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19 mai 2002

Décision n° 2002-D-18 du 13 mars 2002 relative aux pratiques de l’État et de l’Association pour les fouilles archéologiques nationales lors de la passation du marché des fouilles archéologiques préventives du chantier de modification de la route départementale Le Canet Perpignan

LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE, siégeant en Commission permanente,

Vu la lettre du 17 mars 1998, enregistrée sous le n° F 1030, par laquelle le président du conseil général des Pyrénées-Orientales a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques constatées lors de la dévolution du marché des fouilles archéologiques préventives du chantier de modification de la route départementale Le Canet Perpignan ;

Vu le livre IV du code de commerce et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour l’application de l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 ;

Vu les observations présentées par le commissaire du Gouvernement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement entendus au cours de la séance du 23 janvier 2002 ;

Les représentants du ministère de la culture entendus sur le fondement de l’article L. 463-7, 2ème alinéa, du code de commerce ;

Adopte, après avoir examiné les éléments relevés au cours de l’instruction (I), la présente décision fondée sur les motifs exposés dans les considérants qui suivent (II) :

I. - Les constatations

A. - LE SECTEUR DES FOUILLES ARCHéOLOGIQUES PRéVENTIVES

1. Le contexte juridique

Le régime légal des fouilles archéologiques préventives

Selon les dispositions de la convention européenne du patrimoine archéologique signée à Malte le 16 janvier 1992, sont considérés, comme éléments du patrimoine archéologique, tous les vestiges, biens et autres traces de l’existence de l’humanité dans le passé.

Compte tenu de cette définition extensive, l’archéologie, longtemps limitée à l’étude de la préhistoire, de l’antiquité et des périodes médiévales, est désormais de plus en plus associée à l’étude des temps modernes et son champ d’intervention s’est considérablement accru, entraînant par-là même la multiplication des chantiers de fouilles. Par ailleurs, la réalisation de grandes opérations d’infrastructures urbaines ou de génie civil a parfois eu pour conséquence la destruction d’éléments du patrimoine archéologique, ce risque s’accroissant parallèlement à l’adoption d’une définition plus large en matière de patrimoine.

Il est donc apparu nécessaire de mettre en œuvre un mécanisme de protection afin que la réalisation des grands travaux d’infrastructures ne puisse se faire sans que l’inventaire archéologique des zones soumises à travaux soit préalablement assuré. La levée de cette "hypothèque archéologique" impliquait que les aménageurs laissent procéder ou procèdent à des fouilles dites préventives, encore appelées fouilles de sauvetage, avant toute réalisation des travaux proprement dits.

Ces fouilles, qui impliquent trois catégories d’opérations ( étude et prospection, travaux de fouilles, mise en forme des données et diffusion des résultats), sont entreprises lorsque des travaux d’aménagement sont susceptibles de détruire ou d’endommager irrémédiablement un site contenant des vestiges archéologiques. Elles se déroulent dans un laps de temps convenu, à la suite duquel, et sauf découverte exceptionnelle entraînant le classement du site, les travaux d’aménagement pourront être réalisés.

La loi du 27 septembre 1941, validée en 1944 et applicable jusqu’en 2001, prévoyait que les fouilles archéologiques pouvaient être conduites par l’état ou par des particuliers surveillés par l’état, tout en imposant à l’opérateur des fouilles, quel qu’il soit, d’avoir obtenu au préalable une autorisation spécifique délivrée par l’autorité compétente. Les infractions à ces dispositions étaient réprimées par l’article 257-1 du code pénal, lequel prévoit toujours des peines d’amende et d’emprisonnement en cas de destruction de vestiges archéologiques découverts fortuitement.

Le décret n° 94-422 du 27 mai 1994 avait précisé que les autorisations de fouilles étaient délivrées par le préfet de région après consultation de la commission interrégionale de la recherche archéologique (CIRA) territorialement compétente, chaque commission étant composée de huit membres dont un désigné par le ministre de la culture et sept désignés par le préfet de région sur proposition du directeur régional des affaires culturelles, en raison de leur compétence en matière de recherche archéologique. Les fouilles étaient effectuées sous la responsabilité du demandeur de l’autorisation et sous la surveillance de l’administration.

La loi n° 2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l’archéologie préventive, intervenue postérieurement aux faits constatés dans la présente affaire et qui n’a pas d’effet rétroactif, a modifié cette organisation en confiant le monopole des fouilles archéologiques préventives à un établissement public administratif, l’Institut national de recherches archéologiques préventives, auquel sont dévolus les biens, droits et obligations de l’association pour les fouilles archéologiques nationales (AFAN) dont il sera traité ci-dessous.

Les obligations des aménageurs

La loi n° 76-629 du 10 juillet 1976, relative à la protection de la nature, a rendu obligatoires les études d’impact lorsqu’un projet affecte l’environnement. Le contenu de ces études a été fixé par le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977, pris pour l’application de l’article 2 de la loi et modifié par le décret n° 93-245 du 25 février 1993 relatif aux études d’impact, lequel a élargi au patrimoine culturel et archéologique la notion d’environnement, l’obligation de mener une étude d’impact étant ainsi étendue en cas de projet d’aménagement susceptible d’avoir un effet sur la préservation du patrimoine.

