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le "plein salaire" auquel elles font référence et qui doit être versé à l’ouvrier d’Etat en congé de maladie pendant les trois premiers mois de ces congés sur une période de douze mois doit être déterminé à partir du forfait mensuel horaire de rémunération auquel doivent s’ajouter les primes qui lui ont été versées dans les trois mois précédant le début du congé et qui ont donné lieu à retenue

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 281063

M. G.

M. Bertrand du Marais
Rapporteur

M. Pierre Collin
Commissaire du gouvernement

Séance du 11 juin 2008
Lecture du 3 septembre 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux

Vu l’ordonnance en date du 23 mai 2005, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 1er juin 2005, par laquelle le président de la cour administrative d’appel de Bordeaux a transmis au Conseil d’Etat, en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour administrative d’appel par M. Thierry G. ;

Vu le pourvoi, enregistré au greffe de la cour administrative d’appel de Bordeaux, le 27 février 2004, présenté par M. Thierry G. et tendant à ce que la cour :

1°) annule le jugement du 7 octobre 2003 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant, d’une part, à l’annulation de la décision implicite de la Caisse des dépôts et consignations rejetant sa demande de révision de sa pension, ensemble la décision de rejet du 7 mars 2001 du ministre de la défense, et, d’autre part, à ce qu’il soit enjoint à la Caisse des dépôts et consignations de prendre en compte pour le calcul du coefficient majorateur une période de congé maladie et de s’acquitter des arrérages échus sous astreinte ;

2°) réglant l’affaire au fond, annule la décision attaquée et enjoigne, sur le fondement des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, à la Caisse des dépôts et consignations et à l’Etat de réviser la pension de M. G. en prenant en compte pour le calcul du coefficient majorateur la période de congé maladie et de s’acquitter, sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans un délai d’un mois, des arrérages échus dès l’ouverture des droits à pension ;

3°) mette à la charge de la Caisse des dépôts et consignations le versement d’une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 65-836 du 24 septembre 1965 ;

Vu le décret n° 72-154 du 24 février 1972 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bertrand du Marais, Conseiller d’Etat,

- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. G. et de Me Odent, avocat de la Caisse des dépôts et consignations,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. G., ouvrier de l’Etat plongeur scaphandrier, se pourvoit en cassation contre le jugement du 7 octobre 2003 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision implicite de la Caisse des dépôts et consignations, née le 25 mars 2001, refusant de prendre en compte, dans le coefficient de valorisation servant au calcul de sa pension de retraite, les primes de plongée au titre du maintien de sa rémunération d’activité pendant les mois de juillet, août et septembre 1999 alors qu’il était placé en congé de maladie à compter du 12 juillet 1999 avant sa mise à la retraite pour invalidité, ensemble la décision de rejet du 7 mars 2001 ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu’aux termes de l’article 9 du décret du 24 septembre 1965 relatif au régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’Etat, alors en vigueur : "I. La pension est basée sur les émoluments annuels soumis à retenue afférents à l’emploi occupé effectivement depuis six mois au moins par l’intéressé au moment de sa radiation des contrôles ou, dans le cas contraire, sauf s’il y a eu rétrogradation par mesure disciplinaire, sur les émoluments annuels soumis à retenue afférents à l’emploi antérieurement occupé (.) / En ce qui concerne les intéressés rémunérés en fonction des salaires pratiqués dans l’industrie, les émoluments susvisés sont déterminés par la somme brute obtenue en multipliant par 1.960 le salaire horaire de référence correspondant à leur catégorie professionnelle au moment de la radiation des contrôles ou, dans le cas visé à l’alinéa précédent, à la catégorie professionnelle correspondant à l’emploi occupé. Ce produit est affecté d’un coefficient égal au rapport existant entre le salaire horaire résultant des gains et de la durée effective du travail pendant l’année expirant à la fin de la période dont il doit éventuellement être fait état et le salaire horaire de référence durant la même année" ; qu’aux termes de l’article 28 du même décret : "I. Les personnels visés à l’article 1er supportent une retenue de 8, 9 %, calculée sur les émoluments représentés : (.) / b) Pour les intéressés rémunérés en fonction des salaires pratiqués dans l’industrie, par la somme brute obtenue en multipliant par 1.960 le salaire horaire moyen déterminé d’après le nombre d’heures de travail effectif dans l’année et les gains y afférents constitués par le salaire proprement dit et, éventuellement, la prime d’ancienneté, la prime de fonction, la prime de rendement ainsi que les heures supplémentaires, à l’exclusion de tout autre avantage, quelle qu’en soit la nature (.)" ; que la prime de plongée, qui est liée à la nature de l’activité professionnelle exercée par l’intéressé et non pas à ses modalités d’exercice, remplit les conditions pour être qualifiée de prime de fonction au sens des dispositions précitées de l’article 28 du décret du 24 septembre 1965 et supporte la retenue pour pension ;

