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14 novembre 2001

Quelle autorité accorder aux décisions du Conseil constitutionnel ?

Par un arrêt quasi-historique de l’Assemblée plénière de la Cour de cassation du 10 octobre 2001, le juge judiciaire suprême a estimé que, en dehors de la procédure existante devant la Haute Cour de Justice pour les actes de haute trahison, les juridictions pénales de droit commun ne peuvent exercer aucune poursuite pénale à l’encontre du chef de l’Etat pendant son mandat présidentiel, la prescription de l’action publique étant alors suspendue. Nous ne reviendrons pas sur ce point, mais plutôt sur les éléments fournis dans sa construction juridique par la Haute Assemblée.

L’article 62 de la Constitution de 1958 précise que "Les décisions du Conseil Constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles". Sur le fondement de cette disposition, les juges d’instruction se sont déclarés incompétents pour procéder à l’acte d’information vis-à-vis du chef de l’Etat sollicité.

En effet, d’une part, aux termes de l’article 68 de la Constitution, le Président de la République n’est responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions qu’en cas de haute trahison, et d’autre part, selon l’interprétation que donne de ce texte la décision du 22 janvier 1999 du Conseil constitutionnel, "au surplus, pendant la durée de ses fonctions, sa responsabilité pénale ne peut être mise en cause que devant la Haute Cour de justice, selon les modalités fixées par le même article".

Les juges ont donc estimé que ce dernier membre de phrase est un des motifs qui fondent la décision du Conseil constitutionnel, dont, en vertu de l’article 62 de la Constitution, les décisions s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et judiciaires. Dès lors, tant l’article 68 de la Constitution que la décision du 22 janvier 1999 du Conseil constitutionnel excluent la mise en mouvement, par l’autorité judiciaire de droit commun, de l’action publique à l’encontre d’un Président de la République dans les conditions prévues par le Code de procédure pénale, pendant la durée du mandat présidentiel.

Il s’agissait donc d’une application pure et simple par les juges d’instruction des motifs de la décision du Conseil constitutionnel. Seulement, la Cour de cassation a censuré cette position. En effet, dans l’arrêt du 10 octobre 2001, elle affirme que "si l’autorité des décisions du Conseil constitutionnel s’attache non seulement au dispositif, mais aussi aux motifs qui en sont le soutien nécessaire, ces décisions ne s’imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives et juridictionnelles qu’en ce qui concerne le texte soumis à l’examen du Conseil".

Plus simplement, le caractère obligatoire d’une décision rendue par le Conseil constitutionnel ne s’applique que dans le cadre du texte censuré ou validé par ladite décision. Ainsi, dans le cas particulier, la Cour de cassation indique que "la décision du 22 janvier 1999 n’a statué que sur la possibilité de déférer le Président de la République à la Cour pénale internationale pour y répondre des crimes de la compétence de cette Cour ; qu’il appartient, dès lors, aux juridictions de l’ordre judiciaire de déterminer si le Président de la République peut être entendu en qualité de témoin ou être poursuivi devant elles pour y répondre de toute autre infraction commise en dehors de l’exercice de ses fonctions".

Cette position semble restreindre de manière considérable la portée de l’article 62 de la Constitution. En effet, selon la Cour de cassation, l’ensemble des principes dégagés par le juge constitutionnel et l’ensemble des interprétations des dispositions constitutionnelles ont un caractère fortement limité. Ils ne s’imposent aux autres autorités que dans le cadre de l’application d’un texte.

Cette décision nie donc tout pouvoir d’interprétation "absolu" au Conseil constitutionnel des normes constitutionnelles. Ces interprétations ne seraient donc valables que par rapport à un texte particulier. Cela signifierait donc en substance et en allant jusqu’au bout de la logique, qu’un même article de notre loi fondamentale pourrait avoir deux significations.

Cette solution est assez critiquable. Il est vrai que constitutionnellement, seul le Président de la République a l’obligation de veiller au respect de notre loi fondamentale. Mais, au final, ce sont les 9 sages de la rue Montpensier qui interpréteront naturellement la règle jurisprudentielle. C’est donc en toute logique juridique, que leur interprétation ne doit pas être réduite à l’application d’une disposition particulière, mais revêtir un caractère plus absolu. (BT)

 


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