CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 293378
M. et Mme M.
M. Bruno Chavanat
Rapporteur
M. Yann Aguila
Commissaire du gouvernement
Séance du 16 avril 2008
Lecture du 14 mai 2008
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 6èmesous-section)
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 mai et 15 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. et Mme Jacques M. ; M. et Mme M. demandent au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 31 janvier 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a, sur la requête de l’Association de sauvegarde de la rivière de Pont-l’Abbé et de ses environs, annulé le jugement du 31 octobre 2002 du tribunal administratif de Rennes ainsi que l’arrêté du 17 mars 1999 par lequel le maire de Pont-l’Abbé a accordé aux requérants un permis de construire une maison d’habitation sur un terrain situé au lieu-dit "Troliguer" ;
2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter la requête d’appel de l’Association de sauvegarde de la rivière de Pont-l’Abbé et de ses environs ;
3°) de mettre à la charge de l’Association de sauvegarde de la rivière de Pont-l’Abbé et de ses environs la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,
les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. et Mme M. et de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de l’association de sauvegarde de la rivière de Pont-l’Abbé et de ses environs,
les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. et Mme M. se sont vus délivrer, par un arrêté du maire de Pont-l’Abbé en date du 17 mars 1999, un permis de construire une maison d’habitation sur un terrain situé au lieudit "Troliguer", cadastré à la section AC sous le n°191 ; que par un jugement en date du 31 octobre 2002, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de l’Association de sauvegarde de la rivière de Pont-l’Abbé et de ses environs tendant à l’annulation de cet arrêté ; que M. et Mme M. se pourvoient en cassation contre l’arrêt du 31 janvier 2006 par lequel la cour administrative de Nantes a annulé ce jugement ainsi que l’arrêté litigieux ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 146-4 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " I. L’extension de l’urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement (.) " ;
Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la parcelle de M. et Mme M. est éloignée d’environ trois kilomètres du bourg de la commune de Pont-l’Abbé ; que si elle se situe à l’extrémité du hameau du Troliguer, celui-ci ne constitue ni une agglomération, ni un village au sens des dispositions précitées ; que dès lors, la cour n’a pas entaché son arrêt de dénaturation des faits de l’espèce en estimant que la construction autorisée par l’arrêté litigieux ne s’inscrivait pas en continuité avec une agglomération ou un village au sens ces dispositions ;
Considérant, en second lieu, qu’il résulte des dispositions du I de l’article L. 146-4 du code de l’urbanisme rappelées ci-dessus, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 3 janvier 1986 dont elles sont issues, que si les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les zones déjà urbanisées, caractérisées par une densité significative des constructions, aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité avec d’autres constructions, dans les zones d’urbanisation diffuse éloignées des agglomérations ; qu’ainsi, après avoir, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, constaté que le terrain d’assiette du projet envisagé ne s’inscrivait pas en continuité avec une agglomération ou un village, la cour a pu en déduire, sans entacher son arrêt d’erreur de droit, que le permis de construire attaqué avait méconnu les dispositions rappelées ci-dessus du I de l’article L. 146-4 ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. et Mme M. ne sont pas fondés à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;
Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Association de sauvegarde de la rivière de Pont-l’Abbé et de ses environs, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme M. demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de M. et Mme M. le versement à l’Association de sauvegarde de la rivière de Pont-l’Abbé et de ses environs d’une somme de 3 000 euros au même titre ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme M. est rejetée.
Article 2 : M. et Mme M. verseront à l’Association de sauvegarde de la rivière de Pont-l’Abbé et de ses environs une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Jacques M., à l’Association de sauvegarde de la rivière de Pont-l’Abbé et de ses environs et à la commune de Pont-l’Abbé.