format pour impression
(imprimer)

LES AUTRES BREVES :
16/07/2004 : Le Conseil d’Etat confirme la décision de la Fédération Française de Football (FFF) homologuant les résultats du Championnat National pour la saison 2003-2004
11/07/2004 : Le droit public face à sa codification : les PGD garderont-ils leur place ?
10/07/2004 : Le Tribunal administratif confirme la suspension du maire de Bègles
10/07/2004 : Nouvelles règles relatives au dépôt d’objets d’art et d’ameublement dans les administrations
10/07/2004 : Attribution de points d’indice majoré à certains fonctionnaires
4/07/2004 : Polynésie française : la croix de la discorde
3/07/2004 : Vers la création d’un pôle juridictionnel administratif spécialisé en matière d’expulsion ?
2/07/2004 : Le Président de la CAA de Versailles nommé
2/07/2004 : Simplification de la composition et du fonctionnement des commissions administratives et réduction de leur nombre
2/07/2004 : Simplification du régime d’entrée en vigueur, de transmission et de contrôle des actes des autorités des établissements publics locaux d’enseignement



30 novembre 2001

Le Conseil constitutionnel restreint les possibilités d’unification du contentieux entre les mains d’une unique juridiction.

Par une décision en date du 27 novembre 2001 (décision n° 2001-451 DC relative à la loi portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles), le Conseil constitutionnel s’est de nouveau penché sur la question de réserve de compétence au juge administratif vis-à-vis de la juridiction judiciaire.

L’article 1er de la loi déférée au juge constitutionnel modifiait l’article L. 752.27 du nouveau Code rural pour donner compétence, sous réserve des dispositions de l’article L. 752-19, à la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale en ce qui concerne les litiges relatifs à l’application des dispositions en cause. Se fondant sur la jurisprudence qu’il a pu dégager depuis 1987, le Conseil constitutionnel a censuré cet article.

En effet, dans sa décision n° 86-224 DC du 23 janvier 1987 (décision "Conseil de la concurrence"), le juge constitutionnel avait estimé "que les dispositions des articles 10 et 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 et du décret du 16 fructidor An III qui ont posé dans sa généralité le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires n’ont pas en elles-mêmes valeur constitutionnelle ; que, néanmoins, conformément à la conception française de la séparation des pouvoirs, figure au nombre des "principes fondamentaux reconnus par les lois de la République" celui selon lequel, à l’exception des matières réservées par nature à l’autorité judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l’annulation ou la réformation des décisions prises, dans l’exercice des prérogatives de puissance publique, par les autorités exerçant le pouvoir exécutif, leurs agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes publics placés sous leur autorité ou leur contrôle". Le juge constitutionnel posait donc une garantie constitutionnelle au partage de compétences entre l’ordre judiciaire et administratif.

Mais, il avait immédiatement limité ce principe sur le fondement de la bonne administration de la justice et avait donc permis une attribution complète des litiges à l’un ou l’autre des ordres de juridiction. Il avait confirmé cette exception dans une seconde décision en date du 23 juillet 1996 (décision n° 96-378 DC relative à la loi de réglementation des télécommunications). Le juge relevait que "toutefois lorsque l’application d’une législation ou d’une réglementation spécifique pourrait engendrer des contestations contentieuses diverses qui se répartiraient, selon les règles habituelles de compétence, entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire, il est loisible au législateur, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, d’unifier les règles de compétence au sein de l’ordre juridictionnel principalement intéressé ; qu’une telle unification peut être opérée tant en fonction de l’autorité dont les décisions sont contestées, qu’au regard de la matière concernée".

En l’espèce, l’exception aurait pu s’appliquer vu que de l’application de la loi déférée de nombreux actes pouvaient être déférés tantôt au juge administratif, tantôt au juge du contentieux des affaires de sécurité sociale. Une unification pouvait donc avoir lieu au regard de la matière concernée.

Néanmoins, les 9 sages de la rue Montpensier relève que "certaines décisions, prises sur le fondement du chapitre II susmentionné, émanent d’une autorité administrative de l’Etat ; qu’elles comportent l’exercice de prérogatives de puissance publique ; qu’elles sont en outre détachables des relations existant entre les exploitants agricoles et les organismes chargés de gérer le nouveau régime de sécurité sociale". C’est notamment le cas des arrêtés ministériels délivrant, refusant de délivrer ou retirant à une entreprise d’assurances l’autorisation de participer à la gestion de ce nouveau régime.

Le Conseil constitutionnel en déduit donc qu’en l’espèce, "la bonne administration de la justice ne justifie pas qu’il soit dérogé à la répartition normale des compétences entre les deux ordres de juridiction en attribuant la connaissance de tels actes aux juridictions du contentieux général de la sécurité sociale".

Cette solution peut paraître surprenante. En effet, dans sa décision de 1987, le juge constitutionnel avait admis dans un soucis de bonne administration de la justice, le transfert de compétence en ce qui concerne les actes du Conseil de la concurrence au juge judiciaire. Il avait récidivé en 1996 en autorisant le transfert du contentieux des décisions de l’Autorité de régulation des télécommunications au juge judiciaire.

Quel élément peut justifier un tel recul ? Il s’agit sans nul doute, en l’espèce, de la possibilité pour le juge judiciaire, d’opérer un contrôle de légalité des actes administratifs (arrêtés ministériels ...) naissant de l’application du nouveau régime de sécurité sociale créé. Dans les affaires précédentes, le contentieux transféré au juge judiciaire n’était pas un contentieux d’actes réglementaires émanant de l’autorité exécutive, mais un contentieux de décisions individuelles prises par des autorités administratives indépendantes tranchant un litige entre plusieurs acteurs économiques.

Une limite à l’unification des règles habituelles de compétence paraît se dégager, limite fondée sur trois critères cumulatifs : l’existence d’actes pris par une autorité administrative de l’Etat (décret, arrêté ministériel, voire circulaire), comportant l’exercice d’une prérogative de puissance publique, et détachables du reste du contentieux naissant de l’application des dispositions en question. (BT)

 


©opyright - 1998 - contact - Rajf.org - Revue de l'Actualité Juridique Française - L'auteur du site
Suivre la vie du site