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4 avril 2000

Le droit des héritiers à réparation

Par un récent arrêt, le Conseil d’Etat a opéré un revirement à propos du droit des héritiers à obtenir des dommages-intérêts pour les dommages subis par la personne décédée. Afin de mieux cerner le problème, commençons par un bref résumé de l’histoire. M. Jacquié avait été contaminé par le virus de l’hépatite C à l’occasion d’une intervention subie au mois de juin 1983 à l’Hôpital Avicenne de Paris. Deux mois après les transfusions, le patient avait découvert qu’il souffrait d’une hépatite aiguë. En avril 1990, à la suite d’une aggravation de sa santé, les médecins avaient été capable d’identifier une contamination par le virus de l’hépatite C.

Le patient décéda en décembre 1990 des suites d’une cirrhose du foie, complication traditionnelle de cette infection. Seulement, ce dernier n’avait engagé, à la date de son décès, aucune action en responsabilité dirigée contre l’Assistance Publique. C’est alors que ses héritiers ont intenté une action devant le Tribunal Administratif de Paris et ont demandé réparation du dommage matériel et moral subi par M. Jacquié à la suite de sa contamination. Le Tribunal les débouta de leur demande en décembre 1994 au motif qu’il n’existait aucun droit à réparation des souffrances physiques et morales puisque aucune demande d’indemnisation n’avait été formulée du vivant de la victime. Seulement la Cour Administrative d’Appel dans un arrêt d’Octobre 1995 ne suivit pas ce raisonnement et accorda une indemnité.

Le Conseil d’Etat, statuant en qualité de juge de cassation, fût donc amené à trancher la question. Dans un arrêt rendu en Section le 29 mars 2000 [publié prochainement], la Haute juridiction administrative a estimé : « que le droit à la réparation d’un dommage, quelle que soit sa nature, s’ouvre à la date à laquelle se produit le fait qui en est directement la cause ; que si la victime du dommage décède avant d’avoir elle-même introduit une action en réparation, son droit, entré dans son patrimoine avant son décès, est transmis à ses héritiers ; qu’il suit de là que la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que le droit à réparation des préjudices tant matériels que personnels subis par M. Jacquié est entré dans le patrimoine de ses héritiers alors même que M. Jacquié n’avait, avant son décès, introduit aucune action tendant à la réparation de ces préjudices  »

Ainsi, la juridiction administrative a décidé de s’aligner sur la jurisprudence judiciaire de la Cour de Cassation et notamment a fait la distinction entre le préjudice moral et sa réparation. En effet, il est de jurisprudence judiciaire constante que le préjudice moral est extrapatrimonial et donc intransmissible alors que le droit à réparation de ce préjudice est un droit à indemnités pouvant être transmis par la victime à ses héritiers lors de son décès. Mais, en plus de ce revirement, il faut relever que la décision a été rendue sur conclusions contraires du Commissaire du Gouvernement. En effet, Didier Chauvaux avait estimé que «  si la solution appliquée jusqu’à présent n’est pas à l’abri de toute critique, [ la solution opposée ] consistant à permettre systématiquement aux héritiers de percevoir l’indemnité due à leur auteur, suscite également des objections portant à la fois sur des conditions concrètes de son application et sur son principe même.  ». Il estimait en outre que l’octroi d’une indemnité aux héritiers suscite des réticences morales persistantes.

Cette solution a le mérite de s’aligner - une nouvelle fois - sur la jurisprudence judiciaire. La distorsion de jurisprudence en matière de responsabilité médicale continue à se combler au fur et à mesure que le Conseil d’Etat rend ses décisions, ce qui ne peut être que profitable aux victimes.

 


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