Le décret, sous certaines réserves, précise que : "Les études préalables à la réalisation d’aménagements ou d’ouvrages prescrits par le présent décret sont faites par le pétitionnaire ou le maître d’ouvrage" et que, pour ce qui concerne les mesures destinées à supprimer, réduire ou compenser les conséquences du projet, l’étude doit indiquer "l’estimation des dépenses correspondantes".

Dans une circulaire n° A5.1.2 du 1er juin 1993, adressée aux préfets de région et aux directeurs régionaux des affaires culturelles, le ministre de l’éducation et de la culture, commentant l’intervention du décret du 25 février 1993 susvisé, précisait que l’étude d’impact était à la charge de l’aménageur, y compris en ce qui concerne son volet "archéologie". L’aménageur devait donc, selon cette circulaire, prendre à sa charge, au titre de l’obligation d’élaboration d’une étude d’impact, le coût de l’analyse de l’état initial du site (opération de diagnostic), puis le coût des fouilles destinées à compenser les conséquences dommageables du projet sur l’environnement archéologique (fouilles préventives).

C’est dans ces conditions que les aménageurs ont été invités à prendre à leur charge les dépenses liées à l’exécution des fouilles archéologiques préventives.

La soumission des fouilles archéologiques préventives au droit de la concurrence

Dans un avis n° 98-A-07 du 19 mai 1998, publié au bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en date du 29 janvier 1999, le Conseil de la concurrence a indiqué que l’exécution des fouilles archéologiques préventives est une activité économique relevant de l’article 53 de l’ordonnance du 1er décembre 1986, devenu l’article L. 420 du code de commerce.

2. Le contexte économique

Trois catégories d’acteurs peuvent être identifiés : l’état, les opérateurs et les aménageurs.

Les services de l’état, à savoir la sous-direction de l’archéologie du ministère de la culture, ainsi que les services déconcentrés de ce ministère (direction régionale des affaires culturelles, dite DRAC) ont pour missions de veiller à l’application de la législation et de la réglementation sur les fouilles et découvertes archéologiques, d’organiser la recherche archéologique et de définir ses objectifs. L’état intervient également comme opérateur, soit lorsqu’il exécute directement une fouille ou un sondage, soit lorsqu’il subventionne les travaux de fouilles préventives, soit lorsqu’il réalise la carte archéologique de la France.

Parmi les opérateurs, l’Association pour les fouilles archéologiques nationales (AFAN), créée en 1973, à l’initiative du ministère de la culture et du ministère des finances est un intervenant majeur. Cette association avait initialement pour mission de gérer les crédits provenant des participations demandées aux aménageurs pour réaliser les opérations de fouilles archéologiques préventives.

L’AFAN est cependant devenue un opérateur direct de fouilles préventives puisqu’elle assure, de fait, en France la quasi-totalité de ce type d’opérations : elle a ainsi mené à bien, en 1998, 1 524 opérations représentant un montant de 296 716 000 francs, en employant 1 110 personnes. En 2000, l’association a perçu 407 millions de francs dont 63 % en provenance du secteur public, 3 % des sociétés d’autoroute et 34 % du secteur privé.

L’avis du 19 mai 1998, déjà cité, avait relevé que l’association était en situation de quasi-monopole sur le secteur des fouilles archéologiques préventives. Le Conseil avait également précisé que l’AFAN devait être regardée, lorsqu’elle exerce cette activité, comme une entreprise au sens de l’article 90, paragraphe 1, du traité de Rome.

Il existe néanmoins plusieurs autres intervenants en matière de fouilles archéologiques, dont le rôle est resté très limité à ce jour. Il s’agit du CNRS, des unités de recherche de certaines universités ou de certains musées agissant plus particulièrement dans le secteur des fouilles programmées, des services spécialisés des collectivités locales ( 24 services départementaux et 77 services municipaux en 1998), d’autres associations archéologiques, regroupant des bénévoles autour d’archéologues professionnels, situées dans la plupart des départements et des grandes villes et enfin de professionnels regroupés dans des entreprises commerciales, qu’ils soient français telle la société HADES " bureau de reconnaissance et d’investigations archéologiques", créée en 1994, ou étrangers (britanniques ou espagnols essentiellement).

Les aménageurs peuvent être soit des collectivités publiques, soit des entreprises publiques, soit des entreprises privées. Ils exécutent des travaux dont la réalisation peut mettre en danger le patrimoine archéologique et doivent donc, sauf à engager leur éventuelle responsabilité pénale, prendre, avant d’entreprendre la phase de réalisation des travaux envisagés, toutes mesures de nature à préserver ce patrimoine. Ils ont ainsi été conduits, dans les faits, à financer la réalisation de fouilles archéologiques préventives sur les sites concernés par les travaux, se rangeant ainsi au raisonnement des services du ministère de la culture selon lequel ce type d’opération fait partie des obligations nées de la loi de 1977 en matière d’étude d’impact.

