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Conseil d’Etat, 29 juillet 2002, n° 221825, M. Mauro M.

Si la directive du 21 décembre 1988 institue un système de reconnaissance mutuelle des diplômes à des fins professionnelles, elle n’a pas pour objet la reconnaissance académique des diplômes et n’implique pas que les personnes qui bénéficient d’une reconnaissance de leur capacité professionnelle soient considérées comme titulaires du diplôme national dont elles ont obtenu l’équivalence.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 221825

M. M.

M. Thiellay, Rapporteur
M. Lamy, Commissaire du gouvernement

Séance du 3 juillet 2002
Lecture du 29 juillet 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 6ème et 4ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 6ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 7 juin et le 9 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Mauro M. ; M. M. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision du 24 mars 2000 par laquelle la commission nationale d’inscription des commissaires aux comptes a rejeté sa demande d’inscription sur la liste des commissaires aux comptes près la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;

2°) d’enjoindre à la commission nationale d’inscription des commissaires aux comptes de l’inscrire sur cette liste ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu la directive n° 89/48/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 ;

Vu l’ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 ;

Vu décret n° 69-810 du 12 août 1969 modifié par le décret n° 93-9 du 4 janvier 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thiellay, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. M. ,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. M., ressortissant italien établi en France, a été inscrit à l’ordre des experts-comptables après avoir obtenu l’équivalence de son titre de "dottore commercialista" ; qu’ayant également sollicité l’équivalence de son titre de "revisore dei conti" pour exercer en France en tant que commissaire aux comptes, le requérant a été invité par le garde des sceaux, ministre de la justice, à se présenter à une épreuve d’aptitude destinée à vérifier sa connaissance du contrôle légal en France et de certaines matières juridiques ; qu’il ne s’est toutefois pas présenté à cette épreuve, estimant qu’il pouvait, une fois inscrit au tableau de l’ordre des experts-comptables, accéder directement aux fonctions de commissaire aux comptes, et a sollicité son inscription sur la liste des commissaires aux comptes auprès de la commission régionale des commissaires aux comptes du ressort de la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; que, par la décision attaquée, la commission nationale d’inscription des commissaires aux comptes a confirmé le refus opposé par la commission régionale ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

Considérant que si M. M. soutient que la décision de la commission est irrégulière au motif que l’un de ses membres, M. Delmas, inspecteur général des finances honoraire, n’avait pas qualité pour y siéger, il ressort des pièces du dossier que ce dernier a été nommé membre de la commission en qualité de représentant désigné par le ministre chargé de l’économie, conformément aux dispositions de l’article 16 du décret du 12 août 1969, par un arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, du 31 janvier 1974 ; que la circonstance qu’il a depuis fait valoir ses droits à la retraite est sans influence sur la validité de cet arrêté, dès lors que le décret du 12 août 1969 n’exige pas que le membre de la commission qui représente le ministre chargé de l’économie soit un fonctionnaire en activité, que le moyen tiré de ce que la décision attaquée a été rendue par une commission irrégulièrement composée doit donc être rejeté ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu’aux termes de l’article 3 du décret du 12 août 1969 relatif à l’organisation de la profession et au statut professionnel des commissaires aux comptes de sociétés modifié par le décret du 4 janvier 1993 : "Ne peuvent être inscrites sur la liste des commissaires aux comptes que les personnes de nationalité française, les ressortissants d’un Etat membre des communautés européennes autre que la France ou les ressortissants d’un autre Etat étranger lorsque celui-ci admet les nationaux français à exercer le contrôle légal des comptes./ Ces personnes doivent présenter des garanties de moralité suffisantes et, sous réserve des dispositions des articles 5, 5-1 et 5-2 ci-après, avoir subi avec succès les épreuves de l’examen d’aptitude aux fonctions de commissaire aux comptes, après l’accomplissement d’un stage professionnel jugé satisfaisant./ Peuvent également être inscrits sur la liste des commissaires aux comptes les titulaires du diplôme d’expertise comptable, du brevet d’expert-comptable ou du diplôme d’expert-comptable. Les deux tiers au moins du stage prévu par l’article 1er du décret n° 81-536 du 12 mai 1981 relatif au diplôme d’expertise comptable doivent avoir été accomplis soit chez une personne inscrite sur la liste des commissaires aux comptes (.. . ), soit, sous réserve d’une autorisation donnée au stagiaire, dans des conditions fixées par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé du budget, chez une personne agréée par un Etat membre des communautés européennes pour exercer le contrôle légal des comptes" ;

