CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 253399
Mlle Jeanne F.
M. André F.
M. Aladjidi
Rapporteur
M. Chauvaux
Commissaire du gouvernement
Séance du 21 mai 2003
Lecture du 11 juin 2003
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 5ème et 7ème sous-section réunies)
Sur le rapport de la 5ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour Mlle Jeanne F. et M. André F. ; Mlle F. et M. F. demandent au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’ordonnance du 8 janvier 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la suspension de l’exécution de l’arrêté du 15 octobre 2002 du préfet de Paris interdisant définitivement à l’habitation et à l’utilisation le logement dont ils sont propriétaires au 87 rue de Maubeuge à Paris (10ème) ;
2°) d’ordonner la suspension demandée ;
3°) de condamner l’Etat à leur verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la construction et de l’habitation ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Aladjidi, Auditeur,
les observations de la SCP Boulloche, Boulloche, avocat de Mlle Jeanne F. et de M. André F.,
les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 1331-31 du code de la santé publique "lorsque les locaux sont frappés d’une interdiction définitive (...) d’habiter et d’utiliser les lieux (...), le propriétaire est tenu à l’égard des occupants visés à l’article L. 521-1 du code de la construction et de l’habitation d’assurer leur relogement ou leur hébergement dans les conditions prévues aux articles L. 521-1 à L. 521-3 du même code" ; qu’aux termes du dernier alinéa de l’article L. 521-1 de ce code : "l’occupant est le titulaire d’un droit réel conférant l’usage, le locataire, le sous-locataire ou l’occupant de bonne foi des locaux à usage d’habitation et de locaux d’hébergement constituant son habitation principale" ; qu’il en résulte que les propriétaires d’un logement ne sont pas tenus d’assurer le relogement des occupants sans titre de ce logement ; qu’en vertu de l’article L. 1331-28 du code de la santé publique, l’arrêté du préfet prononçant l’interdiction définitive d’habiter et d’utiliser des locaux comporte le texte reproduit des articles L. 521-1 à L. 521-4 du code de la construction et de l’habitation ;
Considérant que l’article 3 de l’arrêté du préfet de Paris en date du 15 octobre 2002 interdisant définitivement à l’habitation et à l’utilisation un logement dont sont propriétaires Mlle et M. F. rappelle que ces derniers sont tenus d’assurer, dans les conditions prévues par les articles L. 521-1 à L. 521-4 du code de la construction et de l’habitation, le relogement des occupants du logement frappé d’interdiction définitive d’habiter ; qu’il n’a cependant pas pour objet et n’aurait pu avoir légalement pour effet d’imposer le relogement de personnes qui ne sont pas visées par les dispositions précitées du dernier alinéa de l’article L. 521-1 du code de la construction et de l’habitation ; que, par suite, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a pu, sans dénaturer les pièces du dossier, estimer que l’arrêté attaqué, qui se borne à rappeler et à reproduire les articles L. 521-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation, ainsi que l’impose l’article L. 1331-28 du code de la santé publique, ne faisait pas obligation aux propriétaires d’héberger ou de reloger les occupants sans titre de leur logement, auxquels les articles L. 521-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation n’étaient pas applicables ; qu’il a pu en déduire, sans commettre d’erreur de droit, que le moyen tiré de ce qu’une obligation de relogement était imposée illégalement par l’arrêté attaqué n’était pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté contesté ; qu’il n’a pas non plus commis d’erreur de droit en jugeant que le moyen tiré de l’impossibilité d’effectuer, tant que les occupants n’avaient pas été expulsés, les travaux empêchant une nouvelle occupation des locaux, n’était pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité dudit arrêté ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mlle et M. F. ne sont pas fondés à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;
Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante soit condamné à verser aux requérants la somme qu’ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mlle F. et de M. F. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Jeanne F., à M. André F., au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées