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Conseil d’Etat, 27 février 2004, n° 250012, Tony M. 

Il est loisible au Conseil supérieur de la magistrature et au garde des sceaux de rendre publics les critères qui les guident pour les nominations et les mutations de magistrats, dans le respect du principe d’égalité et compte tenu d’objectifs légitimes tels qu’une plus grande mobilité des personnes concernées ou une meilleure adéquation des profils aux emplois. Toutefois, en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires expresses, l’application de ces critères ne saurait en aucun cas conduire à fixer des règles nouvelles ou à écarter le principe selon lequel il revient aux autorités administratives de se livrer à un examen particulier des données propres à chaque dossier.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 250012

M. M.

M. Dacosta
Rapporteur

M. Lamy
Commissaire du gouvernement

Séance du 2 février 2004
Lecture du 27 février 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 6ème et 1ère sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 6ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Tony M. ; M. M. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir le décret du 28 juin 2002 portant nomination de magistrats en tant qu’il ne le nomme pas président de chambre hors-hiérarchie ;

2°) d’enjoindre au Conseil supérieur de la magistrature de donner un avis favorable à sa nomination hors-hiérarchie, au garde des sceaux, ministre de la justice, de proposer cette nomination et au Président de la République de procéder à cette nomination ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa candidature, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

3°) d’enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de procéder à la reconstitution de sa carrière au 1er janvier 2002 ;

4°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 800 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré présentée le 5 février 2004 pour M. M. ;

Vu l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

Vu le décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Dacosta, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet avocat de M. M.,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre ;

Considérant que le moyen tiré de ce que la délibération du 29 mai 2002 au cours de laquelle le Conseil supérieur de la magistrature a donné son avis sur les nominations envisagées aurait été entachée d’irrégularités n’est assorti d’aucune précision permettant d’en apprécier le bien-fondé ;

Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 3 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 dans la rédaction qui lui a été donnée par la loi organique du 25 juin 2001 : "Sont placés hors-hiérarchie :/ (.) 3°) Les présidents de chambre des cours d’appel et les avocats généraux près lesdites cours (.)" ; que ces dispositions ont pour seul objet, ainsi qu’il résulte d’ailleurs des travaux préparatoires à leur adoption, et pour seul effet de classer hors-hiérarchie les emplois qu’elles mentionnent, et non de placer hors-hiérarchie les personnes qui occupent ces emplois ; qu’au demeurant, aux termes de l’article 17 du décret du 7 janvier 1993 qui ne fait que tirer les conséquences de ces dispositions : "Si le niveau de l’emploi occupé ou de la fonction exercée par un magistrat est modifié, le magistrat concerné conserve son grade et sa rémunération" ; qu’ainsi l’accès à la hors-hiérarchie de chacune des personnes qui occupent les emplois mentionnés à l’article 3 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 est subordonné à l’intervention d’une décision individuelle procédant à une telle nomination ; que la double circonstance que M. M. exerçait les fonctions de président de chambre d’une cour d’appel et remplissait la condition, exigée par l’article 7 de l’ordonnance du 22 décembre 1958, d’avoir exercé deux fonctions lorsqu’il était au premier grade, n’imposait pas au ministre de la justice de nommer hors-hiérarchie l’intéressé ; qu’ainsi M. M., qui n’a pas été personnellement placé hors-hiérarchie, ne peut prétendre bénéficier du traitement afférent aux emplois de ce grade ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. M. soutient que le Conseil supérieur de la magistrature, dont l’avis conforme est requis préalablement à la nomination des magistrats du siège, et le ministre de la justice, qui propose ces nominations au Président de la République, se seraient interdit, par principe, de nommer hors-hiérarchie, sur place, les magistrats qui occupent leur emploi depuis moins de deux ans, créant ainsi, par cette exigence de mobilité, une condition nouvelle d’accès à la hors-hiérarchie non prévue par l’ordonnance du 22 décembre 1958 ;

Considérant qu’il est loisible au Conseil supérieur de la magistrature et au garde des sceaux de rendre publics les critères qui les guident pour les nominations et les mutations de magistrats, dans le respect du principe d’égalité et compte tenu d’objectifs légitimes tels qu’une plus grande mobilité des personnes concernées ou une meilleure adéquation des profils aux emplois ; que, toutefois, en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires expresses, l’application de ces critères ne saurait en aucun cas conduire à fixer des règles nouvelles ou à écarter le principe selon lequel il revient aux autorités administratives de se livrer à un examen particulier des données propres à chaque dossier ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que si le Conseil supérieur de la magistrature et le ministre de la justice ont établi des critères visant à favoriser la mobilité des magistrats, ces critères n’ont pas été systématiquement mis en œuvre par les auteurs du décret attaqué qui ont examiné la situation individuelle de chacun des magistrats concernés ; qu’il en résulte que M. M., qui occupait son emploi depuis moins de deux ans, n’est pas fondé à soutenir que le Conseil supérieur de la magistrature et le ministre de la justice auraient méconnu l’étendue de leur pouvoir en se référant à une "doctrine" illégale pour refuser de le placer hors-hiérarchie et n’auraient pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

Considérant, en troisième lieu, que M. M. ne peut utilement soutenir que d’autres critères de nomination auraient été illégalement mis en œuvre par les auteurs du décret attaqué, dès lors que ces critères ne sont pas applicables à sa situation ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. M. n’est pas fondé à demander l’annulation du décret du 28 juin 2002 en tant qu’il ne le nomme pas hors-hiérarchie ; que sa requête doit, dès lors, être rejetée, ainsi que ses conclusions à fins d’injonction et celles tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. M. est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Tony M. et au garde des sceaux, ministre de la justice.

 


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