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Conseil d’Etat, 29 juillet 2002, n° 232582, Association Seine-et-Marnaise pour la sauvegarde de la nature

En vertu de l’article R. 421-38-6 du code de l’urbanisme, lorsque la construction se trouve dans un site classé, le permis de construire ne peut être délivré qu’avec l’accord exprès du ministre chargé des monuments historiques et des sites. Si le ministre peut, en vertu de l’article 12 de la loi du 2 mai 1930, autoriser la modification d’un site classé, sa compétence ne s’étend pas à des mesures qui auraient pour effet de rendre le classement sans objet et seraient ainsi l’équivalent d’un véritable déclassement total ou partiel, déclassement qui, en vertu de l’article 14 de la même loi, ne peut être prononcé que par décret en Conseil d’Etat.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 232582

ASSOCIATION SEINE-ET-MARNAISE POUR LA SAUVEGARDE DE LA NATURE

M. Debat, Rapporteur
Mme Mitjavile, Commissaire du gouvernement

Séance du 26 juin 2002
Lecture du 29 juillet 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 10ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat les 13 avril et 13 août 2001, présentés pour l’ASSOCIATION SEINE-ET-MARNAISE POUR LA SAUVEGARDE DE LA NATURE, dont le siège est situé Mairie de Melun (77011) ; elle demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt en date du 30 janvier 2001 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a, d"une part, annulé un jugement en date du 22 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Melun a annulé le permis de construire accordé le 7 septembre 1999 par le maire de Fontainebleau à l’Institut européen d’administration des affaires (INSEAD) et, d’autre part, rejeté ses conclusions tendant à l’annulation de ce permis de construire ;

2°) d’annuler le permis de construire litigieux ;

3°) de condamner l’INSEAD et la ville de Fontainebleau à lui payer la somme de 10 000 F en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les notes en délibéré présentées pour l’ASSOCIATION SEINE-ET-MARNAISE POUR LA SAUVEGARDE DE LA NATURE ;

Vu la loi du 2 mai 1930 ;

Vu le code du domaine de l’Etat ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Debat, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de l’ASSOCIATION SEINE-ET-MARNAISE POUR LA SAUVEGARDE DE LA NATURE et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la ville de Fontainebleau et de l’Institut européen d’administration des affaires.
- les conclusions de Mme Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l’Institut européen d’administration des affaires (INSEAD), qui souhaite étendre ses installations, a, en vertu d’un acte d’échange conclu avec l’Etat le 21 mai 1999, acquis un terrain d’une superficie d’environ 1,6 hectare contigü à son campus et situé dans le périmètre du site, classé par arrêté ministériel du 2 juillet 1965, de la forêt domaniale de Fontainebleau ; que l’extension projetée par l’Institut européen d’administration des affaires a été autorisée le 3 août 1999 par le ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement et qu’un permis de construire a été délivré par le maire de Fontainebleau le 7 septembre 1999 ;

Considérant qu’en vertu de l’article R. 421-38-6 du code de l’urbanisme, lorsque la construction se trouve dans un site classé, le permis de construire ne peut être délivré qu’avec l’accord exprès du ministre chargé des monuments historiques et des sites ; que, si le ministre peut, en vertu de l’article 12 de la loi du 2 mai 1930, autoriser la modification d’un site classé, sa compétence ne s’étend pas à des mesures qui auraient pour effet de rendre le classement sans objet et seraient ainsi l’équivalent d’un véritable déclassement total ou partiel, déclassement qui, en vertu de l’article 14 de la même loi, ne peut être prononcé que par décret en Conseil d’Etat ;