Considérant que l’article 5-1 du même décret dispose que : "Peuvent être inscrites sur la liste des commissaires aux comptes, sans remplir les conditions de stage, d’examen professionnel ou de diplôme prévues à l’article 3, les personnes de nationalité française et les ressortissants d’un Etat membre des communautés européennes autre que la France, qui ont suivi avec succès un cycle d’études d’une durée minimale de trois ans ou d’une durée équivalente à temps partiel dans une université ou un établissement d’enseignement supérieur ou dans un établissement de même niveau de formation, ainsi que la formation professionnelle requise en plus de ce cycle d’études, et qui justifient de diplômes, certificats ou autres titres permettant l’exercice de la profession dans un Etat membre des communautés européennes (...) / Lorsque la formation porte sur des matières substantiellement différentes de celles qui figurent au programme de l’examen d’aptitude et du diplôme d’expertise comptable mentionnés à l’article 3, l’intéressé doit subir une épreuve d’aptitude dont le programme et les modalités sont fixés par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice (...). / Les candidats admis à se présenter à l’épreuve d’aptitude sont désignés par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice. Sa décision précise les matières sur lesquelles les candidats doivent être interrogés compte tenu de leur formation initiale (...)" ;

Considérant que l’article 26 de l’ordonnance du 19 septembre 1945 relative à l’ordre des experts-comptables fixe les conditions dans lesquelles un ressortissant d’un Etat membre de la Communauté européenne peut, s’il n’est pas titulaire du diplôme français d’expertise comptable, être inscrit au tableau de l’ordre ; qu’il ne ressort pas des dispositions de cet article qu’une personne ayant ainsi obtenu son inscription à l’ordre des experts-comptables doive être considérée comme titulaire d’un des diplômes français permettant l’exercice de la profession d’expert-comptable ; que cette personne ne peut, dès lors, se prévaloir des dispositions de l’article’)’, alinéa 3, du décret du 12 août 1969, qui permettent, dans certaines conditions, aux titulaires du diplôme d’expertise comptable, du brevet d’expert-comptable ou du diplôme d’expert-comptable de devenir commissaires aux comptes ; que, par suite, la commission nationale d’inscription des commissaires aux comptes n’a pas commis d’erreur de droit en rejetant la demande de M. M. au motif qu’il n’était pas titulaire de l’un de ces diplômes ;

Considérant que le requérant soutient, par la voie de l’exception, que les dispositions de l’article 3 du décret du 12 août 1969 sont incompatibles avec les stipulations du traité instituant la Communauté européenne relatives à la liberté d’établissement et avec les objectifs de la directive du 21 décembre 1988 susvisée relative à un système général de reconnaissance des diplômes d’enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d’une durée minimale de trois ans, dès lors que les ressortissants communautaires inscrits à l’ordre des experts-comptables sans être titulaires d’un des diplômes français permettant l’exercice de cette profession ne peuvent accéder à la profession de commissaire aux comptes dans les mêmes conditions que les titulaires d’un de ces diplômes ;

Considérant que, si la directive du 21 décembre 1988 institue un système de reconnaissance mutuelle des diplômes à des fins professionnelles, elle n’a pas pour objet la reconnaissance académique des diplômes et n’implique pas que les personnes qui bénéficient d’une reconnaissance de leur capacité professionnelle soient considérées comme titulaires du diplôme national dont elles ont obtenu l’équivalence ; qu’ainsi le moyen tiré de ce que le décret du 12 août 1969, qui réglemente l’accès aux fonctions de commissaire aux comptes des personnes ayant reçu une formation dans un autre pays de l’Union européenne que la France dans des conditions conformes aux dispositions de la directive du 21 décembre 1988, priverait d’effet utile l’équivalence des diplômes prévue par ce texte et méconnaîtrait la liberté d’établissement en tant qu’il offrirait aux seuls titulaires de l’un des diplômes français d’expertise comptable un accès direct aux fonctions de commissaire aux comptes, doit être rejeté ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. M. n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision qu’il attaque ;

Sur les conclusions tendant à ce que la commission nationale inscrive M. M. sur la liste des commissaires aux comptes :

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions de M. M. tendant à l’annulation de la décision de la commission nationale d’inscription des commissaires aux comptes en date du 24 mars 2000, n’appelle aucune mesure d’exécution ; que, par suite, les conclusions susanalysées ne peuvent qu’être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. M. est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Mauro M., à la commission nationale d’inscription des commissaires aux comptes et au garde des sceaux, ministre de la justice.

 


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