En pratique, et selon le schéma rappelé par le ministre de la culture dans sa circulaire n° 1 624 du 16 mai 1995, l’aménageur signe avec l’état (ministère de la culture) une convention prévoyant, d’une part, qu’il prend à sa charge les opérations de sondage et de fouilles préventives et d’autre part, qu’il choisit de confier la réalisation de ces travaux à un opérateur qui, le plus souvent, est l’AFAN.

Dans le présent dossier, l’aménageur est le département des Pyrénées-Orientales en sa qualité de maître d’ouvrage des travaux de réaménagement routier de la route départementale n° 617 Perpignan / Le Canet.

B. - LE MARCHé DE RéFéRENCE

1. L’origine du marché

La liaison routière Perpignan / Canet-en-Roussillon, très fréquentée, étant devenue une des plus meurtrières du département des Pyrénées-Orientales, le conseil général a décidé de la réaménager en créant une liaison rapide à quatre voies avec séparation centrale.

L’étude préliminaire liée à la déclaration d’utilité publique des travaux a révélé la présence de vestiges archéologiques datant du Moyen-Âge sur le site de "Vilarnau - Mas Miraflor". Une première opération de sondages, menée par des archéologues salariés de l’AFAN, du 16 octobre au 16 novembre 1995, laissait supposer l’existence, sur ce site susceptible d’être détruit à la suite des travaux routiers, d’une motte castrale caractéristique de l’architecture féodale du Xe et du XIe siècle, vestige d’un intérêt archéologique et historique certain.

Un rapport de diagnostic archéologique a été transmis au président du conseil général des Pyrénées-Orientales, le 23 février 1996, par le directeur régional des affaires culturelles, ce dernier informant, par la même occasion, le département de la nécessité de procéder à des fouilles archéologiques préventives conformément à l’avis de la CIRA et lui "(…) confirm(ant)… la nécessité à réaliser cette étude, qui sera confiée à l’association pour les fouilles archéologiques nationales". A cette lettre, était joint "afin de mettre en œuvre les travaux… le devis prévisionnel de l’opération, rédigé selon mes prescriptions, accompagné de la convention". Le projet de convention, joint au rapport et à la lettre de la DRAC, prévoyait des travaux d’une durée de 3 mois et demi pour un budget prévisionnel de 450 528,50 FF détaillé dans le devis annexé au projet. Le département des Pyrénées-Orientales devait donc, avant de poursuivre les travaux, lever "l’hypothèque archéologique" en faisant procéder à des fouilles archéologiques préventives sur le site de "Vilarnau
- Mas Miraflor
".

2. L’historique du marché

Répondant, le 11 avril 1996, à la lettre précitée du directeur régional des affaires culturelles, le président du conseil général des Pyrénées-Orientales estimait que les conditions financières figurant dans les documents transmis étaient exagérées et s’étonnait du " manque évident de concertation dans l’instruction de ce projet de convention d’étude". Il demandait qu’une réunion de travail soit organisée afin de pouvoir discuter des conditions d’exécution des fouilles archéologiques préventives du " Mas Miraflor", notamment du détail des quantités prévisionnelles et du contenu des prix unitaires et des modalités de diminution de la rémunération en cas de fouilles présentant un intérêt plus limité que prévu.

Le directeur régional des affaires culturelles répliquait, le 7 juin 1996, en indiquant que le coût des fouilles préventives était déterminé par l’AFAN selon des barèmes nationaux et était fonction des caractéristiques du cahier des charges défini par le conservateur régional de l’archéologie et approuvé par la CIRA. Il précisait que M. Alessandri, salarié de l’AFAN, serait disponible pour assurer la direction des fouilles aux environs du 15 juillet.

Par lettre adressée le 26 juillet 1996 au ministre de la culture, le président du conseil général des Pyrénées-Orientales s’étonnait de ce que le financement des fouilles archéologiques, réalisées en application de la loi du 27 septembre 1941, soit intégralement à la charge du département et de ce que l’attribution de ces travaux ne fasse pas l’objet d’un marché passé dans les conditions prévues par le code des marchés publics. Il précisait, en outre, que certaines clauses de la convention de travaux, qui lui avait été adressée, ne seraient pas acceptées par le payeur départemental comme étant contraires à différentes dispositions législatives ou aux règles de la comptabilité publique.

Après réception d’une réponse d’attente du ministre, le département des Pyrénées-Orientales décidait de ne pas signer la convention qui lui était proposée par les services de la DRAC et de soumettre le marché des fouilles préventives du "Mas Miraflor" à un appel d’offres, conformément aux dispositions du code des marchés publics. Cet appel d’offres, lancé le 7 octobre 1996, pour un marché composé d’un lot unique d’un montant de 450 000 FF, était déclaré infructueux le 11 décembre 1996, faute de candidatures et le département décidait de recourir à la procédure de marché négocié avec consultation préalable.

