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Conseil d’Etat, 12 mai 2003, n° 209440, Caisse régionale des assurances mutuelles agricoles d’Ile-de-France

Eu égard aux conditions de la circulation sur les autoroutes, l’absence d’une clôture de protection pour empêcher l’accès des animaux sauvages ou domestiques aux autoroutes ne constitue, de la part des sociétés concessionnaires, un défaut d’entretien normal de ces voies que lorsque la situation des lieux, à proximité des zones de résidence ou de passage de ces animaux, est susceptible de créer un risque particulier pour les usagers.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 209440

CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE DE FRANCE

M. Campeaux
Rapporteur

M. Chauvaux
Commissaire du gouvernement

Séance du 2 avril 2003
Lecture du 12 mai 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 7ème sous-section réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 juin et 21 octobre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE (CRAMAIF), dont le siège est 161, avenue Paul Vaillant Couturier à Gentilly (94250) ; la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 22 avril 1999 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy a annulé un jugement en date du 15 octobre 1992 du tribunal administratif d’Amiens et rejeté sa demande tendant à ce que la société des autoroutes du nord et de l’est de la France (SANEF) soit condamnée à lui rembourser les indemnités payées aux consorts Delaporte en réparation des conséquences d’un accident survenu sur l’autoroute A4 le 5 avril 1986 entre le véhicule conduit par M. Delaporte et un bovin appartenant à M. Leplaige ;

2°) de condamner la société des autoroutes du nord et de l’est de la France à lui verser les sommes de 471 994,99 F et 841 145,60 F, augmentées des intérêts au taux légal à compter du 15 février 1988 ;

3°) de condamner la SANEF à lui verser la somme de 15 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu la loi n° 62-933 du 8 août 1962 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Campeaux, Auditeur,
- les observations de la SCP Parmentier, Didier, avocat de la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la Société des autoroutes du Nord et de l’Est et de la France,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’à la suite d’une collision survenue le 5 avril 1986 à Marigny-en-Orxois (Aisne) entre le véhicule conduit par M. Delaporte et un bovin qui divaguait sur la chaussée de l’autoroute A4, la Société des autoroutes du nord et de l’est de la France (SANEF) a été condamnée par un jugement du 15 octobre 1992 du tribunal administratif d’Amiens à garantir la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE, subrogée dans les droits de M. Leplaige, propriétaire de ce bovin, et dans ceux des consorts Delaporte, victimes de l’accident, qu’elle avait indemnisés, à hauteur d’un dixième des sommes versées à ces derniers ; que, saisie en appel par la SANEF, la cour administrative d’appel de Nancy a, par un arrêt en date du 22 avril 1999, annulé le jugement du tribunal administratif d’Amiens et rejeté les conclusions indemnitaires de la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE ; que celle-ci se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant que, eu égard aux conditions de la circulation sur les autoroutes, l’absence d’une clôture de protection pour empêcher l’accès des animaux sauvages ou domestiques aux autoroutes ne constitue, de la part des sociétés concessionnaires, un défaut d’entretien normal de ces voies que lorsque la situation des lieux, à proximité des zones de résidence ou de passage de ces animaux, est susceptible de créer un risque particulier pour les usagers ;

Considérant que la cour administrative d’appel a jugé, par une appréciation souveraine des faits, que la portion de l’autoroute sur laquelle s’est produit l’accident était bordée de champs cultivés sans aucune pâture proche ; qu’il résulte de ce qui précède qu’elle a pu en déduire, sans commettre d’erreur de droit, qu’aucune circonstance tenant à la situation des lieux ne faisait obligation à la SANEF de poser une clôture de protection à cet endroit et que celle-ci établissait dès lors l’entretien normal de l’ouvrage public ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le bovin qui a provoqué l’accident litigieux s’était échappé d’une pâture située à cinq kilomètres de l’autoroute puis avait traversé un champ cultivé dont la clôture s’était effondrée ; que les travaux d’édification de cette clôture avaient été financés par la société d’autoroute en application des dispositions de l’article 10 de la loi du 8 août 1962 imposant au maître d’ouvrage de remédier aux dommages causés par sa réalisation en participant financièrement à l’exécution d’opérations de remembrement et de travaux connexes ; que la cour, qui a relevé par une appréciation souveraine des faits que l’édification de cette clôture d’une parcelle remembrée était intervenue hors de l’emprise de l’autoroute et sans lien direct avec son exploitation, a pu en déduire sans commettre d’erreur de droit que la société autoroutière n’était pas tenue à l’entretien de cette clôture ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt en date du 22 avril 1999 de la cour administrative d’appel de Nancy ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Société des autoroutes du nord et de l’est de la France, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE à payer à la Société des autoroutes du Nord et de l’Est de la France la somme de 2 300 euros qu’elle demande au titre des frais de même nature qu’elle a exposés ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE est rejetée.

Article 2 : La CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE versera à la Société des autoroutes du Nord et de l’Est de la France une somme de 2 300 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la CAISSE REGIONALE DES ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES D’ILE-DE-FRANCE, à la Société des autoroutes du Nord et de l’Est de la France et au ministre de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

 


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