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Conseil d’Etat, 11 février 2004, n° 244324, Association Défense de la chanson française - Radio Fréquence Nîmes

Le Fonds de soutien ne pouvait légalement ordonner le reversement de la première tranche de l’aide à l’équipement accordée à l’association requérante le 23 novembre 2000 et refuser le versement de la deuxième tranche que si les ressources de cette association provenant de la diffusion à l’antenne de messages publicitaires venaient à dépasser le plafond de 20 % du chiffre d’affaires prévu par l’article 80 de la loi du 30 septembre 1986 au cours de l’exercice 2000 et au cours de l’exercice 2001.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N°s 244324, 247390

ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES

M. Sanson
Rapporteur

M. Chauvaux
Commissaire du gouvernement

Séance du 16 janvier 2004
Lecture du 11 février 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 4ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la Section du contentieux

Vu 1°), sous le n° 244324, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mars et 16 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES, dont le siège est Ancienne école Masillan, route d’Uzès à Nîmes (30000) ; l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 15 novembre 2001, confirmée par celle du 17 janvier 2002, par lesquelles la commission du Fonds de soutien à l’expression radiophonique a rejeté sa demande de subvention de fonctionnement ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 2 286 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Vu 2°), sous le n° 247390, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juin et 30 septembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES, dont le siège est Ancienne école Masillan, route d’Uzès à Nîmes (30000) ; l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision en date du 17 janvier 2002, confirmée par celle du 13 mars 2002, par laquelle la commission du Fonds de soutien à l’expression radiophonique a rejeté sa demande tendant au bénéfice de la deuxième tranche d’aide à l’équipement pour 2000 et lui a réclamé le remboursement de la première tranche déjà perçue de cette aide, d’un montant de 3 078, 86 euros ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 2 286 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée ;

Vu le décret n° 97-1263 du 29 décembre 1997 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sanson, Conseiller d’Etat,
- les observations de la SCP Vuitton, Vuitton, avocat de l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n°s 244324 et 247390 présentent à juger les mêmes questions ; qu’il y a lieu de les joindre par une seule décision ;

Sur la légalité des décisions du Fonds de soutien à l’expression radiophonique refusant la subvention de fonctionnement demandée :

Considérant que l’association requérante a déposé en 2001 auprès du Fonds de soutien à l’expression radiophonique (FSER) une demande de subvention de fonctionnement accompagnée de documents comptables, certifiés conformes par un expert-comptable relatifs à l’exercice 2000 et faisant apparaître un montant de recettes publicitaires de 152 206 F représentant plus de 33 % du chiffre d’affaires, dont le montant s’élevait à 455 865 F ; que cette demande a été rejetée par une décision de la commission du FSER du 15 novembre 2001, notifiée par une lettre du 30 novembre 2001, au motif que le montant des recettes de publicité par rapport au chiffre d’affaires était supérieur au taux de 20 % autorisé par l’article 80 de la loi du 30 septembre 1986 susvisée ; qu’à la suite de ce rejet, un recours gracieux a été formé par l’association requérante, accompagné de nouveaux documents comptables certifiés conformes par un second expert-comptable et faisant apparaître, pour un chiffre d’affaires inchangé de 455 865 F, des recettes publicitaires d’un montant de 69 900 F, soit 15, 5 % du chiffre d’affaires, et des recettes provenant d’animations d’un montant de 82 306 F ; que ce recours a été rejeté par une décision de la même commission du 17 janvier 2002, notifiée par une lettre du 29 janvier 2002 au motif que l’insuffisante précision des raisons pour lesquelles la première comptabilité, certifiée conforme et soumise dans les délais prescrits, ne pouvait plus être regardée comme valide, ne mettait pas la commission en mesure d’apprécier la portée de l’erreur d’imputation commise par l’expert-comptable dans la comptabilité initiale ;

Considérant qu’aux termes de l’article 80 de la loi du 30 septembre 1986 susvisée : "Les services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne (.) lorsque leurs ressources commerciales provenant de messages diffusés à l’antenne et présentant le caractère de publicité de marque ou de parrainage sont inférieures à 20 % de leur chiffre d’affaires total bénéficient d’une aide selon des modalités fixées par décret en Conseil d’Etat" ; qu’aux termes de l’article 16 du décret du 29 décembre 1997 susvisé dans sa rédaction alors en vigueur pris pour l’application de l’article 80 précité : "Une subvention annuelle de fonctionnement est attribuée aux titulaires d’une autorisation d’exploitation d’un service de radiodiffusion sonore (.), au vu d’un dossier établi conformément aux modalités de présentation arrêtées par la commission (de soutien à l’expression radiophonique) et comportant le dernier bilan et le dernier compte de résultat du service considéré, certifiés conformes par un expert-comptable agréé." ;

