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3 avril 2000

Les fabricants de cigarettes sur la sellette

« Nul n’est censé ignorer la loi » précise l’adage bien connu des juristes. Mais encore faut-il l’appliquer ! En effet, la loi n°91-32 du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme prévoit dans son article 9 que « Chaque unité de conditionnement du tabac ou des produits du tabac doit porter selon des modalités précisées par arrêté du ministre chargé de la santé de la mention "Nuit gravement à la santé"  ». Cette disposition législative a été complétée par un arrêté du 26 avril 1991 qui prévoit que «  Toutes les unités de conditionnement du tabac et des produits du tabac portent, sur leur surface la plus visible, l’avertissement général "Nuit gravement à la santé". ». Mais, des dispositions supplémentaires ont été ajoutées en ce qui concerne les paquets de cigarettes puisque le même arrêté poursuit en indiquant que «  l’autre surface du conditionnement porte l’un des avertissements spécifiques suivants : Fumer provoque le cancer ; Fumer provoque des maladies cardio-vasculaires ; Femmes enceintes : fumer nuit à la santé de votre enfant ; Fumer nuit à votre entourage ; Pour être en bonne santé ne fumez pas.  ». Enfin, l’arrêté - afin d’éviter toute fraude des fabricants - précisait que les avertissements requis sur les deux grandes surfaces de chaque paquet de cigarettes « doivent être clairs et lisibles ; doivent être imprimés en caractères gras, sur fond contrastant ; ne doivent pas figurer à un endroit où ils risquent d’être abîmés lorsque le paquet est ouvert ; et ne doivent pas être placés sur la feuille transparente ou sur tout autre papier d’emballage extérieur au conditionnement.  ».

Face à ces prescriptions et surtout en raison des sanctions applicables en cas de violations [amende de 50.000 à 500.000 francs par infraction], les fabricants de cigarettes se sont résignés à faire figurer l’une des mentions ci-dessus mais en y apportant une modification très légère qui avait son intérêt. En effet, si vous avez à portée de main un paquet de cigarettes, il est clairement indiqué sur la face, avant ou après la mention obligation, l’indication « Selon la loi n°91-32 ». Ainsi, cette mention qui peut paraître purement superfétatoire n’est en fait qu’un moyen pour les fabricants d’atténuer la portée des messages. En effet, en insistant sur le fait qu’il s’agit de prescriptions législatives, les cigarettiers atténuent l’impact de la mention obligatoire en créant un trouble autour de celle-ci. A la question de savoir qui a établi que fumer nuit gravement à la santé, les fumeurs seraient tentés d’affirmer qu’il s’agit nullement d’un fait scientifiquement prouvé mais seulement d’une prescription législative dénuée de toute base scientifique.

C’est pour cette raison que Comité National de Lutte contre le Tabagisme [CNCT] a saisi la justice et obtenu en 1997, la condamnation d’une part du PDG de la Seita et d’autre part, trois dirigeants de la société Philip Morris en raison de la dénaturation des messages sanitaires. Le 9 février 1999, la Cour d’appel avait confirmé, pour l’une des deux affaires, les sanctions et suite au pourvoi des dirigeants, la Cour de Cassation a dû statuer sur ce problème.

Ainsi, dans deux décisions en date du 15 février 2000 - rapportés par Le Monde -, la Cour de Cassation a estimé dans l’affaire Seita que « l’infraction punie par l’article L.355-31 du Code de santé publique est caractérisée par toute modification du texte de l’avertissement  » et, dans l’affaire Philip Morris, que la mention « Selon la loi n°91-32 » constitue un «  commentaire implicite [qui] altère et dénature le sens et la portée du message voulu par la loi.  »

L’affaire concernant la Seita a été renvoyée devant la Cour d’Appel d’Orléans tandis que celle touchant à Philip Morris n’a pas été renvoyée et donc devient applicable. Concrètement, cela signifie que Philip Morris - mais également l’ensemble des cigarettiers - doivent modifier la mention sur les paquets de cigarettes afin de faire disparaître ce renvoi à la loi. Le CNCT a donné au PDG de Philip Morris un délai d’un mois à compter du 9 mars pour se mettre en conformité avec la Loi et donc supprimer ces mentions sous peine de dépôts de plainte. Comme quoi détourner la loi nuit gravement aux affaires.

 


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