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Conseil d’Etat, 17 novembre 1995, Société Mondial Décor

Il ne ressort pas des pièces du dossier qu’eu égard notamment à la nature des produits mis en vente dans le magasin précité, le repos simultané le dimanche de tout le personnel du magasin exploité par la SOCIETE MONDIAL DECOR à Sartrouville puisse être regardé comme étant "préjudiciable au public" au sens des dispositions précitées de l’article L221-6 du code du travail.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 158621

SOCIETE MONDIAL DECOR

Mme Charzat, Rapporteur

Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement

Lecture du 17 Novembre 1995

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 mai 1994 et 7 septembre 1994 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SOCIETE MONDIAL DECOR, dont le siège social est Centre commercial Englos-les-Géants BP 39 à Haubourdin Cedex (59480), représentée par son représentant légal en exercice ; la SOCIETE MONDIAL DECOR demande au Conseil d’Etat :

1° d’annuler le jugement du 21 février 1994 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande dirigée contre l’arrêté du 17 mai 1993 par lequel le préfet des Yvelines lui a refusé l’autorisation de déroger à la règle du repos le dimanche pour le personnel de son établissement Heytens à Sartrouville ;

2° d’annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail, notamment ses articles L 221-5, L 221-6 et R 221-1 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-984 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de Mme Charzat, Conseiller d’Etat,

- les observations de Me Le Prado , avocat de la SOCIETE MONDIAL DECOR,

- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article L221-5 du code du travail : "Le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche" ; qu’aux termes de l’article L221-6 du même code : "Lorsqu’il est établi que le repos simultané, le dimanche, de tout le personnel d’un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement, le repos peut être donné, soit toute l’année, soit à certaines époques de l’année seulement suivant l’une des modalités ci-après : a) un autre jour que le dimanche à tout le personnel de l’établissement ; b) du dimanche midi au lundi midi ; c) le dimanche après-midi avec un repos compensateur d’une journée par roulement et par quinzaine ; d) par roulement à tout ou partie du personnel. Les autorisations nécessaires ne peuvent être accordées que pour une durée limitée. Elles sont données après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d’industrie et des syndicats d’employeurs et de travailleurs intéressés de la commune" ; qu’aux termes de l’article R221-1 du même code : "Lorsqu’un établissement veut bénéficier de l’une des exceptions à l’attribution le dimanche du repos hebdomadaire, qui sont prévues à l’article L2216, il est tenu d’adresser une demande au préfet du département. Les avis prévus audit article doivent être donnés dans le délai d’un mois. Le préfet statue ensuite par un arrêté motivé qu’il notifie dans la huitaine" ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, pour se prononcer sur la demande de dérogation à la règle du repos simultané le dimanche que lui avait adressée la SOCIETE MONDIAL DECOR pour le personnel de son établissement de Sartrouville, le préfet des Yvelines a consulté le conseil municipal de Sartrouville, la chambre de commerce et d’industrie interdépartementale Val-d’Oise-Yvelines, le Groupement des unions interprofessionnelles des Yvelines, ainsi que les syndicats d’employeurs et de travailleurs intéressés ; que le moyen tiré de l’absence de certaines consultations manque donc en fait ;

Considérant que le délai prévu par l’article R221-1 précité du code du travail n’est pas prescrit à peine de nullité ; que, dès lors, la méconnaissance dudit délai ne peut être utilement invoquée pour contester la légalité de l’arrêté attaqué ;

Considérant que, pour rejeter la demande de la SOCIETE MONDIAL DECOR, le préfet s’est fondé, notamment, sur la circonstance que "les activités exercées par l’établissement susvisé (éléments de décoration, vente de papiers peints et tissus) ne répondent pas, pour le public, à une nécessité quotidienne avérée, se manifestant plus particulièrement le dimanche", l’achat de ces produits pouvant être effectué un autre jour de la semaine et que "l’examen de cette demande ne fait pas apparaître d’éléments susceptibles de démontrer que le refus de dérogation mettrait en péril la survie même de l’entreprise, notamment en raison de l’impossibilité d’un report suffisant de clientèle sur d’autres jours de la semaine" ; qu’ainsi, le préfet a suffisamment motivé son arrêté ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

Considérant, en premier lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier qu’eu égard notamment à la nature des produits mis en vente dans le magasin précité, le repos simultané le dimanche de tout le personnel du magasin exploité par la SOCIETE MONDIAL DECOR à Sartrouville puisse être regardé comme étant "préjudiciable au public" au sens des dispositions précitées de l’article L221-6 du code du travail ;

Considérant, en second lieu, que la SOCIETE MONDIAL DECOR ne peut se prévaloir, pour obtenir une dérogation à la règle du repos simultané le dimanche de tout le personnel, de l’importance de son chiffre d’affaires dominical, qui a été réalisé grâce à son maintien dans une situation irrégulière de nature à fausser la concurrence ; que si elle soutient par ailleurs que le repos simultané le dimanche de tout le personnel compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement, elle n’apporte aucune précision de nature à démontrer le bien-fondé de ses allégations ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SOCIETE MONDIAL DECOR n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 17 mai 1993 par lequel le préfet des Yvelines lui a refusé l’autorisation de déroger à la règle du repos dominical ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE MONDIAL DECOR est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE MONDIAL DECOR et au ministre du travail, du dialogue social et de la participation.

 


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