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Conseil d’Etat, 23 avril 2008, n° 309685, Rolland B.

Il incombe à l’autorité administrative d’assurer, en accordant au besoin le concours de la force publique, l’exécution des décisions de justice. Le droit de propriété, qui constitue une liberté fondamentale, a pour corollaire la liberté de disposer d’un bien ; que le refus de concours de la force publique pour assurer l’exécution d’une décision juridictionnelle ordonnant l’expulsion d’un immeuble porte atteinte à cette liberté fondamentale. Les exigences de l’ordre public, appréciées au regard des conséquences de toute nature de l’exécution matérielle de la décision juridictionnelle, peuvent toutefois légalement justifier un refus de concours de la force publique tout en engageant la responsabilité de l’Etat sur le terrain de l’égalité devant les charges publiques.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 309685

M. B.

M. Marc Lambron
Rapporteur

M. Jean-Philippe Thiellay
Commissaire du gouvernement

Séance du 16 avril 2008
Lecture du 23 avril 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 4ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la section du contentieux

Vu le pourvoi, enregistré le 26 septembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présenté pour M. Roland B. ; M. B. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance du 10 septembre 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce qu’il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de prendre toutes mesures nécessaires pour assurer, sans délai et sous astreinte de 150 euros par jour de retard, l’exécution de l’ordonnance rendue le 20 octobre 2005 par le président du tribunal d’instance de Marseille ordonnant l’expulsion de Mme Havez ;

2°) statuant en référé, d’enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de prendre toutes mesures nécessaires pour assurer l’exécution de l’ordonnance rendue le 20 octobre 2005, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 76-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l’habitation ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, Conseiller d’Etat,

- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. B.,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, Commissaire du gouvernement

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Marseille que, pour demander qu’il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de prendre toutes mesures nécessaires afin d’assurer l’exécution de l’ordonnance rendue le 20 octobre 2005 par le président du tribunal d’instance de Marseille et ordonnant l’expulsion de Mme Havez, M. B. invoquait, non seulement le trouble à l’ordre public qu’aurait occasionné le comportement de Mme Havez et le fait que cette dernière ne payait plus depuis janvier 2006 les indemnités d’occupation mises à sa charge, mais également la circonstance que le congé donné le 14 janvier 2005 à la locataire était justifié par sa volonté de reprendre le logement objet du bail pour l’habiter lui-même ; que le juge des référés, statuant sur le fondement des dispositions de l’article L. 522-3 du code de justice administrative, n’a fait état de ce moyen, ni dans les visas, ni dans les motifs de son ordonnance ; qu’il a ainsi insuffisamment motivé cette ordonnance, dont M. B. est dès lors fondé à demander l’annulation ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au titre de procédure de référé engagée ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale " ;

Considérant, qu’il incombe à l’autorité administrative d’assurer, en accordant au besoin le concours de la force publique, l’exécution des décisions de justice ; que le droit de propriété, qui constitue une liberté fondamentale, a pour corollaire la liberté de disposer d’un bien ; que le refus de concours de la force publique pour assurer l’exécution d’une décision juridictionnelle ordonnant l’expulsion d’un immeuble porte atteinte à cette liberté fondamentale ; que les exigences de l’ordre public, appréciées au regard des conséquences de toute nature de l’exécution matérielle de la décision juridictionnelle, peuvent toutefois légalement justifier un refus de concours de la force publique tout en engageant la responsabilité de l’Etat sur le terrain de l’égalité devant les charges publiques ;

Considérant que, pour refuser le concours de la force publique sollicité par le requérant, alors même que ce dernier invoque notamment l’existence d’impayés et son intention de résider lui-même dans le logement donné à bail, l’autorité administrative s’est fondée sur la situation de la personne dont l’expulsion est demandée, laquelle est atteinte d’une pathologie chronique rhumatismale lourde avec impotence et marche difficile ayant justifié son placement en congé de longue maladie, sans qu’elle bénéficie, alors que ses ressources sont faibles, d’une solution de relogement ; que, de tels motifs pouvant être légalement invoqués pour justifier un refus de concours de la force publique, le refus du préfet, en l’état du dossier et dans les circonstances de l’espèce, ne peut être regardé comme entaché d’une illégalité grave et manifeste de nature à justifier l’application des dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la demande de M. B. ne peut qu’être rejetée, y compris en ce qui concerne les conclusions à fins d’injonction et d’astreinte ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : L’ordonnance du 10 septembre 2007 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. B. devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B. est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Roland B. et au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.

 


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