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Conseil d’Etat, 30 juillet 2003, n° 230765, M. Gérard R.

Les dispositions de l’article 389 du Code de justice militaire, qui s’appliquent aux officiers de réserve, instituent la perte de grade comme peine complémentaire des condamnations pour crime ou pour certains délits. Contrairement à ce que soutient le requérant, elles ne peuvent, alors même qu’elles s’insèrent dans le titre premier du troisième livre, du code de justice militaire intitulés respectivement "peines applicables par les juridictions des forces armées" et "peines applicables par les juridictions des forces armées et des infractions d’ordre militaire" s’entendre comme limitant leur application aux condamnations prononcées par une juridiction des forces armées ou pour une infraction militaire.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 230765

M. R.

M. Christnacht
Rapporteur

M. Le Chatelier
Commissaire du gouvernement

Séance du 9 juillet 2003
Lecture du 30 juillet 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 5ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu l’ordonnance n° 001867615 en date du 20 février 2001, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d’Ettat le 27 février 2001, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a transmis au président de la section du contentieux du Conseil &Etat la demande de M. Gérard R. ;

Vu la demande, enregistrée le 8 décembre 2000 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentée par M. Gérard R. ; M. R. demande au tribunal administratif de Paris :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision du ministre de la défense du 11 octobre 2000 rejetant sa demande de réintégration dans son grade dans la réserve et dans honorariat ;

2°) d’enjoindre au ministre de la défense de procéder à cette réintégration ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice militaire ;

Vu le nouveau code pénal ;

Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 modifiée portant statut général des militaires ;

Vu le décret n° 76-886 du 16 septembre 1976 portant statut des officiers de réserve, des sous-officiers de réserve et des officiers mariniers de réserve ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique
- le rapport de M. Christnacht, Conseiller d’Etat,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article 389 du code de justice militaire : "Toute condamnation, même si elle n’a pas entraîné la dégradation civique ou la destitution, prononcée par quelque juridiction que ce soit, contre un officier, un sous-officier de carrière ou un sous- officier servant sous contrat entraîne de plein droit la perte du grade, si elle est prononcée pour crime" ; que ces dispositions, qui s’appliquent aux officiers de réserve, instituent la perte de grade comme peine complémentaire des condamnations pour crime ou pour certains délits ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, elles ne peuvent, alors même qu’elles s’insèrent dans le titre premier du troisième livre, du code de justice militaire intitulés respectivement "peines applicables par les juridictions des forces armées" et "peines applicables par les juridictions des forces armées et des infractions d’ordre militaire" s’entendre comme limitant leur application aux condamnations prononcées par une juridiction des forces armées ou pour une infraction militaire ; que, dès lors, le ministre de la défense était tenu de constater que M. R., officier de réserve, condamné par la cour d’assises de Douai à une peine criminelle, avait été privé de plein droit de son grade de sous-lieutenant dans la réserve ; que, par suite, et en vertu des dispositions de l’article 27 du décret du 16 septembre 1976 portant statut des officiers de réserve, des sous-officiers de réserve et des officiers mariniers de réserve, la perte du grade du requérant impliquait celle de l’honorariat dans ce grade ;

Considérant que les dispositions de l’article 133-16 du nouveau code pénal, invoquées par le requérant, aux termes duquel la réhabilitation : " ... efface toutes les incapacités et déchéances qui résultent de la condamnation" ne s’appliquent pas à la perte de grade, à laquelle sont seules applicables, même lorsque la perte de grade a été constatée à la suite d’une peine qui n’a pas été prononcée par une juridiction des forces armées ou pour une infraction militaire, les dispositions de l’article 373 du code de justice militaire selon lesquelles "en cas de réhabilitation, la perte de grade, des décorations françaises et des droits à pension pour services antérieurs qui résultaient de la condamnation, subsiste pour les militaires ou assimilés de tout grade..." ; que, dès lors, le ministre de la défense était tenu de rejeter la demande par laquelle M. R. lui demandait, à la suite de la réhabilitation dont il avait bénéficié, de le rétablir dans son grade et dans l’honorariat de ce grade ; qu’ainsi le moyen tiré de ce que le ministre de la défense aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en rejetant cette demande est inopérant à l’encontre de la décision attaquée ; qu’il résulte de ce qui précède que M. R. n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de réintégration dans son grade et dans l’honorariat de ce grade ;

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions d’excès de pouvoir de M. R., n’appelle aucune mesure d’exécution ; que la demande de celui-ci tendant à ce qu’il soit enjoint au ministre de la défense de prononcer sa réintégration dans son grade et dans l’honorariat de ce grade ne peut, par suite, qu’être rejetée ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. R. est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Gérard R. et au ministre de la défense.

 


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