Un avis d’appel public à la concurrence était publié le 14 avril 1997. Quatre offres étaient reçues et ouvertes le 27 juin 1997, dont trois émanant d’associations espagnoles d’archéologie et une de l’AFAN, cette dernière présentant une offre pour un montant de 552 899,49 FF TTC.

Compte tenu de la réglementation existante, qui exige que le responsable de l’opération archéologique soit autorisé par un arrêté du préfet de région, pris après consultation de la CIRA, à réaliser les fouilles sur le site concerné, l’ensemble des offres était transmis, le 1er juillet 1997, par le département des Pyrénées-Orientales, à la direction régionale des affaires culturelles afin que la commission se prononce sur la qualification scientifique des responsables d’équipes de fouilles. A la suite d’une demande de renseignements complémentaires à laquelle deux des candidats ne répondaient pas, seules restaient en compétition l’AFAN et l’association ARQUEOCIENCIA de Barcelone dont l’offre s’établissait à 391 202,28 FF TTC.

Lors de sa réunion des 1er et 2 octobre 1997, la commission interrégionale de la recherche archéologique du sud-est, après avoir "accept(é) le principe de la mise en concurrence d’équipes scientifiques", proposait de retenir M. Alessandri, salarié de l’AFAN, comme responsable de l’opération, "au vu de sa réponse et de sa compétence reconnue", sans aucunement se prononcer sur les qualités scientifiques du responsable d’opération proposé par l’association ARQUEOCIENCIA. Cet avis était communiqué par le préfet de la région Languedoc-Roussillon au président du conseil général des Pyrénées-Orientales par lettre du 5 novembre 1997.

Par une décision du 3 décembre 1997, notifiée le même jour au président du conseil général des Pyrénées-Orientales, le préfet de la région Languedoc-Roussillon délivrait alors à M. Alessandri, archéologue salarié de l’AFAN, une autorisation de fouilles sur le site du "Mas Miraflor / Vilarnau d’Aval".

Prenant acte de l’avis de la CIRA et anticipant la décision du préfet de région, le département des Pyrénées-Orientales constatait, le 20 octobre 1997, qu’il ne pouvait confier l’opération de fouilles archéologiques préventives qu’à l’équipe de l’AFAN dirigée par M. Alessandri. Le montant de l’opération était alors réévalué de 450 000 FF à 555 000 FF TTC pour tenir compte de la proposition de l’AFAN et l’acte d’engagement du marché négocié était signé le 4 novembre 1997 pour un montant de 552 899,49 FF TTC. Le marché avait pour objet d’assurer la fouille des espaces mis à jour, l’exploration ponctuelle du fossé délimitant le site et la rédaction d’un rapport de synthèse. Il prévoyait que l’opérateur prenait à sa charge la mise en place des installations de chantier, le piquetage ou le bornage des emprises archéologiques, la mise à disposition d’une pelle mécanique et de 2 camions, la réalisation des terrassements de décapage préalable, le comblement des aires de fouilles, la mise en place des systèmes de sécurité des archéologues.

Les travaux ont été réalisés du 8 décembre 1997 au 12 février 1998. Le document final de synthèse a été transmis au président du conseil général des Pyrénées-Orientales, le 16 avril 1998.

C. - LA NOTIFICATION DE GRIEFS

Au vu des éléments recueillis au cours de l’instruction, les griefs suivants ont été notifiés à l’état et à l’AFAN, sur le fondement de l’article L. 420-2 du code de commerce :

  • Le refus d’accepter la procédure de mise en concurrence prévue par le code des marchés publics pour l’attribution du type de marché considéré ;
  • L’utilisation, par l’état (ministère de la culture), de ses prérogatives de puissance publique pour imposer au département des Pyrénées-Orientales le recours à l’AFAN dans la conduite des travaux de fouilles archéologiques préventives au détriment de la liberté de choix de celui-ci ;
  • Le refus de discussion avec le département des Pyrénées-Orientales des prestations proposées par l’état (ministère de la culture) et/ou l’AFAN dans le cadre du marché des fouilles archéologiques préventives et l’impossibilité pour ce dernier de pouvoir apprécier le bien-fondé des prestations qui lui ont été imposées ;
  • Les pressions exercées par l’AFAN sur d’éventuels concurrents ;
  • L’avantage procuré à l’état (ministère de la culture) et/ou à l’AFAN par la connaissance des sites prospectés au titre des fouilles de sondage et de l’inventaire dressé pour l’établissement de la carte archéologique de France.

