CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 295355
M. G.
Mme C.
M. Benoit Bohnert
Rapporteur
M. Pierre Collin
Commissaire du gouvernement
Séance du 16 mai 2008
Lecture du 6 août 2008
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 juillet et 13 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Alain G. et Mme Isabelle C. ; M. G. et Mme C. demandent au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’article 5 de l’arrêt du 11 mai 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux, après avoir accueilli partiellement leur appel tendant à l’annulation du jugement du 20 décembre 2001 du tribunal administratif de Poitiers rejetant leur demande en décharge des compléments d’impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution au remboursement de la dette sociale auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1994, 1995 et 1996 ainsi que des pénalités correspondantes, a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la réduction de la base de ces impositions au titre des années 1995 et 1996 du montant des redressements relatifs aux bénéfices industriels et commerciaux afférents aux exercices clos au cours de ces mêmes années ;
2°) réglant l’affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes,
les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. G. et de Mme C.,
les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l’administration fiscale a entrepris en 1997 une vérification de la comptabilité de l’EURL France Réparations, dont Mme C. était l’associé unique et la gérante, au titre de la période du 1er avril 1993 au 15 septembre 1996 ; qu’au terme de ses investigations, le vérificateur a, par une notification de redressements en date du 10 mars 1998, notamment remis en cause des charges déduites pour la détermination du résultat imposable des exercices clos en 1994, 1995 et 1996 ; que Mme C. et son ex-époux M. G. se pourvoient en cassation contre l’article 5 de l’arrêt du 11 mai 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux, après avoir accueilli partiellement leur appel tendant à l’annulation du jugement du 20 décembre 2001 du tribunal administratif de Poitiers rejetant leur demande tendant à la décharge des compléments d’impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution au remboursement de la dette sociale auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1994, 1995 et 1996 ainsi que des pénalités correspondantes, a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la réduction de la base de ces impositions au titre des années 1995 et 1996 du montant des redressements relatifs aux bénéfices industriels et commerciaux de l’EURL France Réparations afférents aux exercices clos au cours de ces mêmes années ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 11 du livre des procédures fiscales : "A moins qu’un délai plus long ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d’éclaircissements et, d’une manière générale, à toute notification émanant d’un agent de l’administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification" ; qu’aux termes de l’article L. 57 du même livre, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : "L’administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (.)/ Lorsque l’administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit également être motivée" ; qu’aux termes de l’article R. 57-1 du même livre : "La notification de redressement prévue par l’article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs du redressement envisagé. L’administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la notification" ;
Considérant que, lorsque l’administration invite un contribuable à compléter ses observations en réponse à une notification de redressements par la production de documents de nature à justifier ses allégations, elle doit être regardée comme accordant à l’intéressé une prolongation du délai de 30 jours prévu par les dispositions précitées du livre des procédures fiscales ; qu’une telle décision, qui a pour objet et pour effet d’offrir au contribuable la possibilité d’étayer sa contestation des redressements alors même que ce délai serait expiré, n’est pas au nombre des actes mentionnés à l’article L. 11 du même livre ; que, par suite, la circonstance qu’elle fixerait un délai inférieur au délai de trente jours prévu par ce dernier article, qui ne prive ce contribuable d’aucune garantie, n’entache pas d’irrégularité la procédure d’imposition ;
Considérant qu’il suit de là qu’en jugeant, après avoir relevé que, les observations présentées le 6 avril 1998, par le mandataire désigné par Mme C., sur la notification de redressements du 10 mars 1998, n’étant pas assorties des précisions et justifications nécessaires quant aux charges relatives au petit outillage et aux produits d’entretien dont la déduction a été refusée, le vérificateur avait, par courrier du 29 avril 1998, invité la contribuable à fournir une liste des factures portant sur les charges en litige, mentionnant la date de l’opération, le nom du fournisseur et la nature de l’achat réalisé, qu’une telle invitation, qui ne visait qu’à donner un contenu utile à ces observations, ne pouvait être assimilée à l’une des demandes visées par l’article L. 11 précité du livre des procédures fiscales pour lesquelles un délai de réponse de trente jours au minimum est prescrit et qu’en en déduisant que la circonstance que cette invitation avait fixé au 15 mai 1998 la date limite de réponse impartie au contribuable n’avait pas entaché d’irrégularité la procédure d’imposition, la cour administrative d’appel de Bordeaux n’a ni commis d’erreur de droit ni entaché son arrêt d’une erreur de qualification juridique ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. G. et Mme C. ne sont pas fondés à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. G. et Mme C. au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. G. et de Mme C. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Alain G., à Mme Isabelle C. et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.