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Conseil d’Etat, 5 juin 2002, n° 219339, Association technique de la réfrigération et de l’équipement ménager

L’activité de l’association, d’exercice d’une mission de service public de caractère administratif, ne saurait être regardée comme ayant pour objet de concourir à l’exploitation des entreprises représentées par les organisations professionnelles membres de l’association. Sa gestion étant désintéressée, et son activité étrangère de par les conditions de son exercice au champ de la concurrence entre entreprises commerciales, elle ne peut être regardée comme se livrant à une exploitation de caractère lucratif et n’est pas soumise à l’impôt sur les sociétés.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 219339

ASSOCIATION TECHNIQUE DE LA REFRIGERATION ET DE L’EQUIPEMENT MENAGER

M. Fabre, Rapporteur

M. Courtial, Commissaire du gouvernement

Séance du 15 mai 2002

Lecture du 5 juin 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 mars et 27 juillet 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’ASSOCIATION TECHNIQUE DE LA REFRIGERATION ET DE L’EQUIPEMENT MENAGER (A.T.R.E.M.), dont le siège est 39, avenue d’Iéna à Paris (75116) ; l’ASSOCIATION TECHNIQUE DE LA REFRIGERATION ET DE L’EQUIPEMENT MENAGER demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 18 janvier 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a rejeté sa requête aux fins de décharge des cotisations d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de chacune des années 1984 à 1986, et des cotisations de taxe d’apprentissage et de taxe sur certains frais généraux qui lui ont été assignées au titre de chacune des années 1984 à 1987 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d’Etat,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l’ASSOCIATION TECHNIQUE DE LA REFRIGERATION ET DE L’EQUIPEMENT MENAGER, l’A.T.R.E.M.
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’en vertu du 1° de l’article 206 du code général des impôts, sont passibles de l’impôt sur les sociétés toutes personnes morales "se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif’ ; qu’aux termes de l’article 224 dudit code : "1. Il est établi une taxe, dite taxe d’apprentissage... 2. Cette taxe est due : ... 2° Par les sociétés, associations et organismes passibles de l’impôt sur les sociétés en vertu de l’article 206, à l’exception de ceux désignés au 5 de l’article précité..." ; qu’enfin, l’article 235 ter T du même code, applicable au titre des années en cause dans la présente affaire, disposait que, notamment, les redevables de l’impôt sur les sociétés "doivent acquitter chaque année... une taxe sur certains frais généraux déduits de leurs résultats imposables au titre de l’année précédente"

Considérant que, par l’arrêt attaqué, la cour administrative d’appel de Paris a rejeté la requête de l’ASSOCIATION TECHNIQUE DE LA REFRIGERATION ET DE L’EQUIPEMENT MENAGER (A.T.R.E.M.) tendant à la décharge de cotisations d’impôt sur les sociétés, au titre de chacune des années 1984 à 1986, et de taxe d’apprentissage ainsi que de taxe sur certains frais généraux, au titre de chacune des années 1984 à 1987, auxquelles l’administration l’a assujettie à l’issue d’un contrôle ayant comporté la vérification de sa comptabilité, et duquel elle a conclu que l’activité de cette association devait être regardée comme revêtant un caractère lucratif ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d’appel qu’au cours des années susindiquées, l’A.T.R.E.M., association constituée entre syndicats et groupements professionnels représentatifs de l’industrie du matériel frigorifique et de l’équipement ménager, a eu pour activité d’assurer la gestion administrative et technique, qui lui était confiée par le ministre chargé de l’industrie ou par l’Association française de normalisation (AFNOR), de la procédure de certification de conformité aux normes "NF", ainsi que des études et contrôles que celle-ci requiert, en ce qui concerne diverses catégories d’appareils dont la commercialisation est réglementairement subordonnée au respect de ces normes, les recettes issues de cette activité étant constituées par les redevances mises à la charge des fabricants intéressés, selon des tarifs établis par l’AFNOR ; que cette activité, d’exercice d’une mission de service public de caractère administratif, ne saurait être regardée comme ayant pour objet de concourir à l’exploitation des entreprises représentées par les organisations professionnelles membres de l’A.T.R.E.M. ; que, par suite, en jugeant que, "nonobstant le caractère d’intérêt général de la mission confiée à la requérante" par les pouvoirs publics et l’AFNOR, l’activité de l’A.T.R.E.M. devait être regardée "comme s’exerçant dans le prolongement et dans l’intérêt de ses membres et des entreprises qu’ils regroupent, et donc revêtant elle-même un caractère lucratif", la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit ; que l’A.T.R.E.M. est, dès lors, fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête d’appel de l’A.T.R.E.M. :

