CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 238817
M. H.
M. Struillou
Rapporteur
M. Schwartz
Commissaire du gouvernement
Séance du 15 octobre 2003
Lecture du 5 novembre 2003
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 4ème et 6ème sous-section réunies)
Sur le rapport de la 4ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 8 octobre 2001, au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. James Georges H. ; M. H. demande que le Conseil d’Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir la décision du 29 mai 2001 par laquelle la commission nationale d’équipement commercial a accordé à la société Chaumondis l’autorisation de porter la surface de vente de son magasin, exploité sous l’enseigne "Leclerc" et implanté sur la commune de Chaumont (Haute-Marne) de 2 150 à 5 950 m² et de créer un magasin d’articles de sport de 1 500 m² à l’enseigne "Intersport" ;
2°) condamne l’Etat et la société Chaumondis à lui verser la somme de 2 287 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
....................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 modifiée ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Struillou, Maître des Requêtes,
les observations de Me Hemery, avocat de M. H.,
les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par une décision du 29 mai 2001 la commission nationale d’équipement commercial a accordé à la société Chaumondis l’autorisation d’étendre de 2 150 m2 la surface de vente de son magasin, exploité sous l’enseigne "Leclerc" et implanté sur la commune de Chaumont (Haute-Marne), et de créer un magasin d’articles de sport de 1 500 m² à l’enseigne "Intersport" ; que M. H. demande l’annulation pour excès de pouvoir de cette décision ;
Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 12 avril 2000 : "Sont considérés comme autorités administratives au sens de la présente loi les administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d’un service public administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d’un service public administratif" ; qu’aux termes du second alinéa de l’article 4 de la même loi : "Toute décision prise par l’une des autorités administratives mentionnées à l’article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci" ; que la commission nationale d’équipement commercial, qui est une autorité administrative au sens de l’article 1er de la loi du 12 avril 2000, est en conséquence soumise aux prescriptions de l’article 4 de cette loi ; que, s’agissant d’une autorité de caractère collégial, il est satisfait aux exigences découlant de celles-ci dès lors que les décisions que prend la commission portent la signature de son président, accompagnée des mentions, en caractères lisibles, prévues par cet article ; qu’il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée répond à ces exigences ; que, par suite, le moyen tiré par le requérant de leur méconnaissance doit être écarté ;
Considérant que, pour l’application des dispositions combinées de l’article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 720-1 à L. 720-3 du code de commerce, il appartient aux commissions d’équipement commercial, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, d’apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l’équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l’affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par des effets positifs que le projet peut présenter au regard notamment de l’emploi, de l’aménagement du territoire, de la concurrence, de la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, de la satisfaction des besoins des consommateurs ;
Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qu’affirme le requérant, la commission nationale a procédé à un examen séparé des effets du projet sur les différents secteurs d’activité économique susceptibles d’être affectés par celui-ci, en distinguant, d’une part, le secteur d’activité des articles de sport, concerné par la création du magasin à l’enseigne "Intersport" et, d’autre part, les autres secteurs d’activité et, notamment, celui des produits commerciaux culturels et de loisirs, concerné par l’extension de la surface de vente du rayon "culture-loisirs" de l’établissement "Leclerc" portée de 260 à 1 000 m² ; qu’ainsi elle n’a pas méconnu les dispositions rappelées ci-dessus ;
Considérant, en second lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que la densité des équipements commerciaux non spécialisés d’une surface de vente de plus de 300 m² est inférieure, dans la zone de chalandise en cause, aux densités moyenne départementale et nationale ; qu’il n’existe dans cette zone qu’un établissement commercial spécialisé dans les secteurs d’activité des loisirs et de la culture dont la surface de vente dépasse 300 m² ; que, dans ces conditions, l’extension de la surface du magasin, susceptible de réduire l’évasion commerciale particulièrement importante vers les pôles commerciaux de Dijon et de Troyes, ne saurait être regardée comme affectant l’équilibre entre les différentes formes de commerce ; que, dès lors, la commission nationale n’a pas méconnu les objectifs fixés par les dispositions législatives rappelées ci-dessus en accordant l’autorisation demandée ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. H. n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision du 29 mai 2001 de la commission nationale d’équipement commercial ;
Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’Etat et la société Chaumondis, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, soient condamnés à verser à M. H. la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner M. H. à verser à la société Chaumondis la somme qu’elle demande au titre de ces mêmes frais ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. H. est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Chaumondis tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. James Georges H., à la société Chaumondis, à la commission nationale d’équipement commercial et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.