format pour impression
(imprimer)

DANS LA MEME RUBRIQUE :
Conseil d’Etat, 19 février 2001, n° 210877, Aouichi
Conseil d’Etat, 19 mai 2008, n° 301813, Association SOS Racisme, Ligue des droits de l’homme et autres
Conseil d’Etat, 30 juillet 2003, n° 245346, Ministre de l’intérieur c/ M. Brahim B.
Conseil d’Etat, Avis, 25 juillet 2008, n° 315529, Natacha L.
Cour administrative d’appel de Nantes, 21 février 2003, n° 01NT01589, M. Ngeba L.
Conseil d’Etat, 20 février 2008, n° 289850, Charles G.
Conseil d’Etat, 30 juillet 2003, n° 245575, Préfet de la Seine-Saint-Denis c/ M. Blaise T.
Conseil d’Etat, 7 mars 2008, n° 289419, Ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire c/ Abderhamane M.
Conseil d’Etat, 14 février 2001, n° 206914, Ministre de l’intérieur c/ Belmehdi
Cour administrative d’appel de Lyon, 13 février 2003, n° 01LY02533, M. Alessandro F.




Conseil d’Etat, 17 octobre 2003, n° 247865, Préfet du Vaucluse c/ M. Pavol K.

Dès lors, eu égard à ces circonstances particulières, l’arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. K., qui ne tient pas compte des conditions du séjour de ce dernier pendant le temps où il servait dans la légion étrangère, doit être regardé comme entaché d’une erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l’intéressé.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 247865

PREFET DE VAUCLUSE
c/ M. K.

M. J. Boucher
Rapporteur

M. Le Chatelier
Commissaire du gouvernement

Séance du 24 septembre 2003
Lecture du 17 octobre 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 5ème sous-section réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par le PREFET DE VAUCLUSE ; le PREFET DE VAUCLUSE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler le jugement du 18 mai 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé son arrêté du 16 mai 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. Pavol K. et fixant la Slovaquie comme pays à destination duquel ce dernier doit être reconduit ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. K. devant le tribunal administratif de Marseille ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. J. Boucher, Auditeur,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes du I de l’article 22 de l’ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l’Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu’un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l’étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu’il ne soit titulaire d’un titre de séjour en cours de validité" ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. K., de nationalité slovaque, est entré irrégulièrement en France en 1995 et s’est maintenu sur le territoire national sans être titulaire d’un titre de séjour en cours de validité ; qu’il se trouvait ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l’ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d’un étranger ;

Considérant que si M. K., né en 1977, fait valoir que, postérieurement à la fin, en septembre 1999, d’un engagement de plus de quatre ans dans la légion étrangère, il a noué des relations avec une ressortissante française avec laquelle il avait, à la date de l’arrêté du 16 mai 2002 ordonnant sa reconduite à la frontière, un projet de mariage, il ressort des pièces du dossier, que compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce, notamment du caractère récent de la vie commune, et eu égard aux effets d’une mesure de reconduite à la frontière, l’arrêté attaqué n’a pas porté au droit de l’intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n’a, par suite, pas méconnu les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que c’est, dès lors, à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Marseille s’est fondé sur ce que l’arrêté du PREFET DE VAUCLUSE du 16 mai 2002 avait méconnu ces stipulations pour annuler cet arrêté ;

Considérant, toutefois, qu’il appartient au Conseil d’Etat, saisi de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par M. K. devant le tribunal administratif de Marseille ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. K. a servi dans la légion étrangère plus de quatre ans au cours desquels il a notamment participé à des opérations militaires impliquant des unités combattantes, à Bangui et à Dubrovnik ; qu’il est demeuré sur le territoire français après la fin de son contrat, qui a été résilié le 1er septembre 1999 pour des motifs liés aux suites d’un accident d’automobile ; qu’il a poursuivi son intégration en France où, ainsi qu’il a été dit, il a noué des relations avec une ressortissante française, qu’il a d’ailleurs épousée le 16 octobre 2002 ; que, dès lors, eu égard à ces circonstances particulières, l’arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. K., qui ne tient pas compte des conditions du séjour de ce dernier pendant le temps où il servait dans la légion étrangère, doit être regardé comme entaché d’une erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l’intéressé ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le PREFET DE VAUCLUSE n’est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé son arrêté du 16 mai 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. K. ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l’Etat à verser à M. K. la somme de 1 000 euros qu’il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du PREFET DE VAUCLUSE est rejetée.

Article 2 : L’Etat est condamné à verser à M. K. la somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE VAUCLUSE, à M. Pavol K. et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

 


©opyright - 1998 - contact - Rajf.org - Revue de l'Actualité Juridique Française - L'auteur du site
Suivre la vie du site