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Conseil d’Etat, 18 juin 2008, n° 277700, Maria Anahid T. et Emmanuel M.

Si l’article L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation, dans sa rédaction en vigueur à la date du jugement annulé, disposait qu’un arrêté de péril ordinaire devait être homologué par le juge administratif, les dispositions de cet article, dans leur rédaction issue de l’ordonnance du 15 décembre 2005, en vigueur depuis le 1er octobre 2006, précisent seulement que l’arrêté de péril intervient à l’issue d’une procédure contradictoire et que si le propriétaire ne réalise pas les mesures ordonnées le maire peut, après mise en demeure non suivie d’effet, les faire exécuter d’office aux frais de l’intéressé ; que l’article 7 du décret du 8 novembre 2006 relatif à la lutte contre l’habitat insalubre ou dangereux et à la sécurité des immeubles collectifs d’habitation prévoit à titre transitoire que si un arrêté de péril, pris avant le 1er octobre 2006, n’a pas, à cette date, fait l’objet d’une homologation par le tribunal administratif, il appartient au maire, s’il constate que le péril n’a pas cessé, de mettre le propriétaire en mesure de présenter des observations sur les mesures ordonnées, puis de fixer un délai pour leur exécution.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 277700

Mme T., M. M.

M. Philippe Ranquet
Rapporteur

Mme Catherine de Salins
Commissaire du gouvernement

Séance du 16 mai 2008
Lecture du 18 juin 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 4ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la section du contentieux

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 février et 17 juin 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour Mme Maria Anahid T. et M. Emmanuel M. ; Mme T. et M. M. demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler le jugement du 8 décembre 2004 par lequel le tribunal administratif de Paris a réformé l’arrêté du maire d’Issy-les-Moulineaux du 30 septembre 2002 déclarant l’immeuble sur cour sis 17, boulevard Rodin, à Issy-les-Moulineaux en état de péril ordinaire et prescrit la réalisation des travaux de réfection des planchers du bâtiment central dans un délai de deux mois et la démolition de la partie aval de ce bâtiment dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement ;

2°) réglant l’affaire au fond, de réformer l’arrêté du 30 septembre 2002 en prescrivant la réalisation de travaux de consolidation de la partie aval du bâtiment central et de constater l’exécution des travaux propres à faire cesser la situation de péril ;

3°) de mettre à la charge de la commune d’Issy-les-Moulineaux la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la construction et de l’habitation ;

Vu l’ordonnance n° 2005-1566 du 15 décembre 2005 ;

Vu le décret n° 2006-1359 du 8 novembre 2006 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Ranquet, Auditeur,

- les observations de Me Ricard, avocat de Mme T. et de M. M. et de la SCP Roger, Sevaux, avocat de la commune d’Issy-les-Moulineaux,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par un arrêté du 30 septembre 2002, le maire d’Issy-les-Moulineaux a déclaré en état de péril ordinaire l’immeuble sur cour sis 17, boulevard Rodin dans cette commune, dont Mme T. et M. M. sont copropriétaires avec deux autres personnes, et en a prescrit la démolition ; que, saisi par le maire à fin d’homologation de son arrêté sur le fondement des dispositions alors en vigueur de l’article L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation, le tribunal administratif de Paris, par le jugement attaqué du 8 décembre 2004, a réformé cet arrêté en prescrivant seulement, pour le corps principal de l’immeuble en cause, la réfection des planchers dans un délai de deux mois, et en maintenant la prescription de démolition, assortie d’un délai d’un mois, pour la partie aval de l’immeuble, constituée d’un balcon et d’une contrefiche ;

Sur le pourvoi en tant qu’il émane de Mme T. :

Considérant que le désistement de Mme T. est pur et simple ; que rien ne s’oppose à ce qu’il en soit donné acte ;

Sur le pourvoi en tant qu’il émane de M. M. :

Considérant que contrairement à ce que soutient M. M., la minute du jugement attaqué est revêtue des signatures requises par les dispositions de l’article R. 741-8 du code de justice administrative ; que le tribunal administratif n’a pas non plus entaché ce jugement d’irrégularité en se contentant de viser la note en délibéré présentée le 25 novembre 2004 pour Mme T. sans y répondre, cette note ne comportant l’exposé d’aucun moyen nouveau ;

Considérant toutefois que le juge administratif, statuant sur le fondement des dispositions de l’article L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation en vigueur à la date du jugement attaqué, ne peut ordonner la démolition d’un immeuble que s’il estime que, compte tenu son état à la date où il statue, les mesures de réparation ne remédieraient pas de façon efficace et durable aux dangers qu’il présente ou lorsque les réparations nécessaires seraient d’une importance telle qu’elles équivaudraient à une véritable reconstruction ;

Considérant que le tribunal administratif, après avoir retenu qu’il ressortait des pièces du dossier et notamment de l’expertise qu’il avait ordonnée que la partie aval du bâtiment devait être soit démolie, soit consolidée dans les plus brefs délais, s’est borné à déduire de l’état de cette partie du bâtiment qu’elle devait être démolie, sans rechercher si des réparations n’étaient pas également de nature à remédier au péril ; qu’il a ainsi commis une erreur de droit ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, que si M. M. n’est pas fondé à demander l’annulation dans son ensemble du jugement du tribunal administratif de Paris du 8 décembre 2004, il est en revanche fondé à en demander l’annulation en tant qu’il prescrit la démolition de la partie aval du bâtiment ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond par application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, dans les limites de la cassation prononcée ;

