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19 mai 2002

Décision n° 88-D-11 du 15 mars 1988 relative à la situation de la concurrence sur le marché des audioprothèses

LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE,

Vu la lettre du 22 octobre 1985 par laquelle le ministre de l’économie, des finances et du budget a saisi la commission de la concurrence de pratiques anticoncurrentielles relevées sur le marché des audioprothèses  ;

Vu les ordonnances n° 45-1483 et 45-1484 du 30 juin 1945, modifiées, relatives respectivement aux prix et à la constatation, la poursuite et la répression des infractions à la législation économique ,

Vu l’ordonnance n°86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, modifiée, ensemble le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 pris pour son application ;

Vu les articles L. 510-1 à L. 510-8 du code de la santé publique ;

Vu les pièces du dossier

Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les parties entendus ;

Retient les constatations (I) et adopte la décision (II) ci-après exposées :

I. - Constatations

A. - Les caractéristiques du marché

Au début des années 1980, la France comptait environ 3,8 millions de malentendants. Mais on estimait que 10 à 13 p. 100 seulement portaient un appareil de correction acoustique, soit près de trois fois moins qu’en Grande-Bretagne et en République fédérale d’Allemagne, et près de deux fois moins qu’en Belgique et aux Pays-Bas.

La demande annuelle d’appareillages oscillait alors entre 70 000 et 80 000. Cependant, une progression régulière a permis de franchir le seuil des 100000 unités en 1985. Cette évolution s’explique essentiellement par la moindre tolérance du handicap de la surdité dans la société contemporaine chez les intéressés, et par le perfectionnement esthétique et technologique des audioprothèses, notamment avec les «  intra-auriculaires », qui ont contribué à réduire les préventions antérieures.

Toutefois, le développement des appareillages demeurait freiné par le coût des audioprothèses : entre 2 000 F et 5 000 F en 1984, alors que les remboursements de la sécurité sociale, non réévalués depuis 1970, s’élevaient à la même époque à 736 F l’unité pour une prise en charge à 100 p. 100, et à 515 F avec un ticket, modérateur de 30 p. 100, la stéréophonie n’étant remboursée que jusqu’à seize ans.

Il faut attendre un arrêté interministériel du 18 février 1986, pour que soient décidés le doublement des remboursements susmentionnés pour les adultes, et pratiquement un remboursement intégral en faveur des enfants. Si cette mesure est de nature à stimuler la demande d’audioprothèses, ses effets sont postérieurs à la période envisagée, qui couvre les années 1978 à 1985.

A cette époque, le marché des audioprothèses se caractérisait ainsi par son étroitesse relative, une croissance modérée, avec cependant un potentiel très important à conquérir.

B. - Les caractéristiques du secteur professionnel

1° Les appareils de correction acoustique sont distribués aux audioprothésistes par une dizaine de fabricants importateurs, dont les parte de marché s’échelonnent entre 5 p. 100 et 15 p. 100.

Parmi ces entreprises figurent deux sociétés françaises la Société d’approvisionnement de la fédération française de l’audition (Sarffa), qui n’est pas mise en cause dans la présente affaire, et Cafa-Audibel, née en 1985 de la fusion du Centre audiométrique franco-américain et d’Audibel, filiale de Philips.

Toutes les autres entreprises sont des Filiales de sociétés étrangères, représentant des intérêts danois (Acourex, Danavox, Oticon), suisses (Phonak, Rexton-Medical), allemands (Audipha acoustique), américains (Novason-Starkey), néerlandais (Massiot-Philips) et autrichiens (Viennatone).

En 1981, ces Filiales ont créé la section audiophonologique du syndicat des industriels de l’électronique médicale et de la radiologie (Semrad), auquel a succédé le Syndicat national de l’industrie des technologies médicales (Snitem) le 1er janvier 1987.

2° Les audioprothésistes proprement dits sont membres d’une profession réglementée par la loi n° 67-4 du 3 janvier 1967, dont les dispositions ont été intégrées aux articles L. 510-1 à L.510-8 du code de la santé publique.

« Est considérée comme exerçant la profession d’audioprothésiste toute personne qui procède à l’appareillage des déficients de l’ouïe. » Chaque appareillage demeure soumis à prescription médicale préalable et obligatoire.  Mais au-delà, l’audioprothésiste conserve l’entière responsabilité du choix, de l’adaptation, de la délivrance, du contrôle d’efficacité immédiate et permanent de la prothèse auditive et de l’éducation prothétique du déficient de l’ouïe appareillée.

