format pour impression
(imprimer)

DANS LA MEME RUBRIQUE :
Conseil d’Etat, 17 mars 2004, n° 241804, SCI Rivière
Conseil d’Etat, 6 février 2008, n° 308700, Michel N.
Conseil d’Etat, 18 octobre 2002, n° 222957, M. Michel D.
Cour administrative d’appel de Paris, 6 novembre 2003, n° 00PA01250, Société Metin Brie
Conseil d’Etat, 21 mars 2008, n° 296239, Luce C.
Conseil d’Etat, 29 novembre 2002, n° 244873, Commune de Lirac c/ SARL Chaux et Ciments
Conseil d’Etat, 19 juin 2002, n° 219648, Commune de Beausoleil
Conseil d’Etat, 30 avril 2003, n° 237039, Secrétaire d’Etat au logement c/ SNC Norminter lyonnais
Conseil d’Etat, 27 février 2008, n° 289945, Laurence G.
Conseil d’Etat, 25 mars 2002, n° 219409, M et Mme A.




Conseil d’Etat, 4 février 2002, n° 217258, SARL Constructions Transactions Mauro

La délibération attaquée, en se bornant à énoncer que « le renforcement du droit de préemption urbain est l’un des moyens juridiques qui contribuera à la mise en place d’une nouvelle politique de l’habitat » et que, « dans le cadre de cette politique globale en faveur de l’habitat social, il est nécessaire de loger les habitants sédentaires aux revenus moyens et modestes », sans préciser les raisons pour lesquelles la commune a décidé d’appliquer le droit de préemption aux aliénations et cessions mentionnées par les dispositions précitées du premier alinéa de l’article L. 211-4 du code de l’urbanisme, ne satisfait pas aux exigences de motivation prévues au même article.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 217258

SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO

M. Donnat, Rapporteur

Mme Boissard, Commissaire du gouvernement

Séance du 12 décembre 2001

Lecture du 4 février 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 1ère et 2ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 février et 9 juin 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO, dont le siège est 76, avenue Denis Semeria à Saint-Jean-Cap-Ferrat (06230) ; la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt en date du 7 décembre 1999 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon a, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 14 septembre 1995, rejeté sa demande tendant à l’annulation de la délibération du 12 juin 1991 du conseil municipal de Saint-Jean-Cap-Ferrat instituant sur le territoire de la commune un droit de préemption urbain renforcé ;

2°) d’annuler ladite délibération ;

3°) de condamner la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat à lui verser la somme de 66 532 F (10 142,74 euros) au titre de l’article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’urbanisme, notamment ses articles L. 211-4 et L. 600-4-1 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Donnat, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO,

- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il résulte de l’examen de l’arrêt attaqué de la cour administrative d’appel de Lyon que celle-ci a omis de répondre au moyen, qui n’était pas inopérant, soulevé devant elle par la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO et tiré de ce que la délibération attaquée, prise en application du dernier alinéa de l’article L. 211-4 du code de l’urbanisme en vertu duquel peuvent être incluses dans le champ d’application du droit de préemption urbain les aliénations et cessions qui, aux termes du premier alinéa du même article, en sont normalement exclues, devait être annulée par voie de conséquence de l’annulation partielle, par le juge de l’excès de pouvoir, du plan d’occupation des sols de la commune ; qu’en raison de cette omission, la société requérante est fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué en tant qu’il a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la délibération du 12 juin 1991 instituant sur le territoire de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat un droit de préemption urbain renforcé ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat, s’il prononce l’annulation d’une décision d’une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l’affaire au fond si l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au fond ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat à la demande de première instance :

Considérant que la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO, qui exerce une activité de marchand de biens sur le territoire de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat, a intérêt et, par suite, qualité pour agir à l’encontre de la délibération attaquée qui inclut dans le champ d’application du droit de préemption urbain les aliénations et cessions qui en sont normalement exclues ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat à la demande de première instance doit être écartée ;

Sur la légalité de la délibération litigieuse :

Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 211-4 du code de l’urbanisme, le droit de préemption urbain prévu par l’article L. 211-1 du même code « n’est pas applicable : a) A l’aliénation d’un ou plusieurs lots constitués soit par un seul local à usage d’habitation, à usage professionnel ou à usage professionnel et d’habitation, soit par un tel local et ses locaux accessoires, soit par un ou plusieurs locaux accessoires d’un tel local, compris dans un bâtiment effectivement soumis, à la date du projet d’aliénation, au régime de la copropriété, soit à la suite du partage total ou partiel d’une société d’attribution, soit depuis dix années au moins dans les cas où la mise en copropriété ne résulte pas d’un tel partage, la date de publication du règlement de copropriété au bureau des hypothèques constituant le point de départ de ce délai./ b) A la cession de parts ou d’actions de sociétés visées aux titres II et III de la loi n° 71-579 du 16 juillet 1971 et donnant vocation à l’attribution d’un local d’habitation, d’un local professionnel ou d’un local mixte et des locaux qui lui sont accessoires./ c) A l’aliénation d’un immeuble bâti, pendant une période de dix ans à compter de son achèvement » ; qu’aux termes du dernier alinéa du même article : « Toutefois, par délibération motivée, la commune peut décider d’appliquer ce droit de préemption aux aliénations et cessions mentionnées au présent article sur la totalité ou certaines parties du territoire soumis à ce droit » ;

Considérant que la délibération attaquée, en se bornant à énoncer que « le renforcement du droit de préemption urbain est l’un des moyens juridiques qui contribuera à la mise en place d’une nouvelle politique de l’habitat » et que, « dans le cadre de cette politique globale en faveur de l’habitat social, il est nécessaire de loger les habitants sédentaires aux revenus moyens et modestes », sans préciser les raisons pour lesquelles la commune a décidé d’appliquer le droit de préemption aux aliénations et cessions mentionnées par les dispositions précitées du premier alinéa de l’article L. 211-4 du code de l’urbanisme, ne satisfait pas aux exigences de motivation prévues au même article ; qu’il suit de là que cette décision est entachée d’illégalité et que la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO est fondée à en demander l’annulation ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme : « Lorsqu’elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d’urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l’ensemble des moyens de la requête qu’elle estime susceptibles de fonder l’annulation ou la suspension, en l’état du dossier ;

Considérant qu’aucun autre moyen de la requête n’est susceptible, en l’état du dossier, de fonder l’annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat a payer à la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO une somme de 3 000 euros ( 19 678 F) au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que la société requérante, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat la somme qu’elle demande au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon en date du 7 décembre 1999 est annulé en tant qu’il a rejeté la demande de la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO dirigée contre la délibération du 12 juin 1991 du conseil municipal de Saint-Jean-Cap-Ferrat.

Article 2 : La délibération du conseil municipal de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat en date du 12 juin 1991 est annulée.

Article 3 : La commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat versera à la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO une somme de 3 000 euros (19 678 F) en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SARL CONSTRUCTIONS TRANSACTIONS MAURO, à la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat et au ministre de l’équipement, des transports et du logement.

 


©opyright - 1998 - contact - Rajf.org - Revue de l'Actualité Juridique Française - L'auteur du site
Suivre la vie du site