En ce qui concerne la demande d’homologation présentée par la commune d’Issy-les-Moulineaux :

Considérant que si l’article L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation, dans sa rédaction en vigueur à la date du jugement annulé, disposait qu’un arrêté de péril ordinaire devait être homologué par le juge administratif, les dispositions de cet article, dans leur rédaction issue de l’ordonnance du 15 décembre 2005, en vigueur depuis le 1er octobre 2006, précisent seulement que l’arrêté de péril intervient à l’issue d’une procédure contradictoire et que si le propriétaire ne réalise pas les mesures ordonnées le maire peut, après mise en demeure non suivie d’effet, les faire exécuter d’office aux frais de l’intéressé ; que l’article 7 du décret du 8 novembre 2006 relatif à la lutte contre l’habitat insalubre ou dangereux et à la sécurité des immeubles collectifs d’habitation prévoit à titre transitoire que si un arrêté de péril, pris avant le 1er octobre 2006, n’a pas, à cette date, fait l’objet d’une homologation par le tribunal administratif, il appartient au maire, s’il constate que le péril n’a pas cessé, de mettre le propriétaire en mesure de présenter des observations sur les mesures ordonnées, puis de fixer un délai pour leur exécution ; que ces dispositions s’appliquent à l’arrêté du maire d’Issy-les-Moulineaux du 30 septembre 2002, lequel, en conséquence de l’annulation prononcée ci-dessus, doit être regardé comme n’ayant jamais fait l’objet d’une homologation en tant qu’il concerne la partie aval du bâtiment ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions qu’à la date de la présente décision, le juge administratif n’a plus le pouvoir d’homologuer un arrêté de péril ordinaire ; que, par suite, il n’y a plus lieu de statuer sur la demande de la commune d’Issy-les-Moulineaux tendant à l’homologation de l’arrêté du 30 septembre 2002, qui a perdu son objet dans la mesure où l’arrêté concerne la partie aval du bâtiment ;

En ce qui concerne les conclusions de MM. Emmanuel et Laurent M. tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté de péril :

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que l’arrêté du 30 septembre 2002 mentionne les voies et délais de recours et a été notifié à l’ensemble des copropriétaires de l’immeuble, au plus tard, le 31 octobre 2002 ; que les conclusions présentées le 5 mars 2004 pour MM. Emmanuel et Laurent M. et tendant à l’annulation de cet arrêté ont ainsi été présentées après l’expiration du délai de recours de deux mois ; qu’elles sont, par suite, irrecevables ;

Considérant qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, les dispositions de l’article 7 du décret du 8 novembre 2006 s’appliquent à l’arrêté litigieux, en tant qu’il concerne la partie aval du bâtiment ; qu’elles imposent au maire de constater la persistance du péril et d’inviter les propriétaires intéressés à présenter leurs observations avant, le cas échéant, de fixer un délai pour l’exécution des mesures prescrites ; que cette dernière décision sera susceptible d’être déférée au contrôle du juge de l’excès de pouvoir et qu’à l’occasion de ce litige l’illégalité de l’arrêté de péril pourra être invoquée par la voie de l’exception ; que dans ces conditions, M. M. n’est en tout état de cause pas fondé à soutenir que l’irrecevabilité ainsi opposée aux conclusions pour excès de pouvoir qu’il a présentées dans le cadre de l’instance introduite par la commune d’Issy-les-Moulineaux aux fins d’homologation de l’arrêté du 30 septembre 2002 porterait atteinte au principe de sécurité juridique et au droit à un procès équitable garanti par l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les conclusions de MM. Emmanuel et Laurent M. devant le tribunal administratif de Paris tendant à l’annulation de l’arrêté du 30 septembre 2002 doivent être rejetées ;

Sur les frais d’expertise ordonnée avant dire droit par le tribunal administratif de Paris :

Considérant qu’il y a lieu de mettre à la charge de la commune d’Issy-les-Moulineaux les frais d’expertise qui ont été taxés et liquidés à la somme de 863 euros ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que la commune d’Issy-les-Moulineaux s’est purement et simplement désistée de ses conclusions à ce titre, en tant qu’elles sont dirigées contre Mme T. ; que rien ne s’oppose à ce qu’il en soit donné acte ;

Considérant qu’il n’y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, ni de mettre à la charge de M. M. la somme demandée au titre de ces dispositions par la commune d’Issy-les-Moulineaux, ni de mettre à la charge de cette commune les sommes demandées par M. M. au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de Mme T. ainsi que du désistement de la commune d’Issy-les-Moulineaux de ses conclusions au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, en tant qu’elles sont dirigées contre Mme T..

Article 2 : Le jugement du 8 décembre 2004 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu’il prescrit la démolition de la partie aval du bâtiment sur cour sis 17, boulevard Rodin, à Issy-les-Moulineaux.

Article 3 : Il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de la commune d’Issy-les-Moulineaux tendant à l’homologation de l’arrêté de son maire du 30 septembre 2002, en tant qu’il concerne la partie aval du même bâtiment.

Article 4 : Les conclusions de MM. Emmanuel et Laurent M. devant le tribunal administratif de Paris tendant à l’annulation de ce même arrêté sont rejetées.

Article 5 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. M. est rejeté.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la commune d’Issy-les-Moulineaux au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 7 : Les frais d’expertise, taxés et liquidés à la somme de 863 euros, sont mis à la charge de la commune d’Issy-les-Moulineaux.

Article 8 : La présente décision sera notifiée à Mme Maria Anahid T., à M. Emmanuel M. et à la commune d’Issy-les-Moulineaux.

 


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