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Conseil d’Etat, 10 décembre 2008, n° 295977, Société Andros et Cie

rsque l’administration use de la faculté qu’elles lui confèrent dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu’elle établit que ces actes ont un caractère fictif ou que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, s’il n’avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 295977

société ANDROS ET CIE

M. Gilles Pellissier
Rapporteur

M. Julien Boucher
Commissaire du gouvernement

Séance du 24 septembre 2008
Lecture du 10 décembre 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 10ème sous-section de la section du contentieux

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 juillet et 13 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la société ANDROS ET CIE, venant aux droits de la société anonyme ANDROS, dont le siège est zone industrielle à Biars (46131) Cedex ; la société ANDROS ET CIE demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 30 mai 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux, faisant droit au recours du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, a réformé le jugement du 3 décembre 2002 du tribunal administratif de Toulouse et remis à la charge de SA ANDROS les cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et les pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1993 et 1994 à raison de la réintégration dans ses résultats imposables des dividendes versés par la société Pollux Development ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 29 septembre 2008, présentée pour la société ANDROS ET CIE ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gilles Pellissier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société ANDROS ET CIE,

- les conclusions de M. Julien Boucher, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SA ANDROS, aux droits de laquelle vient la SAS ANDROS ET CIE, a fait l’acquisition de 22, 99 % du capital de la société de droit panaméen Pollux Development dans le but allégué de réaliser par son entremise des investissements de capital-risque dans des sociétés industrielles et commerciales non cotées ; que la société Pollux Development avait pour seul actif une participation dans la société de droit luxembourgeois White Knight Partnership, dont l’un des membres nommé White Knight II SA a pour activité de prendre et gérer des participations dans des sociétés industrielles ou de services non cotées situées principalement sur le territoire de l’Union européenne ; que la SA ANDROS a bénéficié du régime fiscal des sociétés mères prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts ; qu’à l’issue d’une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 1993 et en 1994, l’administration fiscale a estimé que le recours à la société panaméenne était constitutif d’un abus de droit et réintégré, sur le fondement de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans les bases imposables de la SA ANDROS, le montant des dividendes distribués par la société Pollux Development ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : " Ne peuvent être opposés à l’administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d’un contrat ou d’une convention à l’aide de clauses : / (.) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (.) / L’administration est en droit de restituer son véritable caractère à l’opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l’avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L’administration peut également soumettre le litige à l’avis du comité (.) / Si l’administration ne s’est pas conformée à l’avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement " ; qu’il résulte de ces dispositions que, lorsque l’administration use de la faculté qu’elles lui confèrent dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu’elle établit que ces actes ont un caractère fictif ou que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, s’il n’avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ;

Considérant qu’en jugeant que le ministre faisait valoir, sans être sérieusement contredit, que la société Pollux Development n’exerçait aucune activité sur le territoire de Panama et n’y était pas soumise à l’impôt sur les sociétés, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit dans la répartition de la charge de la preuve ;

Considérant que la cour a constaté, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que la société Pollux Development, structure dépourvue de toute substance, se bornait à servir d’intermédiaire entre ses actionnaires et la société luxembourgeoise et dépendait pour sa gestion et ses résultats exclusivement des compétences et du savoir-faire financier de cette dernière société, sans que la circonstance alléguée que certains des associés de la société panaméenne auraient des compétences en matière d’investissements industriels et financiers ait une incidence sur cette appréciation ; qu’elle a également estimé, sans dénaturer les faits, que la localisation à Panama de cette structure d’interposition ne répondait à aucune nécessité économique et ne pouvait se justifier par le besoin de limiter les risques d’insolvabilité des différents actionnaires ; que la cour a relevé que la participation de la SA ANDROS dans le capital de la société Pollux Development à hauteur de 22, 99 % lui permettait de bénéficier du régime fiscal des sociétés mères prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts tout en évitant l’application de l’article 209 B du même code, de façon à être dispensée en France de tout impôt sur les sociétés sur la quote-part des produits d’investissement de la société luxembourgeoise lui revenant sous la forme des dividendes de la société panaméenne ; qu’ainsi la cour a pu, sans commettre ni d’erreur de droit ni d’erreur de qualification juridique, juger que le recours dans ces conditions à la société panaméenne était un montage constitutif d’un abus de droit ; que dès lors, la société ANDROS ET CIE n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué, qui est suffisamment motivé ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le pourvoi de la société ANDROS ET CIE est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société ANDROS ET CIE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

 


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