Considérant qu’aux termes de l’article 2 du décret du 24 février 1972 relatif aux congés en cas de maladie, de maternité et d’accidents du travail dont peuvent bénéficier certains personnels ouvriers de l’Etat mensualisés, dans sa rédaction applicable en l’espèce : "En cas de maladie, les personnels (.) peuvent obtenir, par période de douze mois et sur production d’un certificat médical (.), un congé de trois mois à plein salaire (.)" ; qu’en vertu de l’article 7 du même décret : "Le salaire dont il est tenu compte pour l’application des articles 2, 3, 4 et 6 est déterminé à partir du forfait mensuel de rémunération" ; qu’il résulte de ces dispositions que le "plein salaire" auquel elles font référence et qui doit être versé à l’ouvrier d’Etat en congé de maladie pendant les trois premiers mois de ces congés sur une période de douze mois doit être déterminé à partir du forfait mensuel horaire de rémunération auquel doivent s’ajouter les primes qui lui ont été versées dans les trois mois précédant le début du congé et qui ont donné lieu à retenue ; que la prime de plongée versée en congé de maladie pendant les trois premiers mois de ce congé doit être prise en compte dans le "salaire horaire résultant des gains" servant au calcul du coefficient mentionné au I de l’article 9 du décret du 24 septembre 1965 ; qu’il en résulte que c’est au prix d’une erreur de droit que le tribunal administratif de Bordeaux a jugé que la prime de plongée, dont il résultait des pièces de son dossier qu’elle avait été versée à M. G. en application des textes précités pendant les trois premiers mois de ses congés de maladie intervenus pendant l’année précédant sa mise à la retraite pour invalidité, ne devait pas entrer en ligne de compte pour la fixation du "salaire horaire résultant des gains" servant au calcul du coefficient prévu au I de l’article 9 du décret du 24 septembre 1965 ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat, s’il prononce l’annulation d’une décision d’une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l’affaire au fond si l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au fond ;

Sur les conclusions aux fins de révision à raison d’une erreur dans le décompte des heures de travail figurant dans les bulletins de salaires d’octobre et de novembre 1998 de la durée des services de M. G. :

Considérant qu’il résulte de l’instruction que, M. G. a soutenu, par un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif le 8 juin 2002, que la liquidation de sa pension était fondée sur une erreur dans le nombre d’heures de travail effectuées durant les mois d’octobre et novembre 1998 ; que cette demande de révision, présentée pour la première fois devant le tribunal administratif et distincte de celle ayant donné lieu à la décision de refus attaquée, n’est pas recevable faute d’être dirigée contre un refus préalable de révision opposé par l’administration sur ce point ;

Sur les conclusions aux fins de révision du coefficient de majoration à raison de l’absence de prise en compte, pour le calcul de ce coefficient, de la prime de plongée au titre des mois de juillet à septembre 1999 :

Considérant qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que c’est à tort que la Caisse des dépôts et consignations et le ministre de la défense ont refusé de procéder à la révision de la pension de M. G. pour tenir compte, dans le calcul du coefficient prévu au I de l’article 9 du décret du 24 septembre 1965, des primes de plongée qui devaient être incluses dans la rémunération maintenue à l’intéressé pendant les congés de maladie intervenus dans l’année précédant son départ à la retraite pour invalidité ; que M. G. est fondé à demander l’annulation de ces décisions ;

Sur les conclusions aux fins d’injonction :

Considérant que le contentieux des pensions civiles et militaires de retraite est un contentieux de pleine juridiction ; qu’il appartient, dès lors, au juge saisi de se prononcer lui-même sur les droits des intéressés, sauf à renvoyer à l’administration compétente, et sous son autorité, le règlement de tel aspect du litige dans des conditions précises qu’il lui appartient de lui fixer ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de prescrire à la Caisse des dépôts et consignations de réviser, dans le délai d’un mois suivant la notification de la présente décision, le coefficient de majoration servant de fondement au calcul du montant de la pension de retraite versée à M. G. en application du I de l’article 9 précité du décret du 24 septembre 1965 en intégrant la prime de plongée perçue pendant la période des mois de juillet, août et septembre 1999 ; que cette révision prendra effet à compter de la date d’ouverture des droits à pension de M. G., soit le 1er octobre 1999 ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la requête tendant à ce que cette injonction soit assortie d’une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M. G. qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à la Caisse des dépôts et consignations la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations le versement à M. G. de la somme de 2 900 euros au titre des frais exposés par lui devant le Conseil d’Etat et devant le tribunal administratif de Bordeaux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 7 octobre 2003 et la décision implicite de la Caisse des dépôts et consignations rejetant la demande de M. G. tendant à la révision de sa pension, ensemble la décision de rejet du 7 mars 2001 du ministre de la défense, sont annulés.

Article 2 : M. G. est renvoyé devant la Caisse des dépôts et consignations afin qu’il soit procédé à la liquidation de sa pension de retraite, y compris les arrérages échus, dans les conditions précisées par les motifs de la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. G. devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejeté.

Article 4 : La Caisse des dépôts et consignations versera à M. G. une somme de 2 900 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de la Caisse des dépôts et consignations tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Thierry G., à la Caisse des dépôts et consignations et au ministre de la défense.

 


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