Considérant qu’il résulte des documents produits en premier lieu par l’association requérante que le pourcentage de ses recettes publicitaires au titre de l’année 2000 était supérieur au plafond fixé par les dispositions précitées ; que si, à l’occasion de son recours gracieux, l’association a produit de nouveaux documents faisant apparaître un pourcentage de recettes publicitaires inférieur au maximum autorisé, il ne ressort pas des pièces du dossier que le montant précité de 82 306 F attribué à des "animations" n’ait pas correspondu aussi à des recettes publicitaires ; que, par suite, la commission du FSER, qui n’a pas écarté a priori toute possibilité de rectification des documents initialement produits, a pu, sans entacher sa décision d’inexactitude matérielle des faits et sans commettre d’erreur d’appréciation, estimer qu’en l’espèce, le pourcentage des recettes publicitaires restait supérieur au maximum autorisé pour que l’association puisse bénéficier d’une subvention de fonctionnement ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES n’est pas fondée à demander l’annulation des décisions du 15 novembre 2001 et du 17 janvier 2002 de la commission du Fonds de soutien à l’expression radiophonique rejetant sa demande de subvention de fonctionnement ;

Sur la légalité des décisions du Fonds de soutien à l’expression radiophonique relatives à l’aide à l’équipement :

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 23 novembre 2000, la commission du Fonds de soutien à l’expression radiophonique avait accordé à l’association requérante l’aide à l’équipement prévue par l’article 14 du décret susvisé du 29 décembre 1997, en décidant de lui verser immédiatement la première tranche de cette aide et en lui indiquant qu’elle obtiendrait la seconde tranche sur présentation des factures acquittées attestant la réalisation de l’investissement subventionné ; que par la décision attaquée du 17 janvier 2002, confirmée sur recours gracieux le 13 mars 2002, la commission a ordonné le reversement de la première tranche et refusé le versement de la seconde, en se fondant sur le dépassement du plafond de ressources publicitaires au cours de l’année 2000 ;

Sur la compétence du Conseil d’Etat en premier et dernier ressort :

Considérant qu’aux termes de l’article R. 311-1 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort : "4° Des recours dirigés contre les décisions administratives des organismes collégiaux à compétence nationale" ; que ces dispositions ne limitent pas la compétence directe du Conseil d’Etat aux recours pour excès de pouvoir dirigés contre les décisions de ces organismes ; que le Premier ministre n’est par suite pas fondé à soutenir que les conclusions de la requête tendant à l’annulation de la décision attaquée, en tant qu’elle ordonne le reversement de la première tranche de l’aide à l’équipement, relèveraient de la compétence du tribunal administratif dès lors qu’elles soulèvent un litige de plein contentieux ;

Sur le fond :

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que l’article 15 du décret du 29 décembre 1997 prévoit que l’aide à l’équipement est reversée au fonds de soutien dans les conditions prévues aux articles 19 et 20 dudit décret si le service bénéficiaire dépasse le plafond de ressources publicitaires défini à l’article 80 de la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication "durant l’exercice comptable au cours duquel l’aide lui a été attribuée et durant l’exercice suivant" ;

Considérant qu’en vertu des dispositions précitées, le Fonds de soutien ne pouvait légalement ordonner le reversement de la première tranche de l’aide à l’équipement accordée à l’association requérante le 23 novembre 2000 et refuser le versement de la deuxième tranche que si les ressources de cette association provenant de la diffusion à l’antenne de messages publicitaires venaient à dépasser le plafond de 20 % du chiffre d’affaires prévu par l’article 80 de la loi du 30 septembre 1986 au cours de l’exercice 2000 et au cours de l’exercice 2001 ; qu’en ordonnant le reversement de la première tranche de l’aide et en refusant le versement de la seconde sans avoir constaté un dépassement du plafond au cours de chacun de ces deux exercices, la commission n’a pas légalement justifié sa décision du 17 janvier 2002 ; qu’il ne ressort d’ailleurs pas des pièces versées au dossier que le plafond légal ait été dépassé en 2001 ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’association requérante est fondée à demander l’annulation des décisions des 17 janvier et 13 mars 2002 de la commission du Fonds de soutien à l’expression radiophonique lui retirant le bénéfice de l’aide à l’équipement ;

Sur les conclusions de l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES tendant au remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner l’Etat, par application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à l’association la somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête n° 244324 de l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES est rejetée.

Article 2 : La décision du 17 janvier 2002 de la commission du Fonds de soutien à l’expression radiophonique retirant à l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES le bénéfice de l’aide à l’équipement, ensemble la décision du 13 mars 2002 rejetant son recours gracieux, sont annulées.

Article 3 : L’Etat versera à l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l’ASSOCIATION DEFENSE DE LA CHANSON FRANCAISE-RADIO FREQUENCE NIMES, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.

 


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