CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
n° 243109
M. Thiellay
Rapporteur
M. Lamy
Commissaire du gouvernement
Séance du 29 novembre 2002
Lecture du 13 décembre 2002
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d’Etat, statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur la rapport de la 6ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 14 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par M. Yannick M. ; M. M. demande au Conseil d’Etat d’annuler le jugement du 18 janvier 2002 du tribunal administratif de Nantes en tant qu’il a confirmé le rejet de son compte de campagne par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Thiellay, Maître des Requêtes,
les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que l’intérêt à faire appel d’un jugement s’apprécie par rapport à son dispositif et non à ses motifs ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 52-12 du code électoral : « Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection (…) Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit./ (…) Le compte de campagne et ses annexes sont transmis à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 52-15 du même code : « La commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne. / (…) Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n’a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il apparaît un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l’élection (…) / Le remboursement total ou partiel des dépenses retracées dans le compte de campagne, quand la loi le prévoit, n’est possible qu’après l’approbation du compte de campagne par la commission » ; qu’aux termes des deux premiers alinéas de l’article L. 118-3 : « Saisi par la commission instituée par l’article L. 52-14, le juge de l’élection peut déclarer inéligible pendant un an le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales. / Dans les autres cas, le juge de l’élection peut ne pas prononcer l’inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie (…) » ; qu’enfin, aux termes de l’article L. 52-11-1 : "Les dépenses électorales des candidats aux élections auxquelles l’article L. 52-4 est applicable font l’objet d’un remboursement forfaitaire de l’Etat égal à 50 % de leur plafond de dépenses. (…) Le remboursement forfaitaire n’est pas versé aux candidats (…) dont le compte de campagne a été rejeté (…)" ;
Considérant que si un candidat dont le compte n’a pas été approuvé par la commission nationale des comptes de campagne peut discuter le bien-fondé de cette décision à l’appui d’un recours formé devant le juge administratif à l’encontre de l’acte par lequel le préfet fait application des dispositions relatives au remboursement des dépenses électorales, il n’est, en revanche, pas recevable à former directement un recours contentieux contre la décision par laquelle la commission nationale a rejeté ou réformé son compte de campagne ; que, de même, lorsqu’après réformation ou rejet d’un compte, la commission nationale saisit le "juge de l’élection", cette saisine n’a pas pour objet de faire valider par le juge cette décision de rejet ou de réformation ; qu’elle tend seulement à ce que le juge de l’élection recherche s’il y a lieu ou non de prononcer l’inéligibilité du candidat et, dans l’affirmative, s’il s’agit d’un candidat proclamé élu, d’annuler son élection ou de le déclarer démissionnaire d’office ; qu’ainsi, dans le cas où le juge de l’élection décide qu’il n’y a pas lieu de prononcer l’inéligibilité, le dispositif de son jugement ne saurait faire grief au candidat, sans qu’il y ait à cet égard à distinguer selon que ce dispositif est fondé sur le motif que c’est à tort que le compte a été rejeté ou réformé ou sur un motif tiré, en application du deuxième alinéa de l’article L. 118-3 du code électoral, de la bonne foi du candidat ;
Considérant que le tribunal administratif de Nantes, saisi par la commission nationale des comptes de campagne à la suite du rejet par cette dernière du compte de campagne de M. M., a, par le jugement attaqué, décidé qu’il n’y avait pas lieu de prononcer l’inéligibilité de ce dernier ; qu’il résulte de ce qui précède qu’alors même qu’avant de fonder ce dispositif, par application du deuxième alinéa de l’article L. 118-3 du code électoral, sur la bonne foi de l’intéressé, le tribunal administratif a admis le bien-fondé du rejet du compte, M. M. - à qui, le cas échéant, il appartiendra de saisir le juge administratif de conclusions dirigées contre la décision du préfet relative au remboursement de ses dépenses électorales en invoquant, à l’appui de ces conclusions, des moyens dirigés contre la décision par laquelle la commission nationale des comptes de campagne a rejeté son compte - ne justifie pas d’un intérêt à faire appel ; que sa requête doit dès lors être rejetée ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. M. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Yannick M., à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.