« Nul ne peut exercer la profession d’audioprothésiste s’il n’est titulaire du diplôme d’Etat (spécial) ou du diplôme d’Etat de docteur en médecine. » Comme pour d’autres professions paramédicales, l’activité « ne peut être exercée que dans un local réservé à cet effet et aménagé selon les conditions Fixées par décret... », et les audioprothésistes sont astreints au secret professionnel.

La profession compte environ un millier d’audioprothésistes, dont près de 800 exercent à titre « libéral  », avec inscription au registre du commerce, et le plus souvent en complément de leur profession principale d’opticiens (60 p. 100), ou de pharmaciens (30 p. 100), compte tenu d’un seuil de rentabilité évalué à 250 appareillages par an.

C’est parmi les audioprothésistes commerçants que se recrutent la plupart des membres des trois syndicats professionnels existants : la Fédération nationale des audioprothésistes français (F.N.A.F.), le Syndicat national unifié des audioprothésistes (S.N.U.A.) et l’Association des audioprothésistes français (A.A.F.). Depuis avril 1985, ces organisations sont fédérées au sein de l’Union nationale des syndicats d’audioprothésistes français (U.N.S.A.F.).

Les audioprothésistes salariés exercent soit dans des établissements commerciaux, soit dans des établissements publics ou privés dl assistance et de soins aux malentendants.  Ces établissements comprennent des établissements scolaires, des hôpitaux, des centres d’action médico-sociale précoce (C.A.M.S.P.), des dispensaires, des centres de soins publics ou privés spécialisés et des associations diverses d’aide aux malentendants, telle l’Association pour l’aide aux malentendants de l’Ouest (A.P.A.M.O.), qui a intenté un procès pénal à un fabricant-importateur pour refus de vente d’audioprothèses.

Dans la pratique, les difficultés les plus nombreuses sont nées avec les organismes de traitement et d’éducation des enfants et adolescents sourds. On en dénombre environ 180. Près des deux tiers sont constitués par des écoles comportant une ou plusieurs classes d’enfants sourds, où la présence d’un audioprothésiste n’est pas systématique, et par des établissements publics nationaux : à Paris, Metz, Chambéry et Gradignan, ou départementaux : à Clermont-Ferrand, Nantes, Asnières et Lille.

Une soixantaine d’établissements privés fonctionnent dans les conditions fixées par le décret n° 70-1332 du 16 décembre 1970, modifiant l’annexe XXIV du décret du 9 mars 1956 et la complétant par une annexe XXIV quater, relative aux conditions techniques d’agrément des établissements recevant des enfants ou adolescents atteints de déficiences sensorielles graves.  Ces établissements sont liés par convention avec une caisse régionale d’assurance-maladie (C.R.A.M.) ou, le plus souvent, avec une direction départementale de l’action sanitaire et sociale (D.D.A.S.S.).

Quel que soit leur régime juridique et financier, les organismes accueillant des enfants sourds ne prennent généralement pas en charge le coût des audioprothèses, qui est supporté par les familles au-delà des remboursements de la sécurité sociale. En principe, ils ne fournissent pas non plus les appareils de correction acoustique, qui doivent être achetés auprès d’audioprothésistes commerçants indépendants des établissements, ou en relation avec eux pour l’adaptation.

Cette situation a paru illogique pour trois raisons : éducative tout d’abord, car on a montré que l’appareillage des enfants et adolescents atteignait son efficacité optimale lorsqu’il s’intégrait dans le processus d’éducation globale dont les établissements ont la charge ; technique ensuite, parce que ces derniers disposent d’audioprothésistes diplômés, ainsi que des locaux et du matériel nécessaire à l’appareillage : économique enfin, dès lors que l’appareillage extérieur entraîne un surcoût pour les familles, correspondant à la marge bénéficiaire des audioprothésistes commerçants, laquelle représentait de 26,30 p. 100 à 43,98 p. 100 du prix de vente des audioprothèses aux familles dans le cas du centre d’Argenteuil, et de 80,5 p. 100 à 154,5 p. 100 dans le cas du centre de Nantes.

