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Cour administrative d’appel de Paris, 11 octobre 2001, n° 99PA02986, Melle Le S.

La Fédération française de karaté et arts martiaux affinitaires (FFKAMA) constitue un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public au sens de la l’article 2 de la loi du 17 juillet 1978. Les documents sollicités, qui se rattachent directement aux conditions dans lesquelles cet organisme exerce, par l’intermédiaire notamment de ses dirigeants désignés conformément à ses statuts, les missions de service public qui lui sont confiées en vertu des dispositions de la loi du 16 juillet 1984, présentent par leur nature et leur objet le caractère de documents administratifs.

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE PARIS

N° 99PA02986

Melle le S.

Mme CAMGUILHEM, Président

M. DUPOUY, Rapporteur

M. BOSSUROY, Commissaire du Gouvernement

Séance du 27 septembre 2001

Lecture du 11 octobre 2001

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

La Cour administrative d’appel de Paris (5ème chambre),

VU, enregistrée au greffe de la cour le 1er septembre 1999, la requête présentée par Melle Jacqueline le S. ; Melle le S. demande à la cour ;

1°) d’annuler le jugement du 22 juin 1999 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre la décision implicite de la Fédération française de karaté et arts martiaux affinitaires (FFKAMA) refusant de lui communiquer des documents relatifs aux assemblées générales des 24 novembre 1996 et 27 juin 1998 ;

2°) d’annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) de condamner la Fédération française de karaté et arts martiaux affinitaires à lui verser une somme de 2.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens

Elle soutient que les documents demandés, relatifs au déroulement de deux assemblées générales électives, sont directement liés à l’exécution de la mission de service public de la Fédération ; que la commission d’accès aux documents administratifs a émis un avis favorable à leur communication ; que ces documents ne sont pas mentionnés dans l’arrêté du 8 août 1996 fixant la liste des documents non communicables émanant des services ou organismes placés sous l’autorité ou le contrôle du ministère de la jeunesse et des sports ; que les documents en question font partie d’un dossier qui la concerne dès lors qu’elle a fait acte de candidature aux élections fédérales ;

VU le jugement attaqué ;

VU, enregistré le 18 décembre 2000, le mémoire en défense présenté pour la Fédération française de karaté et arts martiaux affinitaires par la SCP Pascal TIFFREAU, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ; la Fédération conclut au rejet de la requête et demande en outre la condamnation de Melle le S. au paiement d’une somme de 12.000 F au titre des frais irrépétibles ; elle soutient que c’est à bon droit que le tribunal administratif a rejeté les moyens de légalité externe relatifs à la motivation des décisions implicites de rejet attaqués ; que c’est également à bon droit que le tribunal a rejeté les moyens de légalité interne relatifs à la communicabilité des documents litigieux, lesquels intéressent le fonctionnement interne d’une personne morale de droit privé ; que pour que les documents d’une fédération sportive soient communicables, il ne suffit pas de constater que la fédération poursuit une mission de service public, il faut encore que ces documents concernent une activité relevant de cette mission, ce qui n’est pas le cas des documents réclamés ; que Melle le S., qui demande systématiquement communication d’un nombre incalculable de documents dans l’intention de nuire à la Fédération, commet un abus manifeste dans l’exercice de son droit d’ester en justice ;

VU, enregistrés les 26 janvier et 25 juin 2001, les mémoires en réplique présentés par Melle le S. ; Melle le S. conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

VU les autres pièces du dossier ;

VU la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

VU la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 ;

VU le décret n° 85-236 du 13 février 1985 ;

VU le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 27 septembre 2001 :

- le rapport de M. DUPOUY, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BOSSUROY, commissaire du Gouvernement ;

Sur la légalité du refus de communication :

Considérant qu’aux termes de l’article 2 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 dans sa rédaction alors applicable : "Sous réserve des dispositions de l’article 6, les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande, qu’ils émanent des administrations de l’Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils de droit privé, chargé de la gestion d’un service public" ; et, qu’aux termes de l’article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 dans sa rédaction alors applicable : " A condition d’avoir adopté des statuts conformes à des statuts types définis par décret en Conseil d’Etat, les fédérations sportives agréées par le ministre chargé des sports participent à l’exécution d’une mission de service public. A ce titre, elles sont chargées notamment de promouvoir l’éducation par les activités physiques et sportives, de développer et d’organiser la pratique des activités physiques et sportives" ;

Considérant que, par lettre du 2 juillet 1998, Melle le S. a demandé à la Fédération française de karaté et arts martiaux affinitaires (FFKAMA) communication de plusieurs documents relatifs aux élections du comité directeur de la Fédération organisées lors des assemblées générales des 24 novembre 1996 et 27 juin 1998 ; que, contrairement à ce que soutient la FFKAMA, laquelle constitue un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public au sens de la l’article 2 de la loi du 17 juillet 1978, les documents sollicités, qui se rattachent directement aux conditions dans lesquelles cet organisme exerce, par l’intermédiaire notamment de ses dirigeants désignés conformément à ses statuts, les missions de service public qui lui sont confiées en vertu des dispositions de la loi du 16 juillet 1984, présentent par leur nature et leur objet le caractère de documents administratifs ; qu’en se bornant à faire état du grand nombre de documents dont Melle le S. demande systématiquement communication, la FFKAMA n’établit pas que la demande de communication litigieuse présentait, comme elle le soutient, un caractère abusif ; que, dès lors, c’est en méconnaissance des dispositions de la loi du 17 juillet 1978 que la Fédération a refusé de communiquer à la requérante des documents qu’elle avait sollicités ; que, par suite, Melle le S. est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre le refus implicite de la FFKAMA de lui communiquer lesdits documents malgré l’avis favorable émis par la commission d’accès aux documents administratifs ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative ;

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 font obstacle à ce que Melle le S., qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à la FFKAMA, la somme de 12.000 F que demande la Fédération au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’en application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce de condamner, la FFKAMA à verser à Melle le S., une somme de 500 F au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 9812376/6 et 9822412/6 du tribunal administratif de Paris en date du 22 juin 1999 et la décision de la Fédération française de karaté et arts martiaux affinitaires (FFKAMA) refusant de communiquer à Melle le S. les documents relatifs aux élections fédérales des 24 novembre 1996 et 27 juin 1998 sont annulés.

Article 2 : La Fédération française de karaté et arts martiaux affinitaires (FFKAMA) versera à Melle le S. une somme de 500 F au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Melle le S., à la Fédération française de karaté et arts martiaux affinitaires (FFKAMA) et à la ministre de la jeunesse et des sports.

 


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