CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 281405
Société à responsabilité limitée T.B.F.
M. Yves Salesse
Rapporteur
Mme Claire Landais
Commissaire du gouvernement
Séance du 19 décembre 2007
Lecture du 28 mars 2008
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 10ème sous-section de la section du contentieux
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 juin et 7 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la société à responsabilité limitée T.B.F., dont le siège est 30-32, boulevard de Sébastopol à Paris (75004), représentée par son gérant en exercice ; la SARL T.B.F. demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 11 avril 2005 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement du 1er février 2001 du tribunal administratif de Limoges rejetant sa demande en décharge des amendes auxquelles elle a été assujettie pour un montant total de 915 000 francs sur le fondement des dispositions de l’article 1768 du code général des impôts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention d’établissement entre la France et la République de Saint-Marin du 15 janvier 1954 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Yves Salesse, Conseiller d’Etat,
les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SARL T.B.F.,
les conclusions de Mme Claire Landais, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SARL T.B.F., qui a pour activité la distribution exclusive en France de produits de la société TITAN BAGNO, domiciliée à Saint-Marin, a versé à cette société des redevances en rémunération de prestations d’assistance et de conseil utilisées en France ; qu’à la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale a appliqué à la SARL T.B.F. l’amende alors en vigueur prévue à l’article 1768 du code général des impôts au titre des exercices clos en 1993, 1994 et 1995 au motif qu’elle n’avait pas opéré sur ces redevances la retenue à la source mentionnée au c du I de l’article 182 B du même code ;
Considérant qu’aux termes de l’article 182 B du code général des impôts : " I. Donnent lieu à l’application d’une retenue à la source lorsqu’ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés, qui n’ont pas dans ce pays d’installation professionnelle permanente : (.) / c. Les sommes payées en rémunération des prestations de toute nature fournies ou utilisées en France (.) " ; qu’aux termes de l’article 7 de la convention d’établissement conclue le 15 janvier 1954 entre la France et la République de Saint-Marin : " Sous réserve des dispositions contenues dans les accords de double imposition conclus ou à conclure, les ressortissants de chacune des hautes parties contractantes ne seront pas assujettis, sur le territoire de l’autre partie, à des droits, taxes, impôts ou contributions, sous quelque dénomination que ce soit, autres ou plus élevés que ceux qui seront perçus sur les nationaux (.) " ;
Considérant qu’une société française peut ne disposer en France d’aucune installation professionnelle permanente mais exercer ses activités par l’intermédiaire d’installations professionnelles permanentes implantées à l’étranger ; que dans ces conditions la retenue à la source prévue par l’article 182 B du code général des impôts s’appliquerait aux sommes versées à ces installations à l’étranger en rémunération des prestations fournies ou utilisées en France ; qu’ainsi, en jugeant, pour écarter le moyen tiré de ce que l’article 7 de la convention du 15 janvier 1954 ferait obstacle à l’application de l’article 182 B, que la retenue à la source instituée par ce dernier article était fondée, s’agissant des personnes morales, non pas sur le lieu de leur siège social mais sur le lieu d’implantation de leurs installations professionnelles permanentes et par suite ne méconnaissait pas la clause de la convention interdisant les discriminations en fonction de la nationalité, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit ; qu’elle a pu en déduire que la SARL T.B.F., à défaut d’avoir procédé à la retenue à la source prévue par l’article 182 B, était passible de l’amende mentionnée à l’article 1768 du même code ; que dès lors, la SARL T.B.F. n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL T.B.F. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SARL T.B.F. et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.