Aussi bien, les établissements d’éducation et de soins aux jeunes sourds, ainsi que des centres ou groupements d’assistance aux malentendants de tous âges, qui partageaient leur analyse technique et économique, ont-ils voulu procéder eux-mêmes à l’appareillage des personnes qu’ils recevaient, en s’approvisionnant directement en audioprothèses auprès des fabricants-importateurs.  C’est alors qu’ils ont rencontré l’opposition des audioprothésistes commerçants.

C. - Les faits à qualifier

1° Sous la pression de leurs adhérents, les syndicats d’audioprothésistes ont élaboré et diffusé une doctrine double : d’une part, seuls les audioprothésistes inscrits au registre du commerce ont droit de vendre et de poser des appareils de correction acoustique  ; d’autre part, tout appareillage effectué par des organismes non commerçants, à l’exception des mutuelles, est contraire à l’éthique professionnelle et relève de la concurrence déloyale.

Sur cette base, les syndicats se sont efforcés de dissuader les fabricants-importateurs de livrer des audioprothèses aux organismes non commerçants, en les amenant à préciser individuellement ou collectivement leur politique commerciale par rapport à la doctrine définie, sous la menace de mesures de rétorsion plus ou moins explicites.

Il en a été notamment discuté lors d’une réunion tenue le 18 octobre 1981 à l’initiative de l’A.A.F., qui rassemblait autour de ses responsables les représentants des sociétés Acourex, Audibel, Audipha, Cafa, Danavox, MassiotPhilips, Oticon, Starkey et Rexton. D’après l’un des participants, le président de l’A.A.F. « a fait obtenir un consensus verbal de tous les fabricants d’interdiction de vente aux écoles au cours d’un tour de table.  Il a affirmé que s’il apprenait qu’une entreprise avait passé outre, il considérerait cet acte comme une marque d’agression contre la profession et qu’il pourrait y avoir des consignes commerciales contre la société concernée » (pièces 67 et 69).

Mais C’est surtout par voie de lettre-circulaire, avec publication des réponses à destination de la profession, que les syndicats d’audioprothésistes ont tenté d’influencer les fabricants-importateurs.

Celle de la F.N.A.S.A. (F.N.A.F.), adressée à chacun d’eux le 21 novembre 1978, se terminait ainsi : « Afin que ne se crée aucun malentendu, voulez-vous avoir l’amabilité de préciser la position de votre firme sur ce sujet (la vente d’audioprothèses à des centres ou collectivités non commerçants) ? Votre réponse, avec votre autorisation, sera publiée dans notre prochain bulletin d’information, avec celles de vos confrères  » (pièces 57 et 58).

La technique a été reprise par le S.N.U.A. dans un questionnaire envoyé aux fabricants-importateurs le 3 janvier 1981 (pièce 61), alors que la réunion du conseil d’administration du 17 novembre 1980 avait expressément évoqué la possibilité d’un « boycottage » des entreprises qui livraient des audioprothèses aux centres d’enfants sourds (pièce 48 bis ).

Pour sa part, l’A.A.F. a demandé confirmation des positions prises au cours de la réunion organisée le 18 octobre 1981, en précisant que « les décisions des fabricants importateurs seront systématiquement annoncées à l’ensemble des audioprothésistes, car c’est à eux, individuellement, d’être indifférents ou responsables... Indifférents à des pratiques commerciales nous ravalant au nilveau strictement mercantile... Responsables, en n’accordent spécifiquement leur confiance qu’aux firmes s’étant engagées officiellement à suivre une politique commerciale correcte et à ne livrer que les seuls audioprothésistes pratiquant l’exercice libéral » (pièce 35).

En sens inverse, les trois syndicats ont été sollicités par le S.E.M.R.A.D. et la société Oticon de faire connaître leurs points de vue sur le procès pénal intenté à cette dernière par l’A.P.A.M.O. A cette occasion, les manifestations de soutien à la société n’ont pas manqué (pièces 33, 34, 39, 41, 46, 48 ter).

2° Dans la pratique, l’action des syndicats d’audioprothésistes s’est révélée efficace, puisque la plupart des fabricants-importateurs ont approuvé les conceptions des premiers et que certains les ont mises en oeuvre par des refus de vente.

