TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE CERGY-PONTOISE
Préfet de la Seine-Saint-Denis
Ordonnance du 25 juillet 2001
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le juge des référés statuant en urgence
Vu, enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 17 juillet 2001 sous le n° 0103261, la requête présentée par le préfet de la Seine-Saint-Denis ; le préfet de la Seine-Saint-Denis défère au tribunal l’arrêté du maire d’ Aulnay-sous-Bois en date du 30 mai 2001, réglementant la circulation des mineurs de moins de treize ans, entre minuit et six heures,
sur le territoire de la commune ;
Vu l’ arrêté attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision en date du 1er janvier 2001 , par laquelle le Président du tribunal administratif
de Cergy Pontoise a désigné M. SOUMET, vice-président pour statuer sur les demandes de référé ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 19 juillet 2001 ;
le rapport de M.Soumet, vice-président ;
les observations de M.Cannarozzo, représentant la commune d’Aulnay-sous-Bois
les observations de M.Praver, représentant le Préfet de la Seine-Saint-Denis
Considérant qu’aux termes de dispositions de 1’articJe L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, telles qu’elles résultent de la loi du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives, et reproduites aux articles L. 554-1 et L. 554-3 du code de justice administrative, lorsqu’il défère au tribunal administratif un acte qu’il estime contraire à la légalité "...Le représentant de l’Etat peut assortir son recours d’une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l’un des moyens invoqués paraît, en état de l’instruction, propre à
créer un doute sérieux quant à la légalité de l’acte attaqué... Lorsque l’acte attaqué est de nature à
compromettre l’ exercice d’une liberté publique ou individuelle, le président du tribunal administratif en prononce la suspension dans les quarante-huit heures. La décision relative à la suspension est susceptible d’appel devant le Conseil d’Etat dans la. quinzaine de sa
notification..." ;
Considérant que, sur le fondement de ces dispositions, le préfet de la Seine-Saint-Denis a demandé au Tribunal de suspendre l’exécution de l’arrêté du 30 mai 2001 par lequel le maire d’Aulnay-sous-bois a interdit sur tout le territoire de la commune la circulation des mineurs de
moins de 13 ans non accompagnés d’une personne majeure ou ayant autorité sur le mineur, de 0 heures à six heures du matin ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier ainsi que de l’audience de référé qu’en édictant ces dispositions le maire a entendu contribuer à la protection des mineurs de moins de 13 ans contre les dangers auxquels ils peuvent être exposés en tant que victimes d’actes de violence commis dans la commune ou, par un effet de contagion et d’accoutumance, complices de tels actes ;
Considérant que ni l’article 372-2 du Code civil selon lequel la santé, la sécurité et la moralité de l’enfant sont confiées par la lois à ses père et mère, qui auront à son égard, droit et devoir de garde, de surveillance et d’éducation. ni les articles 375 à 375-8 du même code selon lesquels l’autorité judiciaire peut, en cas de carence des parents, et si la santé, la sécurité ou la
moralité de mineurs sont en danger - prononcer des mesures d’assistance éducative, ni, enfin, les pouvoirs généraux que les services de police peuvent exercer en tout lieux vis-à-vis de mineurs, ne font obstacle à ce que, pour contribuer à la protection des mineurs, le maire fasse usage, en fonction de circonstances locales particulières, des pouvoirs de police générale qu’il détient des articles L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales ;
Considérant toutefois que la légalité de mesures restreignant à cette fin la liberté de circulation des mineurs est subordonnée à la double condition qu’elles soient justifiées par l’existence de risques particuliers dans les secteurs pour lesquels elles sont édictées et qu’elles soient adaptées par leur contenu à l’objectif de protection pris en compte ;
Considérant qu’il n’est pas sérieusement contesté que la commune d’Aulnay-sous-bois dont les habitants âgés de moins de 13 ans représentent plus de 20 % de la population totale subit depuis plusieurs années un accroissement des infractions, notamment de caractère délictueux, s’accompagnant de violence sur les personnes ou les biens ; que par ailleurs, elle se situe dans un
département, la Seine-Saint-Denis, particulièrement touché par les problèmes de délinquance ; que les motifs comme le dispositif prévu dans l’arrêté contesté qui ont pour objectif principal la protection des mineurs de moins de 13 ans ne paraissent pas inadaptés par rapport aux fins poursuivies dans la mesure où ils peuvent permettre d’appeler l’attention des parents sur les
risques de toute nature que leurs enfants encourent en circulant la nuit à une heure tardive sur le territoire de la commune ;
Considérant toutefois que le dispositif prévu par les articles 1 et 2 de l’arrêté du maire d’Aulnay-sous-bois présente dans ses modalités d’exécution de prévention de la délinquance des mineurs de moins de 13 ans un caractère trop général parce qu’illimité dans le temps et que l’exécution forcée par reconduite au poste de police n’est pas conditionnée par une situation d’urgence ; que dans ces conditions la décision attaquée porte une atteinte excessive à la liberté de circulation des mineurs et il y a lieu d’ordonner la suspension dudit arrêté ;
O R D O N N E
Article 1er : Jusqu’à ce qu’il ait été statué sur le déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis présenté
contre l’arrêté du maire d’Aulnay-sous-Bois du 30 mai 2001 réglementant la circulation des mineurs de moins de 13 ans sur l’ensemble du territoire de la commune, les effets de cet arrêté sont suspendus.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune d’Aulnay-sous-bois et au préfet de la Seine-Saint-Denis. Copie en sera adressée à ministre de l’intérieur.
Fait à Cergy-Pontoise, le 25 juillet 2001.