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Conseil d’Etat, 5 septembre 2001, req n° 225473, M. GUIAVARC’H

Il résulte des dispositions législatives précitées que le législateur a expressément entendu donner aux établissements publics de l’enseignement supérieur et aux établissements publics scientifiques et technologiques la possibilité d’assurer des prestations de service en vue de valoriser les résultats de la recherche, sans leur donner aucun droit exclusif, que ni le principe d’égalité de traitement, ni les articles 81 CE, 82 CE et 87 CE l’articles 85, 86 et 92 anciens) n’interdisent à une personne publique, en raison de sa nature, d’assurer des prestations de services sur un marché

CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux


225473
M. GUIAVARC’H

Lecture du 5 septembre 2001



REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 4ème et 6ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 4ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 28 septembre 2000 présentée par M. Gweltaz GUIAVARC’H, demeurant 19, boulevard de Courcelles à Paris (75008) ; M. GUIAVARC’H demande au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2000-893 du 13 septembre 2000 relatif aux conditions dans lesquelles les établissements publics à caractère scientifique et technologique et les établissements publics d’enseignement supérieur peuvent fournir des moyens de fonctionnement à des entreprises ou à des personnes physiques ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité du 27 mars 1957, modifié et notamment ses articles 81, 82 et 87 ;

Vu le code de l’éducation ;

Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

Vu la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 modifiée ;

Vu la loi n° 99-587 du 12 juillet 1999 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :


- le rapport de Mme Picard, Maître des Requêtes ;


- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête

Considérrant qu’aux termes de l’article 19-1 de la loi du 15 juillet 1982, ajouté par le 4° de l’article 1er de la loi n° 99-587 du 12 juillet 1999 sur l’innovation et la recherche : "Dans le cadre des objectifs définis à l’article 14, les établissements publics à caractère scientifique et technologique peuvent assurer par convention des prestations de services, gérer des contrats de recherche, exploiter des brevets et licences et commercialiser les produits de leurs activités" ; qu’aux termes de l’article 6 de la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l’enseignement supérieur, complété par l’article 2 de la loi précitée du 12 juillet 1999 et codifié à l’article L. 123-5 du code de l’éducation : "Les conditions dans lesquelles les établissements qui participent à ce service public assurent, par voie de convention, des prestations de services, exploitent des brevets et licences et commercialisent les produits de leurs activités sont fixées par leurs statuts", que, dans ces deux cas, la loi du 12 juillet 1999 a prévu qu’en vue de la valorisation des résultats de la recherche dans leurs domaines d’activité, ces établissements publics peuvent, par convention et pour une durée limitée avec information de l’instance scientifique compétente, fournir à des entreprises ou à des personnes physiques des moyens de fonctionnement, notamment en mettant à leur disposition des locaux, des équipements et des matériels, dans des conditions fixées par décret ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret du 13 septembre 2000 pris pour l’application des dispositions législatives précitées : "En vue de la valorisation des résultats de la recherche dans leurs domaines d’activité, les établissements publics à caractère scientifique et technologique, les établissements publics d’enseignement supérieur et les centres hospitaliers universitaires ainsi que les filiales de ces établissements ou les sociétés ou groupements auxquels ils participent lorsque leurs statuts les y autorisent peuvent fournir des prestations de services à des créateurs d’entreprises ou à de jeunes entreprises. / Ces prestations de services revêtent les formes suivantes : - la mise à disposition de locaux, de matériels et d’équipements ; - la prise en charge ou la réalisation d’études de développement, de faisabilité technique, industrielle, commerciale, juridique et financière ; - et toute autre prestation de services nécessaire à la création et au développement de l’entreprise" ;

Sur les moyens tirés de la violation du droit communautaire :

Considérant qu’il résulte des dispositions législatives précitées que le législateur a expressément entendu donner aux établissements publics de l’enseignement supérieur et aux établissements publics scientifiques et technologiques la possibilité d’assurer des prestations de service en vue de valoriser les résultats de la recherche, sans leur donner aucun droit exclusif, que ni le principe d’égalité de traitement, ni les articles 81 CE, 82 CE et 87 CE l’articles 85, 86 et 92 anciens) n’interdisent à une personne publique, en raison de sa nature, d’assurer des prestations de services sur un marché ; qu’il résulte des dispositions de l’article 1654 du code général des impôts que les établissements publics administratifs, lorsqu’ils exercent une activité susceptible d’entrer en concurrence avec celle d’entreprises privées sont tenus à des obligations fiscales comparables à celles auxquelles sont soumises ces entreprises privées ; que si des différences existent entre les conditions de fonctionnement des établissements publics administratifs et des opérateurs privés sur un marché, notamment en ce qui concerne le droit du travail et de la sécurité sociale, celles-ci n’ont ni pour objet, ni pour effet de placer les établissements publics administratifs dans une situation nécessairement plus avantageuse que celle dans laquelle se trouvent les autres opérateurs privés et qui leur permettrait de fausser le jeu de la concurrence sur un marché ; que, par suite, les dispositions législatives précitées, en ce qu’elles prévoient que les établissements publics en cause peuvent, en vue de valoriser les résultats de leurs travaux de recherche, fournir ou prendre en charge des prestations de service au bénéfice de créateurs d’entreprise ou de jeunes entreprises, ne sont pas incompatibles avec les stipulations des articles précités du traité du 25 mars 1957 ;