II. – Sur la base des constatations qui précèdent, le Conseil de la concurrence :

1. Sur la situation juridique de l’Association pour les fouilles archéologiques nationales :

Considérant que si, conformément à un principe général de procédure, l’instance en cours devant le Conseil est interrompue lorsqu’un changement survenu dans la situation juridique d’une entreprise mise en cause entraîne la perte par celle-ci de sa capacité à répondre des pratiques anticoncurrentielles faisant l’objet de la poursuite, et si cette interruption se poursuit jusqu’à l’intervention ou la mise en cause de l’entreprise apte, le cas échéant, à répondre des pratiques imputées à l’entreprise dont elle assure la continuité, l’interruption ne se produit pas lorsque l’événement qui en est la cause survient après l’ouverture des débats, laquelle a pour effet de cristalliser la situation procédurale des parties ; qu’en l’espèce, le décret n° 2002-90 du 16 janvier 2002 portant statut de l’Institut national de recherches archéologiques préventives prévoit, à l’article 27, que "la dévolution des biens, droits et obligations de l’association dénommée "Association pour les fouilles archéologiques nationales" intervient à la date prévue à l’article 35" ; que la date d’entrée en vigueur du décret est fixée par l’article 35 au "premier jour du mois suivant sa publication", c’est-à-dire au 1er février 2002 ; qu’ainsi, lors de la séance du 23 janvier 2002, la dévolution à l’Institut national de recherches archéologiques préventives des biens, droits et obligations de l’AFAN, prévue à l’article 4 de la loi du 17 janvier 2001, n’était pas encore effective ; qu’il s’ensuit que l’instance n’a pas subi d’interruption à l’égard de l’AFAN et que celle-ci figure valablement en tant que partie à la procédure ;

2. Sur la détermination de l’auteur des pratiques faisant l’objet des griefs :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 410-1 du code de commerce : "Les règles définies au présent livre s’appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnes publiques, notamment dans le cadre de délégations de service public." ;

Considérant que l’Association française pour les fouilles archéologiques nationales (AFAN), créée en 1973 à l’initiative du ministère de la culture et du ministère de l’économie et des finances, ne pourrait être considérée comme un opérateur économique que dans la mesure où il apparaîtrait qu’elle a agi de manière autonome dans le secteur des fouilles archéologiques préventives ; que l’instruction a permis d’établir que cette autonomie est inexistante et que l’association n’est, en réalité, qu’une émanation des services de l’état (ministère de la culture) agissant comme opérateur économique dans le secteur en cause ;

Considérant que les statuts de l’AFAN prévoient, en effet, que celle-ci contribue, sous le contrôle de l’état, à la réalisation des objectifs du service public de l’archéologie et de la politique archéologique nationale ; que son budget est soumis à l’approbation des ministres chargés de la culture et du budget et n’est exécutable qu’après approbation par ces derniers ; que l’association est soumise, comme tout service administratif, au contrôle financier de l’état ; que sa comptabilité est tenue conformément au plan comptable général et que les conditions dans lesquelles s’effectuent ses opérations financières sont fixées par un règlement financier et comptable approuvé par les ministres de la culture et du budget ; qu’elle est administrée par un conseil d’administration composé de 14 membres dont 7 sont désignés par le ministre de la culture et un par le ministre du budget ; qu’elle rend compte, chaque année, de son activité au ministre chargé de la culture et soumet à son approbation le programme prévu pour l’année suivante ; qu’enfin, l’article 23 des statuts prévoit qu’un commissaire du gouvernement est désigné par le ministre de la culture et qu’il peut exercer un droit de veto suspensif d’un mois à l’encontre des délibérations du conseil d’administration, ces délibérations pouvant alors être annulées en tout ou en partie par le ministre de la culture ;

Considérant, en outre, qu’il ressort de la convention-cadre conclue entre l’état et l’AFAN, le 1er juillet 1992, que l’AFAN ne peut intervenir que sur les opérations autorisées ou décidées par l’état et dont il a nominativement désigné le responsable, sans pouvoir mener d’opérations de sa propre initiative, aucune exception n’étant prévue en ce qui concerne des chantiers de fouilles situés hors du territoire national ; que, de même, les opérations archéologiques auxquelles participe l’association sont placées sous le contrôle scientifique des services de l’état dont l’avis est demandé lors du recrutement des agents qui concourent à leur réalisation ;

Considérant, enfin, que l’état, qui a confié à l’AFAN la mission de réaliser la carte archéologique de la France, assure le fonctionnement de l’association en lui accordant des subventions de fonctionnement et en mettant des personnels à sa disposition ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’AFAN ne dispose d’aucune indépendance de décision vis-à-vis des services de l’état en ce qui concerne l’initiative et la conduite des fouilles archéologiques préventives, la définition des prestations proposées aux clients, la fixation de ses prix et tarifs et même la gestion de son personnel ; que, sous le couvert de cette association-relais, qualifiée par elle-même et par les services de l’état de "démembrement de l’administration", l’état est intervenu directement comme opérateur économique sur le secteur des fouilles archéologiques préventives et a donc assuré, après en avoir mis au point le contenu et le prix, les prestations du marché des fouilles archéologiques préventives du "Mas Miraflor" ; qu’il y a lieu, en conséquence, de considérer que les pratiques relevées au cours de l’instruction doivent être imputées directement à l’état, représenté par le ministre de la culture ;

