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Conseil d’Etat, 2 octobre 2002, n° 224786, Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie c/ Mlle Jacqueline de N.

Eu égard aux garanties dont le livre des procédures fiscales entoure la mise en oeuvre d’une vérification de comptabilité, l’administration est tenue, lorsque, faisant usage de son droit de communication, elle consulte au cours d’une vérification des pièces comptables saisies et détenues par l’autorité judiciaire, de soumettre l’examen de ces pièces à un débat oral et contradictoire avec le contribuable. A défaut, les impositions découlant de l’examen de ces pièces sont entachées d’irrégularité.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 224786

MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE
c/ Mlle de N.

M. Salesse
Rapporteur

Mme Mitjavile
Commissaire du gouvernement

Séance du 11 septembre 2002
Lecture du 2 octobre 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 10ème sous-section de la Section du contentieux

Vu le recours du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, enregistré le 6 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat ; le ministre demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 29 juin 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Douai a rejeté sa demande tendant à l’annulation du jugement du 4 mars 1997 du tribunal administratif d’Amiens accordant à Mlle Jacqueline de N. la décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1986 à 1988, ainsi que des pénalités y afférentes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Salesse, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mlle de N. ,
- les conclusions de Mme Mitjavile, Commissaire du-gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mlle de N. , qui exploitait à Saint-Quentin un débit de boissons, a fait l’objet en 1989 d’une vérification de comptabilité qui a porté sur les années 1986, 1987 et 1988 ; qu’ayant reçu le 18 octobre 1989 l’avis de vérification, elle a invité le vérificateur par lettre du 20 octobre 1989 à récupérer auprès du procureur de la République diverses pièces comptables saisies dans le cadre d’une enquête ; que le vérificateur s’est alors rendu au greffe du tribunal de grande instance de Saint-Quentin pour y consulter les livres d’inventaire dont il a sur place pris des photocopies afin de les examiner avec le contribuable ;

Considérant qu’eu égard aux garanties dont le livre des procédures fiscales entoure la mise en oeuvre d’une vérification de comptabilité, l’administration est tenue, lorsque, faisant usage de son droit de communication, elle consulte au cours d’une vérification des pièces comptables saisies et détenues par l’autorité judiciaire, de soumettre l’examen de ces pièces à un débat oral et contradictoire avec le contribuable ; qu’à défaut, les impositions découlant de l’examen de ces pièces sont entachées d’irrégularité ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, la cour administrative d’appel de Douai n’a pas commis d’erreur de droit en rappelant cette obligation qui s’impose à l’administration ;

Considérant toutefois, qu’en se bornant à relever, pour juger irrégulière la procédure ayant conduit à l’imposition de Mlle de N. , que cette dernière avait été privée du débat contradictoire auquel elle avait droit, du seul fait que le vérificateur n’avait pas informé l’intéressée de son intention de procéder à la consultation des pièces saisies et ne l’avait pas invitée à y être présente, la cour administrative d’appel de Douai, qui a relevé par ailleurs que le vérificateur avait joint à la notification de redressement la copie des pièces saisies et mené antérieurement à cet envoi un débat avec la contribuable sur les éléments ainsi recueillis, s’est méprise sur l’étendue de l’obligation rappelée plus haut et a, par suite, commis une erreur de droit ; qu’ainsi le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie est fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant qu’aux termes de l’article L.821-2 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat, s’il prononce l’annulation d’une décision d’une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l’affaire au fond si l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au fond ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mlle de N. a elle-même informé le vérificateur que certaines pièces de sa comptabilité devaient être consultées au tribunal de grande instance ; qu’à la suite de cette consultation, le vérificateur a rencontré le contribuable à plusieurs reprises ; qu’à cette occasion des photocopies des pièces consultées ont été remises à l’intéressée et débattues avec elle ; qu’ainsi, Mlle de N. n’a pas été privée du débat oral et contradictoire auquel elle pouvait prétendre ; que, dès lors, c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d’Amiens a jugé irrégulière, pour ce motif, la procédure de redressement ;

Considérant, toutefois, qu’il appartient au Conseil d’Etat, saisi de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par Mlle de N. ;

Considérant qu’il ne résulte pas de l’instruction que la durée de la vérification de comptabilité ait excédé la durée légale de trois mois ; que le moyen tiré de ce que les pièces comptables détenues par l’autorité judiciaire auraient été irrégulièrement emportées par le vérificateur manque en fait ; que le moyen tiré de ce que l’administration n’a pas tenu compte des attestations d’achats établies par des clients et produites par la requérante n’est pas assorti de précisions suffisantes pour qu’il soit jugé de son bien-fondé ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mlle de N. n’est pas fondée à demander la décharge des impositions litigieuses ;

Sur la demande de Mlle de N. tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mlle de N. la somme que demande celle-ci au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt du 29 juin 2000 de la cour administrative d’appel de Douai et le jugement du 4 mars 1997 du tribunal administratif d’Amiens sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par Mlle de N. devant le tribunal administratif d’Amiens est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE et à Mlle Jacqueline de N. .

 


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