche.

 


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