Considérant qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, l’objet, d’accomplissement d’une mission de service public de caractère administratif, de l’activité qu’a exercée l’A.T.R.E.M. au cours des années d’imposition n’est pas de nature à permettre de regarder sa gestion comme indirectement "intéressée", quels que soient les avantages que la législation et la réglementation relatives à la normalisation des produits industriels peuvent apporter aux fabricants représentés par les organisations professionnelles qui sont ses membres ; qu’il n’est pas contesté par l’administration que, par ailleurs, l’A.T.R.E.M. est gérée par des administrateurs bénévoles, et maintient affectés au financement de son activité les excédents de recettes qu’elle réalise, à l’exclusion de toute allocation d’avantages à des tiers ; que sa gestion, par suite, étant désintéressée, et son activité étrangère de par les conditions de son exercice au champ de la concurrence entre entreprises commerciales, elle ne peut être regardée comme se livrant à une exploitation de caractère lucratif, au sens du 1 précité de l’article 206 du code général des impôts ; que, dès lors, c’est, comme elle le soutient, à tort que l’administration l’a, sur le fondement de ce texte, assujettie à l’impôt sur les sociétés au titre de chacune des années 1984 à 1986, et, par application des dispositions précitées des articles 224 et 235 ter T du code général des impôts, l’a soumise, en outre, à la taxe professionnelle et à la taxe sur certains frais généraux au titre de chacune des années 1984 à 1987 ;

Considérant, toutefois, qu’en vertu du 5 de l’article 206 du code général des impôts, les associations non soumises à l’impôt sur les sociétés en vertu d’une autre disposition y sont assujetties en raison, notamment, "...c. Des revenus de capitaux mobiliers dont (elles) disposent - à l’exception des dividendes des sociétés françaises - lorsque ces revenus n’entrent pas dans le champ d’application de la retenue à la source visée à l’article 119 bis...", l’article 219 bis fixant dans ce cas le taux de l’impôt à 24 % ; que le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie conclut, subsidiairement, devant le Conseil d’Etat, ainsi qu’il en a, à tout moment, la faculté, au cours de la procédure contentieuse, à ce que soient maintenus, sur le fondement légal de substitution de ces dispositions, les droits et intérêts de retard correspondant à l’impôt sur les sociétés, au taux de 24 %, dû par l’A.T.R.E.M. à raison des revenus de capitaux mobiliers dont elle a disposé au cours de chacune .des années 1984 à 1986, et qui, constitués par des intérêts de bons de caisse, d’obligations et de comptes-courants bloqués, entrent dans les prévisions du c précité du 5 de l’article 206 du code général des impôts ; que, les impositions litigieuses ayant été établies selon la procédure contradictoire, une telle substitution peut être opérée sans atteinte aux garanties conférées par la loi au contribuable ; que le ministre, dès lors, est fondé à demander que les cotisations d’impôt sur les sociétés auxquelles a été assujettie l’A.T.R.E.M. soient maintenues à concurrence de 281 571 F de droits et 56 314 F d’intérêts de retard au titre de l’année 1984, de 320 644 F de droits et 38 477 F d’intérêts de retard au titre de l’année 1985, et de 340 989 F de droits et 10 229 F d’intérêts de retard au titre de l’année 1986 ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’A.T.R.E.M. est seulement fondée à soutenir que c’est à tort que, par son jugement du 20 septembre 1994, le tribunal administratif de Paris ne lui a pas accordé la décharge de la différence entre le montant des droits et intérêts de retard auxquels elle a été assujettie, en matière d’impôt sur les sociétés, au titre de chacune des années 1984 à 1986 et les montants indiqués ci-dessus, ainsi que la décharge des cotisations de taxe d’apprentissage et de taxe sur certains frais généraux qui lui ont été assignées au titre de chacune des années 1984 à 1987 ;

Sur l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l’Etat à verser à l’A.T.R.E.M., en remboursement des frais exposés par elle devant la cour administrative d’appel de Paris et devant le Conseil d’Etat et non compris dans les dépens, la somme de 2 800 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 18 janvier 2000 est annulé.

Article 2 : Il est accordé à l’A.T.R.E.M. décharge, 1 ° de la différence entre le montant des droits et intérêts de retard auxquels elle a été assujettie en matière d’impôt sur les sociétés au titre de chacune des années 1984 à 1986 et les montants de 281 571 F de droits et 56 314 F d’intérêts de retard au titre de l’année 1984, de 320 644 F de droits et 38 477 F d’intérêts de retard au titre de l’année 1985, de 340 989 F de droits et 10 229 F d’intérêts de retard au titre de l’année 1986 ; 2° des cotisations de taxe d’apprentissage et de taxe sur certains frais généraux qui lui ont été assignées au titre de chacune des années 1984 à 1987.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 20 septembre 1994 est réformé en ce qu’il a de contraire à l’article 2 ci-dessus.

Article 4 : L’Etat versera à l’A.T.R.E.M., au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 800 euros.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par l’A.T.R.E.M. devant la cour administrative d’appel de Paris et de sa requête au Conseil d’Etat est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à l’ASSOCIATION TECHNIQUE DE LA REFRIGERATION ET DE L’EQUIPEMENT MENAGER et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

 


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