Considérant que si M. GUIAVARCH soutient que les dispositions permettant aux établissements publics concernés de fournir des prestations de services méconnaissent les stipulations de (article 87 CE l’article 92 ancien), ces règles prohibant les aides d’Etat ne créent pas pour les particuliers de droits dont ceux-ci puissent se prévaloir devant une juridiction nationale ;

Considérant que les dispositions législatives précitées n’étant pas incompatibles avec les stipulations des articles 81 CE et 82 CE (articles 85 et 86 anciens), le requérant n’est pas fondé à soutenir que les auteurs du décret attaqué ne pouvaient exercer la compétence réglementaire qu’ils tenaient des articles 1er et 2 de la loi du 12 juillet 1999 pour fixer leurs conditions d’application et définir en particulier les prestations de services qui peuvent faire l’objet de conventions entre établissements publics et entreprises privées, les modalités de leur évaluation et celles de la rémunération de ces établissements ;

Sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu’en précisant le contenu des conventions dans le cadre desquelles la fourniture de prestations de services serait assurée par les établissements publics d’enseignement et de recherche en vue de la valorisation des résultats de leurs recherches, le décret attaqué n’a pas porté au principe de la liberté du commerce et de l’industrie d’autres atteintes que celles qui sont prévues par la loi du 12 juillet 1999 elle-même ;

Considérant que les articles 1er et 2 de la loi du 12 juillet 1999 renvoient au pouvoir réglementaire le soin de définir les prestations de services qui peuvent faire l’objet de conventions conclues par les établissements publics concernés avec des entreprises ; que les prestations juridiques sont des prestations de services au sens de ces mêmes dispositions ; qu’ainsi, l’auteur du décret attaqué n’a pas méconnu ces dispositions en prévoyant que les établissements publics entrant dans son champ d’application pourraient assurer ou prendre en charge, dans les conditions qu’il détermine, des études de faisabilité juridique ou d’autres prestations juridiques nécessaires à la création et au développement des entreprises concernées ;

Considérant que l’article 61 de la loi du 31 décembre 1971 prévoit que les organismes chargés d’une mission de service public peuvent, dans l’exercice de cette mission, donner des consultations juridiques ; qu’en prévoyant que les établissements publics d’enseignement supérieur, les centres hospitaliers universitaires et les établissements publics à caractère scientifique et technologique peuvent, en vue de la valorisation des résultats de la recherche dans leurs domaines d’activité qui relève des missions qui leur incombent, fournir des études de faisabilité juridique ou d’autres prestations juridiques nécessaires à la création et au développement de certaines entreprises, le décret attaqué n’a pas méconnu les dispositions de la loi du 31 décembre 1971 ;

Considérant qu’en vertu de l’article 19 de la loi du 15 juillet 1982, les établissements publics à caractère scientifique et technologique peuvent être autorisés à prendre des participations, à constituer des filiales et à participer à des groupements ; que l’article L. 711-1 du code de l’éducation prévoit que les établissements d’enseignement supérieur peuvent créer des services d’activités industrielles et commerciales et, dans la limite des ressources dégagées par ces activités, prendre des participations, participer à des groupements et créer des filiales ; qu’en prévoyant que les activités mentionnées à l’article 19-1 de la loi du 15 juillet 1982 ainsi qu’à l’article L. 123-5 du code de l’éducation, issus de la loi du 12 juillet 1999, peuvent être gérées par des services d’activités industrielles et commerciales et en soumettant la constitution des filiales, sociétés ou groupements qui peuvent en être le support aux conditions dans lesquelles ces établissements publics peuvent assurer des prestations de service en vue de la valorisation des résultats de la recherche, l’auteur du décret attaqué n’a pas excédé les limites de l’habilitation que lui ont conféré les articles 1er et 2 de la loi du 12 juillet 1999 ;

Considérant que l’article 19-1 de la loi du 15 juillet 1982 et l’article L. 123-5 du code de l’éducation renvoient à un décret le soin de définir les prestations de service qui peuvent faire l’objet de conventions en vue de la valorisation des résultats de la recherche, les modalités de leur évaluation et celles de la rémunération des établissements publics concernés ; qu’en définissant les formes que peuvent prendre ces prestations de service et en prévoyant que les conventions entre les établissements publics et les entreprises bénéficiaires définissent la nature, le montant, les modalités, notamment financières, de la fourniture de ces prestations et la durée pendant laquelle elles peuvent être assurées, l’auteur du décreT attaqué n’a pas, contrairement à ce que soutient le requérant, méconnu sa propre compétence ; que les critères retenus pour définir les entreprises bénéficiaires ne sont pas entachés d’erreur manifeste d’appréciation ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que M. GUIAVARCH n’est pas fondé à demander l’annulation du décret n° 2000-893 du 13 septembre 2000 ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. GUIAVARC’H est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Gweltaz GUIAVARC’H, au Premier ministre, au ministre de la recherche, au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, au ministre de l’éducation nationale, au ministre de l’emploi et de la solidarité, au ministre de l’équipement, des transports et du logement et au ministre de l’agriculture et de la pêche.


 


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