Ont ainsi répondu favorablement à la lettre de la F.N.A.F.  : Acourex, Audipha, Danavox, Desgrais, Cafa, Novason-Starkey et Oticon.  Les réponses aux demandes du S.N.U.A. et de l’A.A.F. n’ont pas toutes été retrouvées, mais il est établi qu’Acourex, Audipha, Cafa et Starkey ont réexprimé leur accord et que Rexton-Medical a pris la même position.

En revanche, la réponse du S.E.M.R.A.D. à l’A.A.F., en date du 23 novembre 1981, fut catégoriquement négative : « Après avis des conseils juridiques du syndicat, il est apparu que ces propositions, si elles étaient acceptées, conduiraient nos adhérents à commettre les délits de refus de vente, de pratique discriminatoires et d’entrave à la concurrence.  C’est pourquoi ils ne peuvent en aucune façon vous donner un accord qui constituerait un acte illégal » (pièce 75).  Le même avertissement a été donné par l’avocat de la F.N.A.F. à Oticon (pièce 30).

Des refus de vente ont néanmoins été opposés par Acourex au centre de Noisy-le-Grand en mars 1981 (pièce 20) et au centre d’Argenteuil en décembre 1984 (pièce 26), par Danavox à l’Institut national des jeunes sourds de Metz-Borny, en décembre 1983 (pièce 27), par Oticon au centre d’Argenteuil en novembre 1981 (pièce 25), à l’A.P.A.M.O. en juillet 1982 (pièce 19 ter) et à l’Institut régional de jeunes sourds de Poitiers en avril 1985 (pièce 23), ainsi que par Cafa-Audibel selon ses propres déclarations lors de l’audition du 2 septembre 1986.

II. - A la lumière des constatations qui précèdent, le Conseil de la concurrence

Sur le droit applicable

Considérant que, dans le cas où les faits constatés sont antérieurs à l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 1er décembre 1986, l’absence de vide juridique résulte de l’application des règles de fond contenues dans l’ordonnance du 30 juin 1945 dans la mesure où les qualifications énoncées par celle-ci sont reprises par le nouveau texte ; que l’ordonnance du 1er décembre 1986 dispose que les pouvoirs de qualification des pratiques anticoncurrentielles et de décision, antérieurement dévolus au ministre chargé de l’économie, sont confiés au Conseil de la concurrence ; qu’en vertu des dispositions du dernier alinéa de l’article 59 de cette ordonnance demeurent valables les actes de constatation et de procédure établis conformément aux dispositions de l’ordonnance du 30 juin 1945 , qu’enfin les pratiques qui étaient visées par les dispositions du premier alinéa de l’article 50 de cette dernière ordonnance et auxquelles les dispositions de son article 51 n’étaient pas applicables sont identiques à celles qui sont prohibées par l’article 7 de l’ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Considérant que, par suite, les syndicats d’audioprothésistes et les fabricants-importateurs ne sont fondés à soutenir ni que le Conseil de la concurrence aurait été dessaisi du fait de l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 1er décembre susvisée, ni que les faits soumis à son appréciation seraient prescrits en application de l’article 27 de cette ordonnance ;

Sur le comportement des syndicats d’audioprothésistes

Considérant qu’aucune disposition légale n’interdit l’exercice de l’activité audioprothétique aux établissements publics et aux associations privées qui disposent d’audioprothésistes diplômés et de locaux équipés dans le respect des normes réglementaires en vigueur ;

Considérant que l’allégation d’exercice illégal d’une profession ou de concurrence déloyale relève de l’appréciation des juridictions compétentes et ne saurait justifier des mesures de prévention ou de rétorsion prohibées par la loi , que, de même, la défense de la profession par tout syndicat créé à cette fin ne l’autorise nullement à s’engager, ni à engager ses adhérents dans des actions collectives visant à empêcher, restreindre ou fausser le jeu de la concurrence, ou susceptibles d’avoir de tels effets ; qu’en l’espèce, en utilisant de tels procédés, les syndicats en cause sont sortis des limites de leur mission de défense des intérêts professionnels de leurs adhérents ;

