format pour impression
(imprimer)

DANS LA MEME RUBRIQUE :
Conseil d’Etat, 16 mai 2008, n° 289316, Commune de Cambon d’Albi
Conseil d’Etat, 30 avril 2003, n° 239245, M. Emad K.
Conseil d’Etat, 16 janvier 2008, n° 299831, SARL Leaurel
Conseil d’Etat, 5 décembre 2001, n° 187870, Société Office de la copropriété parisienne
Cour administrative d’appel de Nantes, 13 mars 2003, n° 99NT00643, Société rennaise de gestion immobilière
Cour administrative d’appel de Nantes, 13 mai 2003, n° 00NT00547, Ville de Rennes
Conseil d’Etat, 20 février 2008, n° 264533, Ministre de l’agriculture et de la pêche c/ D.
Conseil d’Etat, 7 mars 2008, n° 298774, Société des Hypermarchés de Normandie-Picardie et autres
Cour administrative d’appel de Nancy, 27 mars 2003, n° 00NC00501, Mme Catherine M.
Conseil d’Etat, 6 février 2008, n° 308700, Michel N.




Conseil d’Etat, 8 octobre 2008, n° 292799, Jean-Pierre C.

Le permis de démolir peut être refusé, dans ces communes, si, dans un intérêt social, il est nécessaire de sauvegarder le patrimoine immobilier bâti.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 292799

M. C.

Mme Christine Grenier
Rapporteur

M. Luc Derepas
Commissaire du gouvernement

Séance du 8 septembre 2008
Lecture du 8 octobre 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 1ère et 6ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 avril et 21 août 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Jean-Pierre C. ; M. C. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 12 janvier 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a, à la demande de M. Régis Co., d’une part, annulé le jugement du 19 février 2004 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé les arrêtés du maire de la ville de Marseille du 26 mars 2003 délivrant à celui-ci un permis de démolir et du 11 avril 2003 lui délivrant un permis de construire et, d’autre part, rejeté ses demandes présentées devant le tribunal administratif de Marseille ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel de M. Co. ;

3°) de mettre à la charge conjointement et solidairement de M. Co. et de la ville de Marseille le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christine Grenier, chargée des fonctions de Maître des requêtes,

- les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. C. et de la SCP Richard, avocat de M. Co.,

- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Co., propriétaire d’une parcelle cadastrée K n° 12 dans le quartier du Roucas-Blanc à Marseille, a obtenu un permis de démolir et un permis de construire, délivrés par arrêtés du maire de Marseille des 26 mars et 11 avril 2003, en vue de la démolition partielle et de la rénovation d’un bâtiment vétuste sis sur cette parcelle ; que, saisi par M. C., en sa qualité de voisin, le tribunal administratif de Marseille a annulé ces arrêtés par un jugement du 19 février 2004 ; que, par un arrêt du 12 janvier 2006, la cour administrative de Marseille a infirmé ce jugement et rejeté les demandes de M. C. ; que ce dernier se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant, en premier lieu, qu’en application du a) de l’article L. 430-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur, les dispositions de ce code relatives au permis de démolir sont applicables aux communes dont la population est égale ou supérieure à 10 000 habitants ; que selon le premier alinéa de l’article L. 430-5 de ce même code, le permis de démolir peut être refusé, dans ces communes, si, dans un intérêt social, il est nécessaire de sauvegarder le patrimoine immobilier bâti ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que le permis de démolir accordé à M. Co. par l’arrêté du 23 mars 2003 sur le seul fondement des dispositions mentionnées ci-dessus du code de l’urbanisme n’aurait pu être légalement refusé que pour un motif tiré de la sauvegarde du patrimoine immobilier dans un intérêt social ; que c’est par une appréciation souveraine des faits et sans commettre d’erreur de droit que la cour a estimé que les indications matérielles inexactes relatives à l’implantation et à la consistance exacte de la construction existante qu’aurait comportées le dossier de demande de permis de démolir, à les supposer établies, n’avaient pas de caractère frauduleux et ne pouvaient, par elles-mêmes, avoir une influence sur la délivrance de ce permis ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’en relevant que la demande de permis de construire présentée par M. Co. comportait des plans et des photographies indiquant l’état du bâtiment antérieur au 20 mars 2000 et l’état des lieux au mois d’octobre 2002 à la suite des travaux effectués sans autorisation régulière, que le rapprochement de ces pièces permettait au service instructeur d’être renseigné sur l’état et sur la consistance du bâtiment existant avant l’exécution de ces travaux, qu’en outre il n’était pas avéré que M. Co. aurait fourni, à l’appui de sa demande, des renseignements sciemment erronés sur l’état du bâtiment existant et qu’enfin les termes de la notice d’impact n’étaient pas de nature à induire l’administration en erreur compte tenu des autres pièces du dossier, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, n’a pas non plus entaché de dénaturation l’appréciation qu’elle a portée sur les pièces du dossier ;

Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article RUI 3 du règlement de plan d’occupation des sols de la ville de Marseille, applicable en l’espèce : " Les constructions sont desservies par des voies publiques ou privées, dont les caractéristiques, telles qu’elles se présentent au moment de l’exécution du projet, correspondent à leur destination " ; qu’après avoir relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que la parcelle litigieuse, d’une surface hors œuvre nette de 120 m² était desservie par une impasse en escalier d’1, 50 m de large ayant pour seule vocation d’assurer l’accès piéton, que les deux places de stationnement des véhicules étaient situées à proximité et non sur le terrain d’assiette du projet et que cette parcelle formait une unité foncière unique avec la parcelle K n° 13 la jouxtant, appartenant également à M. Co., et disposant d’un accès direct plus large à une voie publique, la cour a pu, sans entacher son arrêt d’erreur de droit, en déduire que la desserte de la construction en cause était conforme à sa destination ; qu’en relevant, en outre, que l’article R. UI 3 ne portait pas sur les conditions d’accès des services d’incendie et de secours, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n’a pas commis d’erreur de droit ;

Considérant, en quatrième lieu, qu’en constatant que la construction projetée était située dans un secteur largement urbanisé, sans être à proximité immédiate de la corniche Kennedy, classée voie bruyante de 1ère catégorie, et en relevant qu’il n’était pas établi que les nuisances dues au bruit auxquelles elle serait exposée présenteraient un degré de gravité tel que le maire de Marseille aurait méconnu les dispositions de l’article R. 111-3-1 du code de l’urbanisme et de l’article 11 du règlement plan d’occupation des sols en délivrant le permis de construire contesté, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, n’a pas non plus entaché de dénaturation l’appréciation qu’elle a portée sur les pièces du dossier ni commis d’erreur de droit ;

Considérant, en cinquième lieu, qu’en relevant que le service des eaux compétent avait donné un avis favorable au projet de construction et qu’il n’était pas établi que le réseau pluvial existant ne serait pas de nature à recueillir convenablement les eaux de ruissellement, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, a porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine, exempte de dénaturation ;

Considérant, enfin, que le moyen tiré de ce que la cour aurait méconnu les dispositions de l’article RUI 14 du règlement de plan d’occupation des sols de la ville de Marseille, relatif au coefficient d’occupation des sols, est nouveau en cassation ; que, n’étant pas d’ordre public, il n’est pas recevable ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. C. doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. C. le versement de la somme de 3 000 euros à M. Co. ;

D E C I D E :

Article 1er : Le pourvoi de M. C. est rejeté.

Article 2 : M. C. versera à M. Co. la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Pierre C., à M. Régis Co. et à la ville de Marseille.

 


©opyright - 1998 - contact - Rajf.org - Revue de l'Actualité Juridique Française - L'auteur du site
Suivre la vie du site