Considérant que, pour écarter le moyen tiré de ce que le permis de construire litigieux ne pouvait être accordé qu’après que le terrain d’assiette des constructions projetées ait été déclassé par décret en Conseil d’Etat, et juger le ministre compétent pour accorder l’autorisation prévue par l’article R. 421-38-6 précité, la cour administrative d’appel a pris en compte la superficie du terrain en cause, l’impact de l’opération autorisée, ainsi que la nature des compensations apportées par l’Institut européen d’administration des affaires qui cédait à l’Etat, d’une part, une parcelle située au sein de la forêt de Fontainebleau sur laquelle étaient édifiés des abattoirs désaffectés, d’une superficie équivalente au terrain d’assiette de l’opération, d’autre part, 16 hectares boisés mitoyens de ladite forêt ; qu’en retenant l’ensemble de ces critères, y compris celui tiré de l’existence de compensations de nature à contribuer à l’embellissement et à l’agrandissement du site classé de la forêt de Fontainebleau, pour juger que la modification de l’état des lieux autorisée par le ministre de l’environnement ne pouvait être regardée comme une dénaturation de ce site équivalant à un déclassement partiel, la cour administrative d’appel de Paris n’a pas commis d’erreur de droit ;

Considérant qu’en estimant que la modification de l’état des lieux autorisée le 3 août 1999 par le ministre ne pouvait être regardée comme une dénaturation du site équivalant à un déclassement, compte tenu de la faible superficie en cause, de l’impact limité de l’opération autorisée et en raison des compensations apportées par le pétitionnaire, les juges du fond ont porté sur les faits qui leur étaient soumis une appréciation souveraine qui, en l’absence de dénaturation, n’est pas susceptible d’être discutée devant le juge de cassation, et ont suffisamment motivé leur décision ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 421-1 du code de l’urbanisme : "La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d’un titre l’habilitant à construire sur le terrain (...)" ; qu’en jugeant que l’Institut européen d’administration des affaires devait être regardé comme le propriétaire apparent du terrain sur lequel portait la demande de permis de construire, dès lors qu’aucune contestation de la validité du titre de propriété dont il se prévalait n’avait été portée à la connaissance du maire de Fontainebleau ou ne ressortait du dossier de la demande qui lui était soumise. alors même que les conditions de sa cession par l’Etat n’auraient pas été régulières au regard de l’article L. 62 du code du domaine de l’Etat, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ni entaché sa décision de contradiction de motifs ;

Considérant enfin que si le schéma directeur de la région Ile-de-France prévoit en dehors des sites urbains constitués. l’absence de toute nouvelle urbanisation à moins de 50 mètres de la lisière des bois et forêts de plus de 100 hectares, les dispositions de ce schéma ne sauraient avoir légalement pour effet d’imposer aux plans d’occupation des sols une stricte conformité à leur égard ; que, par suite, en jugeant que le classement en zone UF par le plan d’occupation des sols de la ville de Fontainebleau d’une bande de terrain incluant la parcelle servant de terrain d’assiette à la construction litigieuse n’était pas compatible avec les orientations du schéma directeur de la région Ile-de-France, compte tenu de la faible superficie des terrains concernés rapportée à celle des terrains jouxtant la lisière de la forêt de Fontainebleau sur lé territoire de ladite commune, la cour n’a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’ASSOCIATION SEINE-ET-MARNAISE POUR LA SAUVEGARDE DE LA NATURE n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’Institut européen d’administration des affaires et la commune de Fontainebleau, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, soient condamnés à payer à l’ASSOCIATION SEINE-ET-MARNAISE POUR LA SAUVEGARDE DE LA NATURE la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application desdites dispositions et de condamner l’ASSOCIATION SEINE-ET-MARNAISE POUR LA SAUVEGARDE DE LA NATURE à payer à l’Institut européen d’administration des affaires et à la commune de Fontainebleau la somme que ceux-ci demandent au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l’ASSOCIATION SEINE-ET-MARNAISE POUR LA SAUVEGARDE DE LA NATURE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l’Institut européen d’administration des affaires et de la ville de Fontainebleau tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l’ASSOCIATION SEINE-ET-MARNAISE DE SAUVEGARDE DE LA NATURE, à l’Institut européen d’administration des affaires, à la ville de Fontainebleau, au ministre de l’écologie et du développement durable et au ministre de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

 


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