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Conseil d’Etat, référé, 22 août 2003, n° 259583, M. Marc C.

Le refus de renouvellement ou de délivrance d’un passeport à un citoyen français porte atteinte à la liberté d’aller et venir qui constitue une liberté fondamentale au sens des dispositions précitées de l’article L. 521-2 du code de justice administrative.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 259583

M. C.

Ordonnance du 22 août 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE JUGE DES REFERES

Vu la requête, enregistrée le 19 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Marc C. ; M. C. demande au juge des référés du Conseil d’Etat :

1°) d’enjoindre à l’ambassadrice de France aux Philippines, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, de faire droit sans délai à sa demande de renouvellement anticipé de passeport ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. C. soutient que la condition d’urgence est remplie dès lors que son passeport vient à expiration le 20 mai 2004, que les fonctions qu’il exerce au sein de la Banque asiatique de développement l’obligent à être en possession d’un passeport d’une validité minimale de six à douze mois et qu’il ne pourra effectuer sa prochaine mission en Ouzbékistan et au Kazakhstan, prévue du 10 au 25 septembre 2003 qu’à condition d’avoir assorti, avant le 25 août 2003, sa demande de visa d’un passeport valable un an ; que le refus opposé le 5 août 2003 à sa demande de renouvellement anticipé de son passeport porte à sa liberté d’aller et de venir une atteinte grave ; que cette atteinte est manifestement illégale dès lors qu’à sa connaissance, et contrairement au motif avancé par l’ambassadrice de France aux Philippines, il ne fait l’objet d’aucun mandat d’arrêt ; à titre subsidiaire, qu’un mandat d’arrêt délivré à son encontre ne serait pas de nature à justifier le refus de l’administration de renouveler son passeport ; qu’en tout état de cause, l’existence d’un mandat d’arrêt ne pourrait être prise en compte pour justifier le refus de renouvellement de son passeport que si ce mandat d’arrêt lui avait été notifié, ce qui n’est pas le cas ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 août 2003, présenté par le ministre des affaires étrangères qui tend au rejet de la requête ; le ministre des affaires étrangères soutient que la condition d’urgence n’est pas remplie dès lors que le passeport de M. C. ne vient à expiration que le 20 mai 2004, que les autorités philippines exigent, pour l’entrée sur leur territoire, un passeport ayant une durée de validité d’au moins six mois, ce qui est le cas du passeport de M. C. jusqu’au 20 novembre 2003 et que ce dernier ne justifie pas de l’obligation qui lui serait faite, par les autorités des Etats d’Asie centrale dans lesquels il doit effectuer une mission en septembre 2003, de disposer d’un passeport ayant une durée de validité supérieure à celle de son passeport actuel ; que le refus opposé à la demande de M. C. d’un renouvellement anticipé de son passeport n’a pas porté à sa liberté d’aller et venir une atteinte grave et manifestement illégale dès lors qu’il fait l’objet d’un mandat d’arrêt international dont le premier juge d’instruction près le tribunal de grande instance de Paris a confirmé le caractère exécutoire en précisant qu’il serait inopportun de délivrer à l’intéressé un nouveau passeport, l’existence d’un mandat d’arrêt étant au demeurant un des cas de refus de délivrance d’un passeport selon les instructions du ministre de l’intérieur ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 août 2003, présenté pour M. C. qui tend aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; M. C. soutient en outre que la condition d’urgence est remplie puisque les autorités des républiques d’Asie centrale et notamment celles d’Ouzbékistan et du Kazakhstan exigent des personnels de la Banque asiatique de développement qui souhaitent effectuer une mission sur leur territoire qu’ils soient en possession d’un visa à entrées multiples d’une durée d’un an et que la durée de validité de leur passeport soit supérieure d’au moins six mois à la durée de validité de leur visa à entrées multiples ; que l’existence d’un mandat d’arrêt n’est aucunement avérée ; que les instructions du ministre de l’intérieur auxquelles fait référence le ministre des affaires étrangères ont seulement trait aux conséquences d’un mandat d’arrêt délivré pour l’exécution d’une condamnation pénale alors que M. C. n’a fait l’objet d’aucune sanction pénale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d’une part M. C., d’autre part le ministre des affaires étrangères ;

Vu le procès verbal de l’audience publique du vendredi 22 août 2003 à 12 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Maître Christophe NICOLAY, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. C. ;

- le représentant du ministre des affaires étrangères ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : "Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ... aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale..." ;

Considérant que le refus de renouvellement ou de délivrance d’un passeport à un citoyen français porte atteinte à la liberté d’aller et venir qui constitue une liberté fondamentale au sens des dispositions précitées de l’article L. 521-2 du code de justice administrative ;

Considérant toutefois qu’il ressort des pièces du dossier, ainsi que des éléments recueillis au cours de l’audience que M. C., ressortissant français résidant aux Philippines et exerçant son activité professionnelle au sein de la Banque asiatique de développement sise à Manille (Philippines) dispose d’un passeport dont la validité expire le 20 mai 2004 ; qu’il est constant que les autorités des Philippines exigent, pour accorder l’entrée sur le territoire de cet Etat un passeport d’une validité minimum de six mois ; que le passeport actuel du requérant satisfait cette condition jusqu’au 19 novembre 2003 inclus ; que si le requérant allègue l’obligation qui lui serait faite, pour se rendre en mission au Kazakhstan et en Ouzbékistan, en septembre 2003, dans le cadre de ses activités professionnelles au sein de la Banque asiatique de développement, de détenir un visa à entrées multiples d’une durée d’un an qui n’est susceptible d’être apposé que sur un passeport dont la durée de validité devrait être supérieure d’au moins six mois à celle dudit visa, il n’en justifie pas dès lors que les documents internes à la Banque asiatique de développement, produits par l’intéressé, font également état de la possibilité d’effectuer un séjour dans ces Etats au moyen d’un visa, valable pour une entrée, délivré pour la durée de la mission ; que, dès lors, la demande de M. C. d’un renouvellement anticipé de son passeport n’est pas justifiée par l’urgence ; qu’il n’y a pas lieu, par suite, et en tout état de cause, de prescrire l’injonction demandée ;

Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. C. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de M. C. est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Marc C. et au ministre des affaires étrangères.

 


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