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Conseil d’Etat, 18 juin 2008, n° 289848, Syndicat général de l’éducation nationale CFDT du Bas-Rhin

La délibération par laquelle l’assemblée délibérante d’une collectivité territoriale décide d’inscrire à son budget un crédit de paiement, qui n’a pas les mêmes effets juridiques que celle par laquelle elle inscrit des autorisations de programme, a le caractère de décision faisant grief.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 289848

SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN

M. Xavier Domino
Rapporteur

M. François Séners
Commissaire du gouvernement

Séance du 28 mai 2008
Lecture du 18 juin 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 3ème sous-section de la section du contentieux

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 février et 31 mai 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN, dont le siège est 1 rue Sédillot à Strasbourg (67000) ; le SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 1er décembre 2005 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement en date du 26 mai 1999 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la délibération du 23 décembre 1994 par laquelle le conseil régional de la région Alsace a voté un crédit de paiement de 20 millions de francs pour la construction du lycée Charles de Foucauld à Strasbourg ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la région Alsace la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 72-619 du 5 juillet 1972 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Xavier Domino, Auditeur,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat du SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN,

- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le lycée Charles de Foucauld, établissement privé d’enseignement sous contrat, contraint de quitter les locaux qu’il occupait à Strasbourg, a sollicité l’aide de la région Alsace pour financer la construction de nouveaux locaux ; que par délibération du 15 février 1994, le conseil régional d’Alsace a décidé d’accorder, dans le cadre d’une autorisation de programme, une subvention de 75 MF pour la réalisation de cette construction et prévu que le paiement de cette subvention interviendrait selon des modalités définies par une convention ; que cette convention a été signée le 13 avril 1994 ; qu’enfin, par délibération du 23 décembre 1994, le conseil régional a inscrit au budget primitif de l’année 1995 un crédit de paiement de 20 millions de francs ; que le SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE (SGEN-CFDT) du Bas-Rhin se pourvoit en cassation contre l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 1er décembre 2005 qui a confirmé le jugement du tribunal administratif de Strasbourg rejetant sa demande d’annulation de la délibération du 23 décembre 1994 ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen du pourvoi ;

Considérant qu’aux termes de l’article 6-1 de la loi du 5 juillet 1972 portant création et organisation des régions dans sa rédaction applicable à l’époque des faits : " Si le conseil régional le décide, les dotations affectées aux dépenses d’investissement comprennent des autorisations de programme et des crédits de paiement. / Les autorisations de programme constituent la limite supérieure des dépenses qui peuvent être engagées pour le financement des investissements. Elles demeurent valables sans limitation de durée jusqu’à ce qu’il soit procédé à leur annulation. Elles peuvent être révisées. / Les crédits de paiement constituent la limite supérieure des dépenses pouvant être ordonnancées ou payées pendant l’année pour la couverture des engagements contractés dans le cadre des autorisations de programme correspondantes. / L’équilibre budgétaire de la section d’investissement s’apprécie en tenant compte des seuls crédits de paiement. / Lorsque la section d’investissement du budget comporte des autorisations de programme et des crédits de paiement, le président du conseil régional peut jusqu’à l’adoption du budget ou jusqu’à son règlement en cas de non-adoption du budget, liquider et mandater les dépenses d’investissement correspondant aux autorisations de programme ouvertes au cours des exercices antérieurs, dans la limite d’un montant de crédits de paiement par chapitre, égal au tiers des autorisations de programme ouvertes au cours de l’exercice précédent. Les crédits correspondants sont inscrits au budget lors de son adoption ou de son règlement. " ;

Considérant qu’il résulte de ces dispositions que la délibération par laquelle l’assemblée délibérante d’une collectivité territoriale décide d’inscrire à son budget un crédit de paiement, qui n’a pas les mêmes effets juridiques que celle par laquelle elle inscrit des autorisations de programme, a le caractère de décision faisant grief ; que la circonstance qu’une telle décision budgétaire soit prise en exécution d’une délibération décidant d’accorder une subvention dans le cadre d’une autorisation de programme et à la suite d’une convention de financement signée entre le bénéficiaire de la subvention et la collectivité territoriale n’est pas de nature à la rendre insusceptible de recours ; qu’il suit de là qu’en jugeant que la délibération du 23 décembre 1994 n’avait pas le caractère de décision faisant grief, la cour administrative d’appel a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ; qu’ainsi, l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 1er décembre 2005 doit être annulé ;

Considérant que dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la région Alsace ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que si la publicité de la délibération du 15 février 1994 à laquelle il a été procédé dans le Bulletin d’information de la Région Alsace de février 1994 n’indique pas la nature des classes ouvertes au sein du lycée Charles de Foucauld, cette absence de précision n’est pas de nature à la rendre irrégulière dès lors qu’elle reprend la teneur exacte de la délibération litigieuse ; qu’ainsi, le délai de recours contre celle-ci étant expiré à la date à laquelle son illégalité a été invoquée par la voie de l’exception, aucun des moyens soulevés à son encontre à l’appui de la contestation de délibération attaquée ne peut être accueilli ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN n’est pas fondé à se plaindre de ce que, par jugement du 26 mai 1999, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête ;

Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge de la région Alsace au titre des frais exposés par le SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN et non compris dans les dépens ; que sur le fondement des mêmes dispositions, il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge du SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN le versement d’une somme à la région Alsace au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt du 1er décembre 2005 de la cour administrative d’appel de Nancy est annulé.

Article 2 : La requête du SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN devant la cour administrative d’appel de Nancy est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la région Alsace et du SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT GENERAL DE L’EDUCATION NATIONALE CFDT DU BAS-RHIN, à la région Alsace et au lycée Charles de Foucauld.

 


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