Considérant qu’il résulte de ce qui a été précédemment exposé que les pressions exercées par les syndicats d’audioprothésistes sur les fabricants-importateurs constituent en elles-mêmes et par leur convergence des actions concertées à objet anticoncurrentiel, dès lors qu’elles entrent dans une stratégie d’exclusion des audioprothésistes non commerçants du marché des appareils de correction acoustique et qu’elles font obstacle à l’abaissement des prix de vente de ces appareils aux malentendants ; qu’en outre lesdites actions ont eu un effet anticoncurrentiel en incitant des fabricants-importateurs à refuser d’approvisionner des audioprothésistes non commerçants ;

Considérant que les faits ainsi qualifiés tombent sous le coup des dispositions de l’article 50 de l’ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 et de l’article 7 de l’ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Considérant qu’aucune justification n’a été fournie concernant les exceptions prévues par l’article 51 de l’ordonnance du 30 juin 1945 ;

Sur le comportement des fabricants-importateurs

Considérant que les sociétés Acourex, Audipha, Cafa, Audibel, Danavox, Oticon et Rexton-Medical ont expressément approuvé les positions restrictives des syndicats d’audioprothésistes  ; qu’elles se sont ainsi prêtées à des actions ayant pour objet de restreindre la concurrence parmi les audioprothésistes  ;

Considérant, en revanche, que le S.E.M.R.A.D. s’y est opposé  ; que par ailleurs, il n’est pas établi que la société Starkey-France ait succédé à Novason-Starkey ; que la S.A. Desgrais avait disparu avant l’ouverture de l’enquête décidée par le ministère de l’économie et des finances , que par suite, il y a lieu de mettre ces trois organismes hors de cause ;

Considérant que les sociétés Acourex, Cafa-Audibel, Danavox et Oticon ont également opposé des refus de vente à différents organismes de soins et d’assistance aux malentendants  ; qu’il ressort des pièces du dossier que ce comportement découle directement de l’action concertée susmentionnée, qui a produit ainsi des effets anticoncurrentiels ;

Considérant que la société Massiot-Philips justifie avoir interrompu son opération promotionnelle « Chèque pour mieux entendre » et son expérience de commercialisation décentralisée « Réseau Ifker », pour des raisons économiques et non sous la pression des syndicats d’audioprothésistes  ; qu’au surplus, elle a toujours observé une attitude réservée à l’égard des initiatives des syndicats d’audioprothésistes  ; que, dès lors, elle doit être mise hors de cause ;

Considérant que les « usages commerciaux de la profession  » ne sauraient autoriser des actes contraires aux règles de la libre concurrence ; qu’au surplus, les usages invoqués dans la présente affaire sont précisément ceux qui s’inspirent de la doctrine répréhensible des syndicats audioprothésistes  ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’acceptation de cette doctrine par six fabricants-importateurs et sa mise en oeuvre par des refus de vente imputables à quatre d’entre eux, tombent sous le coup des dispositions de l’article 50 de l’ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 et de l’article 7 de l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, sans pouvoir bénéficier des exceptions prévues par l’article 51 de l’ordonnance du 30 juin 1945,

D E C I D E  :

Article 1er  : Il est enjoint aux syndicats d’audioprothésistes et aux fabricants-importateurs de cesser toute concertation ayant pour objet ou pour effet de limiter le libre accès à la fourniture d’appareils de correction acoustique aux établissements publics ou privés d’éducation, de soins ou d’assistance aux malentendants constitués ou non en mutuelle.

Article 2 : Il est infligé à la fédération nationale des audioprothésistes français et au syndicat national unifié des audioprothésistes une sanction pécuniaire d’un montant de 50 000 F pour chacun d’eux et à l’association des audioprothésistes français une sanction pécuniaire d’un montant de 30 000 F.

Article 3  : Il est infligé respectivement aux sociétés Acourex, Audipha, Cafa-Audibel, Danavox, Oticon et Rexton-Medical une sanction pécuniaire d’un montant de 20 000 F pour chacune d’elles.

Article 4 : Dans un délai maximum de trois mois à compter de la date de notification de la présente décision, le texte intégral de celle-ci sera publié aux frais des syndicats pris solidairement dans le Quotidien du Médecin et la revue Objectifs et
actions mutualistes.

Délibéré en section, sur le rapport de M. GANDREAU, dans sa séance du 15 mars 1988, où siégeaient M. BETEILLE, vice-président ; MM. BON, FLECHEUX, FRIES, Mme LORENCEAU, M. SCHMIDT, membres.

 


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