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12 décembre 2001

La loi, la collecte des données de connexion et l’inconstitutionnalité

Acte II - Scène I. Après la LSQ, la LFR ! La Loi sur la sécurité quotidienne du 15 novembre 2001 a intégré dans notre droit positif diverses dispositions relatives à Internet moyennant le suivi d’une procédure constitutionnellement contestable et l’absence de saisine du Conseil constitutionnel. Seulement, nos parlementaires ne se sont pas arrêtés là et la lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2001, adopté le 5 décembre dernier par l’Assemblée nationale, laisse pantois.

Dans le cadre de l’examen de la loi de finances rectificatives pour 2001, le gouvernement a intégré un nouvel article venant modifié le régime du stockage des données de connexion enregistrées par les divers opérateurs de télécommunications. La LSQ prévoit explicitement, en exception au principe d’effacement, que les opérateurs de télécommunications doivent conserver les données nécessaires à l’établissement d’une communication, auxquelles seules les autorités judiciaires peuvent avoir accès (Voir à ce sujet les débats qui ont eu cours sur le site du Forum des Droits sur l’Internet).

Le présent amendement (devenu maintenant l’article 32bis du projet de loi) tend à autoriser les douanes, la direction générale des impôts ainsi que la Commission des opérations de bourse à accéder aux données de connexion enregistrées par ledits opérateurs "pour le besoin de leurs missions". Adoptée de nouveau sans aucun débat parlementaire, cette disposition étend de manière considérable les pouvoirs de ces autorités en leur permettant d’accéder à des informations pouvant, en théorie, être indirectement ou directement du contenu (un décret en Conseil d’Etat doit spécifier les données que les opérateurs devront conserver).

De la même manière que la LSQ, de nouveaux arguments permettent de soulever l’inconstitutionnalité réelle de cette disposition.

Article 32bis : cavalier budgétaire

Une loi de finance doit obligatoirement être votée dans des délais courts afin d’assurer de manière pertinente la continuité des services de l’Etat. Pour éviter tout ralentissement de la procédure, la pratique et notamment la jurisprudence a encadré les abus des parlementaires et notamment les articles dépourvus de tout lien direct ou non avec un contenu financier.

L’article 1er de l’ordonnance du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances précise que "les lois de finances déterminent la nature, le montant et l’affectation des ressources et des charges de l’Etat, compte tenu d’un équilibre économique et financier qu’elles définissent.". Au sens de cet article, ont le caractère de lois de finances, "La loi de finances de l’année et les lois de finances rectificatives (...)".

Le juge constitutionnel, dans le cadre de son contrôle relatif à ces lois de finances, vérifie qu’aucun abus - qualifié alors de cavalier budgétaire - n’apparaît dans le texte. A la lecture conjointe de l’article 1er de l’ordonnance de 1959 et de l’article 32bis du projet de loi de finances rectificative pour 2001 en cours d’examen, il apparaît ouvertement que ces dispositions (du moins en ce qui concerne la COB) ne peuvent trouver leur place au sein d’une loi de finances en raison de l’exclusion de tout caractère financier.

Cette solution semble non applicable aux dispositions relatives à la direction générale des impôts voire, des douanes, sauf pour le juge constitutionnel à adopter une position stricte excluant les procédures d’enquêtes dans le domaine des finances de l’Etat, du champ des lois de finances [dès l’entrée en vigueur de la loi du 1er août 2001 relative aux lois de finances en 2005, une telle exclusion semblera possible, l’article 1er de cette loi n’intégrant plus la dimension "recouvrement" dans la définition de la loi de finances].

Un contrôle a posteriori de la LSQ ?

En cas de contrôle de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel pourrait réaliser un contrôle de constitutionnalité a posteriori. Un tel contrôle est né d’une pure construction jurisprudentielle issue de la décision 85-187 DC (CC, 25 janvier 1985, Loi relative à l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie et dépendances). Les sages de la rue Montpensier admettent en effet un contrôle de constitutionnalité d’une loi promulguée "à l’occasion de l’examen de dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine".

Or, l’amendement déposé par le Gouvernement s’intègre, à mes yeux, dans ces prévisions. En créant des nouvelles catégories de personnes susceptibles d’accéder aux données de connexion, cet amendement affecte le domaine d’application dudit article et notamment restreint la portée du principe d’effacement posé par l’article L. 32-3-1.

En conséquence, si le Conseil constitutionnel est saisi dudit amendement, il pourra, outre le déclarer contraire à la Constitution sur le fondement de la théorie des cavaliers budgétaires, contrôler par ricochet la constitutionnalité des dispositions relatives aux données de connexion introduites par la LSQ voire les déclarer contraire à la Constitution. Mais encore faut-il que ces dispositions résistent à la navette parlementaire et que le texte soit, au final, déféré au juge constitutionnel. (BT)

 


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