3. Sur le refus de l’état de se soumettre à la procédure de mise en concurrence prévue par le code des marchés publics et sur l’utilisation par l’état de ses prérogatives de puissance publique pour imposer au département des Pyrénées-Orientales le recours à l’AFAN dans la conduite des travaux de fouilles archéologiques préventives, au détriment de la liberté de choix du maître d’ouvrage (1er et 2ème  griefs) :

Sur la compétence du Conseil de la concurrence :

Considérant que, dans son arrêt du 18 octobre 1999 (préfet de la région d’île-de-France, préfet de Paris c/cour d’appel de Paris, Aéroports de Paris et Air France c/TAT European Airlines), le Tribunal des conflits a jugé que si, dans la mesure où elles effectuent des activités de production, de distribution ou de services, les personnes publiques peuvent être sanctionnées par le Conseil de la concurrence agissant sous le contrôle de l’autorité judiciaire, les décisions par lesquelles ces personnes assurent la mission de service public qui leur incombe au moyen de prérogatives de puissance publique, relèvent de la compétence de la juridiction administrative pour en apprécier la légalité et, le cas échéant, pour statuer sur la mise en jeu de la responsabilité encourue par ces personnes publiques ;

Considérant que les deux premiers griefs qui ont été notifiés en ce qui concerne, d’une part, le refus de se soumettre aux dispositions du code des marchés publics et, d’autre part, l’exercice de pressions par l’administration pour imposer l’AFAN comme prestataire au département des Pyrénées-Orientales, au détriment de la liberté de choix de celui-ci, reposent sur des pratiques administratives caractérisées par la mise en œuvre, par l’état, de prérogatives de puissance publique ;

Considérant, en effet, en premier lieu, que les positions successives, prises par le directeur régional des affaires culturelles à l’égard du conseil général des Pyrénées-Orientales rappelées ci-dessus et tendant à ne pas soumettre au code des marchés publics, et notamment à une procédure de mise en concurrence, la réalisation des travaux de fouilles archéologiques préventives et à lui imposer comme prestataire l’AFAN, ne constituent que la mise en œuvre à l’échelon local par les services de l’état de circulaires adressées aux préfets de région et aux directeurs régionaux des affaires culturelles par le ministre de la culture, notamment une circulaire n° 1624 du 16 mai 1995 et une circulaire n° 58196 du 11 mars 1997 ; que le premier de ces documents (cotes 97 et suivantes des annexes du rapport), qui contient des "instructions relatives à la mise en place, au suivi et à la clôture des opérations gérées par l’association pour les fouilles archéologiques nationales (AFAN)", précise qu’après avis, le cas échéant, de la CIRA sur le projet de fouilles concerné, le cahier des charges établi par le service régional de l’archéologie "est adressé à l’antenne de l’AFAN pour établissement du devis" et que la composition de l’équipe est ensuite proposée au chef d’antenne de l’AFAN par le responsable, s’il est désigné et, dans le cas contraire, au conservateur régional de l’archéologie par le chef d’antenne AFAN ; que la circulaire du 11 mars 1997, relative au renouvellement de la convention état/AFAN (cotes 24 et suivantes des annexes du rapport) relève que "face aux contraintes de tous ordres (…) que doivent respecter les opérations d’archéologie préventive, le recours à des équipes véritablement professionnalisées s’impose. A cet égard, l’AFAN apparaît dans bien des cas comme le seul opérateur véritablement en mesure de mobiliser les moyens humains et matériels que le respect de ces contraintes exige. L’AFAN est donc le partenaire privilégié de l’état. Je vous demande donc de veiller à ce que l’AFAN soit en mesure d’assurer ces missions d’intérêt général. Il en va de la cohérence de la gestion nationale des chantiers de fouilles de sauvetage" ; que les circulaires en cause, par lesquelles le ministre de la culture, en sa qualité d’autorité hiérarchique, prescrit aux préfets et aux directeurs régionaux des affaires culturelles la ligne de conduite à tenir en ce qui concerne le choix et le rôle de l’AFAN dans la réalisation des opérations de fouilles préventives, sans se référer aux procédures prévues par le code des marchés publics, présentent, compte tenu des termes qu’elle emploient, un caractère impératif ; qu’ainsi, indépendamment de leur caractère légal ou non, elles ont un caractère réglementaire et non interprétatif (C.E. 12 novembre 1986 Winterstein, Rec. 338, Les grands arrêts de la jurisprudence administrative p. 502) ;

Considérant, en second lieu, que le deuxième grief met en cause le comportement de la commission interrégionale de la recherche archéologique du sud-est ; que les CIRA ont reçu des textes qui les ont instituées le pouvoir de rendre un avis sur la qualité scientifique des responsables des fouilles ; que cet avis est indissociable de la décision prise par le préfet en ce qui concerne l’autorisation des fouilles et la désignation du responsable scientifique prévu par le décret n° 94-422 du 27 mai 1994 ;

