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9 août 2002

Le Conseil d’Etat autorise le paiement direct par les candidats des menues dépenses électorales

Par une décision du 8 juillet 2002 (Elections municipales de Rambouillet, n° 241053), le Conseil d’Etat s’est aligné sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel autorisant - sous certaines conditions - le candidat à payer directement certaines faibles dépenses engagées dans le cadre de sa campagne électorale.

Aux termes de l’article L. 52-4 du Code électoral, toutes les dépenses engagées par un candidat sont soumises à un formalisme très précis. En effet, ce dernier doit systématiquement "recourir à une association de financement électorale ou à un mandataire financier, il ne peut régler les dépenses occasionnées par sa campagne électorale que par leur intermédiaire".

Cette disposition tend donc à interdire à tout candidat de payer directement les dépenses engagées. Néanmoins, cette interprétation fait l’objet depuis plusieurs années d’une différence d’appréciation de la part du Conseil constitutionnel et du Conseil d’Etat.

Les juges de l’aile Montpensier ont posé une certaine tolérance offrant la possibilité pour les candidats d’acquitter directement les dépenses afférentes à sa campagne dès lors que cela représente une proportion minime. Dans une décision du 6 février 1998 (n° 97-2209, AN Var 1ère circ), le Conseil constitutionnel a eu l’occasion d’indiquer que "si le candidat peut, pour des raisons pratiques, régler directement certaines dépenses, cet usage ne peut être toléré que si ces dépenses restent d’un montant modeste". Prenant en compte ce caractère minime de la dépense, le juge avait sanctionné un candidat qui avait pris en charge directement, et sans avoir recours à son mandataire financier, près de 60% de ses dépenses (Décision n° 97-2209 du 6 février 1998, AN Var 1ère circ) ou, environ 50% de ces dernières (Décision n° 2000-2584 du 30 mai 2000, AN Paris 21ème circ.).

Par la suite, le Conseil constitutionnel est venu affiner cette jurisprudence par une décision du 20 septembre 2001 (n° 2001-2593, AN Haute-Garonne 1ère circ.). Le juge affirme en effet que "si le règlement direct par le candidat, pour des raisons pratiques, de menues dépenses peut être toléré, ce n’est que dans la mesure où leur montant global est faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l’article L. 52-11 du code électoral". Ainsi, les dépenses ainsi payées directement par le candidat sont appréciées doublement : tout d’abord le montant doit être faible par rapport à l’ensemble des dépenses mais également négligeable (donc encore plus faible) par rapport au plafond des dépenses. Jean-Eric Schoettl précisait ainsi dans un commentaire sous cette décision que le montant des dépenses directement réglées par le candidat devait être inférieur à 1% du plafond autorisé dans la circonscription.

Mais également, le commentateur autorisé indiquait que ces dépenses devaient être évaluées qualitativement, c’est à dire qu’elles "doivent être périphériques à la campagne". Ainsi, seules ces dernières peuvent être payées sans le passage obligatoire par le mandataire financier. Il peut ainsi s’agir des dépenses indirectement liées à la campagne comme le paiement d’un repas à l’équipe de campagne, la réalisation du plein du véhicule utilisé au cours des déplacements. Les dépenses directement liées à la campagne comme l’impression des tracts ou la tenue des réunions électorales seraient, sans doute, considérées comme non périphériques à la campagne et un paiement direct pourrait s’analyser en une violation de l’article L. 52-4 du Code électoral.

Pour sa part le Conseil d’Etat a suivi un chemin plus strict. Dans une décision du 28 juillet 2000 (Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques c/ Mme Marie-Gabrielle Marguerite , n° 207461), les juges du Palais Royal avaient estimé qu’"en raison de la finalité poursuivie par ces dispositions, l’obligation de recourir à un mandataire pour toute dépense effectuée en vue de la campagne constitue une formalité substantielle à laquelle il ne peut être dérogé". Le juge avait en conséquence sanctionné le paiement direct par la candidate de certaines dépenses engagées au cours de sa campagne.

Revenant partiellement sur cette solution, le Conseil d’Etat a tout d’abord réaffirmé dans sa décision du 8 juillet 2002 que le paiement par un mandataire financier est une formalité substantielle à laquelle "il ne peut être, en principe, dérogé". Ce principe, annonciateur de l’éternelle exception tant aimée des juristes, trouve sa limite dans le fait que "le règlement direct de menues dépenses par le candidat tête de liste ou par ses colistiers ne peut être admis qu’à la double condition que leur montant soit faible tant par rapport au total des dépenses du compte de campagne qu’au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l’article L. 52-11 du code électoral".

Le juge administratif suprême transpose donc la solution préalablement adoptée par le Conseil constitutionnel et encadre donc qualitativement et quantitativement les dépenses réglées directement par le candidat. En l’espèce, le juge sanctionne le paiement direct des dépenses afférentes à l’impression des tracts au motif "que ces seules dépenses, à supposer même que leur montant soit négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées en vue des élections au conseil municipal de Rambouillet, représentent, en tout état de cause, près des deux tiers du total des dépenses retracées par le compte de campagne".

Ce revirement permet donc de mettre fin à la divergence entre les jurisprudences des deux ailes du Palais Royal. Doit-on pour autant prévoir une évolution plus poussée dans le futur ? Jean-Eric Schoettl dans son commentaire aux Cahiers du Conseil constitutionnel (Vol. 11, p. 23) le refuse. En effet, indique-t-il, "ce serait ouvrir la porte à des fraudes, car les ressources personnelles du candidat, à la différence de son compte de campagne, ne peuvent faire l’objet d’investigations ni de la part de la CCFP, ni de celle du Conseil constitutionnel". (BT)

 


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