Considérant, ainsi, que les pratiques faisant l’objet du premier et du deuxième grief reposent sur des décisions par lesquelles l’état a assuré la mission de service public qui lui incombe au moyen de prérogatives de puissance publique et que l’appréciation de leur légalité au regard de l’article L. 420-2 du code de commerce échappe à la compétence du Conseil de la concurrence ; que la saisine doit, en conséquence, être déclarée irrecevable de ces deux chefs, en application de l’article L. 462-8 du code de commerce ;

4. Sur le caractère abusif des clauses du marché proposé par l’état au département des Pyrénées-Orientales, et l’impossibilité de les renégocier (3 ème grief) :

Considérant que dans une décision n° 00-D-27 du 13 juin 2000 Union fédérale des consommateurs du Val d’Oise, le Conseil a retenu que si, en règle générale, les abus de position dominante qu’il réprime consistent, pour l’entreprise considérée, à empêcher des concurrents de pénétrer sur un marché ou à gêner l’activité de ceux qui s’y trouvent, il peut, dans certaines circonstances, également s’assurer, sur la base de l’article 8 de l’ordonnance du 1er décembre 1986, devenu l’article L. 420-2 du code de commerce, que l’entreprise en position dominante n’exploite pas abusivement cette dernière au détriment direct du consommateur ; qu’il en irait, notamment, ainsi si l’entreprise en position dominante imposait à son client de lui acheter un volume de prestations injustifié que ce dernier ne serait pas en mesure de discuter ou bien fixait son prix à un niveau manifestement excessif ;

Considérant, encore, que, selon la jurisprudence de la CJCE, une pratique de prix abusifs à l’égard de particuliers ou de professionnels, dans le cadre d’un monopole, peut être établie, s’il existe une disproportion manifeste entre ce prix et la valeur du service correspondant (CJCE General Motors 13 novembre 1975 et CJCE 11 novembre 1986 British Leyland), ou si une telle anomalie manifeste apparaît à la suite d’une comparaison effectuée sur une base homogène dans le cadre d’une analyse des composants du prix pratiqué (CJCE 14 février 1978 UBC et CJCE 13 juillet 1989 Tournier) ; qu’une telle pratique n’existera pas si la disproportion constatée comporte une justification (CJCE 8 juin 1971 Deutsche Grammophon et CJCE 13 juillet 1989 Tournier, précité) ;

Considérant que, lors de son audition du 4 mai 1999 (cote 78), M. Guyonnet, directeur du service des routes du département des Pyrénées-Orientales, a affirmé que le département avait été dans l’impossibilité de renégocier les différents postes du marché qui lui était proposé, montant du devis, durée de l’intervention, contrôle des prestations, contenu de certaines clauses du contrat de travaux et que le département des Pyrénées-Orientales, qui avait initialement envisagé de faire procéder à des travaux d’un montant de 450 000 FF, a dû réévaluer le coût de ceux-ci afin de se mettre en conformité avec les propositions de l’AFAN d’un montant de 552 899,49 FF TTC ; que le département n’aurait pas non plus été en mesure d’apprécier si certaines dépenses mises à sa charge au titre du devis de l’AFAN lui étaient véritablement imputables ;

Considérant qu’ainsi qu’il a été indiqué plus haut, le directeur régional des affaires culturelles du Languedoc-Roussillon a, le 23 février 1996, transmis au président du conseil général des Pyrénées-Orientales un projet de convention devant comporter la signature de l’état (ministère de la culture), de l’AFAN et du département des Pyrénées-Orientales, prévoyant des travaux d’une durée de 3 mois et demi pour un budget prévisionnel de 450 528,50 FF, détaillé en annexe dans un devis ; que l’AFAN et, par voie de conséquence, l’état, a fait application, à cette occasion, d’un barème spécifique établi à l’échelon national, actualisé et révisé sur la base des indices de l’ingénierie et impliquant que les devis soient établis par référence à un cahier des charges défini par le conservateur régional de l’archéologie ; que l’existence de ce barème ressort du courrier adressé, le 7 juin 1996, au président du conseil général des Pyrénées-Orientales par le directeur régional des affaires culturelles (cote 39) ; que le président de l’AFAN a également confirmé, lors de son audition du 15 juin 1999 (cote 84), que les barèmes proposés aux aménageurs sont arrêtés par le comité financier de l’AFAN sur proposition de la direction et établis de façon à pouvoir traiter de manière homogène les opérations d’archéologie préventive sur l’ensemble du territoire tout en permettant d’atteindre l’équilibre de gestion ;

Considérant que les propositions ainsi formulées peuvent être comparées à celles émanant du marché puisque le conseil général des Pyrénées-Orientales a organisé un premier appel d’offres, déclaré infructueux le 11 décembre 1996, puis un marché négocié avec consultation préalable, auquel quatre entreprises ont répondu, le 27 juin 1997 ; que parmi ces quatre entreprises, l’AFAN a présenté une offre pour un montant de 552 899,49 FF et l’association ARQUEOCIENCIA, patronnée par l’université de Barcelone, une offre de 391 202,28 FF ; que la commission interrégionale de la recherche archéologique du sud-est, chargée lors de sa réunion des 1er et 2 octobre 1997 de fournir un avis sur les qualités scientifiques des responsables des équipes s’étant proposées pour exécuter le marché, a fourni un avis positif sur le responsable du projet de l’AFAN mais s’est abstenue de donner son avis sur le responsable du projet de l’ARQUEOCIENCIA ; que, cet avis étant nécessaire à la délivrance par le Préfet de l’autorisation de fouilles, l’abstention de la commission excluait de facto l’ARQUEOCIENCIA de l’exécution du marché ; que, faute de cet avis, il n’est pas possible de savoir si l’écart de plus de 40 % qui sépare le prix proposé par l’AFAN de celui de sa concurrente espagnole traduit le caractère anormalement élevé de ce prix, l’inadéquation des prestations ou bien s’explique par l’insuffisance scientifique du projet de l’ARQUEOCIENCIA ; que le caractère abusif du projet de l’AFAN n’est donc pas démontré ;

Considérant, au surplus, qu’il ressort de la lettre en date du 7 juin 1996, adressée au président du conseil général des Pyrénées-Orientales par le directeur régional des affaires culturelles, déjà citée, que ce dernier a précisé, en ce qui concerne les conditions d’intervention de l’AFAN, que : "Le projet de convention qui vous a été transmis est fondé sur le modèle type des documents établis pour la mise en oeuvre de ce type de travaux, étant entendu qu’il s’agit d’une trame sur laquelle vous êtes invités à introduire les modifications qui vous conviendraient" ; qu’il résulte de la lettre adressée le 26 juillet 1996, par le président du conseil général des Pyrénées-Orientales, au ministre de la culture (cote 41) qu’une réunion a effectivement eu lieu, le 18 juillet 1996, entre les services du département, ceux de la direction régionale des affaires culturelles et un représentant de l’AFAN mais que cette réunion "n’a pas permis d’avancer vers une solution acceptable" ;

Considérant qu’ainsi, le 3ème grief, tiré d’un abus d’exploitation de la position dominante de l’AFAN, n’est pas établi ;

5. Sur les pressions imputées à l’AFAN sur d’éventuels concurrents (4ème  grief) :

Considérant qu’il ne ressort d’aucun élément du dossier que l’état ou l’AFAN ait exercé des pressions sur les entreprises susceptibles de concourir pour l’attribution du marché des fouilles de sauvetage du site du "Mas Miraflor" ; qu’il n’est pas établi, en particulier, que l’AFAN serait intervenue pour demander à certains archéologues de retirer leur candidature, les initiatives dénoncées paraissant, en réalité, émaner d’une société d’archéologie médiévale ayant son siège à l’université de Caen (cote 60) ainsi que du syndicat général des personnels du service public de l’archéologie (cote 62) ; que, de même, il n’est pas démontré que l’AFAN soit l’organisatrice des manifestations qui ont eu lieu devant l’Hôtel du département des Pyrénées-Orientales lors du vote de la délibération ouvrant à la concurrence l’attribution du marché en cause ;

6. Sur l’avantage procuré à l’AFAN par la connaissance de la carte archéologique de la France et par la réalisation des fouilles de sondage (5ème grief) :

Considérant que, s’il est exact que l’état a bénéficié, par l’intermédiaire de l’AFAN, des données recueillies par cette dernière dans le cadre de l’établissement de sa mission d’élaboration de la carte archéologique de France, il n’est pas établi par l’instruction que cette connaissance lui ait conféré un avantage de nature à lui permettre d’obtenir la dévolution du marché en cause ; que, de même, il n’est pas démontré que la réalisation, par des salariés de l’AFAN, des fouilles de sondage du site ait été de nature à conférer à l’état un avantage dans le cadre de la compétition l’opposant à la société espagnole ARQUEOCIENCIA ; qu’en particulier, il ne ressort pas de la lecture des documents contenus dans les propositions faites initialement au département ou du procès-verbal de la réunion de la commission interrégionale de l’archéologie du Sud-Est consacrée à l’examen du dossier présenté par l’AFAN qu’une éventuelle connaissance du site ait permis à l’état d’emporter le marché en cause ;

Considérant que l’article L. 462-6 du code de commerce dispose que : "Lorsqu’aucune pratique de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché n’est établie, le Conseil de la concurrence peut décider, après que l’auteur de la saisine et le commissaire du Gouvernement ont été mis à même de consulter le dossier et de faire valoir leurs observations, qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la procédure " ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il doit être fait application de ce texte en ce qui concerne les troisième, quatrième et cinquième griefs ;

DéCIDE

Article 1 - La saisine est déclarée irrecevable du chef des pratiques faisant l’objet des premier et deuxième griefs.

Article 2 - Il n’y a pas lieu de poursuivre la procédure en ce qui concerne les troisième, quatrième et cinquième griefs.

Délibéré sur le rapport oral de M. Lenoir, par Mme Pasturel, vice-présidente, présidant la séance, M. Nasse, vice-président et M. Bargue, membre.

 


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