Conseil d’Etat, 29 avril 2002, n° 240322, M. C.

Il résulte des termes mêmes de l’article L. 521-3 du code de justice administrative, que saisi sur le fondement de cet article, le juge des référés peut prononcer toute mesure, à condition que l’urgence le justifie, qu’elle soit utile et ne fasse obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative. Il est ainsi possible, en application de ces dispositions, au juge des référés de prononcer des injonctions à l’égard de l’administration si les trois conditions mentionnées ci-dessus sont réunies. En estimant que l’article L. 521-3 du code de justice administrative ne lui ouvrait pas cette possibilité, le juge des référés du tribunal administratif de Caen a entaché son ordonnance d’une erreur de droit.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 240322

M. C.

M. Lenica, Rapporteur

Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement

Séance du 3 avril 2002

Lecture du 29 avril 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 5ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête enregistrée le 21 novembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Bruno C. ; M. C. demande au Conseil d’Etat d’annuler l’ordonnance du 7 novembre 2001 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Caen, statuant en application de l’article L. 521-3 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à ce que soit ordonné au président de la chambre de métiers de l’Orne de prendre une position quant à la suite qu’il entendait donner à la délibération du 12 septembre 2001 du bureau de cette chambre adoptant le principe de sa révocation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lenica, Auditeur,
- les observations de Me Odent, avocat de M. C. et de Me Foussard, avocat de la chambre de métiers de l’Orne,
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-3 du code de justice administrative : "En cas d’urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative" ;

Considérant que M. C., secrétaire général de la chambre de métiers de l’Orne, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Caen d’ordonner au président de cette chambre de prendre une position, quelle qu’elle soit, sur la suite qu’il entendait donner à la délibération du 12 septembre 2001 par laquelle le bureau de la chambre a adopté le principe de sa révocation ;

Considérant qu’il résulte des termes mêmes de l’article L. 521-3 précité, que saisi sur le fondement de cet article, le juge des référés peut prononcer toute mesure, à condition que l’urgence le justifie, qu’elle soit utile et ne fasse obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative ; qu’il est ainsi possible, en application de ces dispositions, au juge des référés de prononcer des injonctions à l’égard de l’administration si les trois conditions mentionnées ci-dessus sont réunies ; qu’en estimant que l’article L. 521-3 du code de justice administrative ne lui ouvrait pas cette possibilité, le juge des référés du tribunal administratif de Caen a entaché son ordonnance d’une erreur de droit ; qu’il suit de là que M. C. est fondé à demander, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen de sa requête, l’annulation de l’ordonnance attaquée ;

Considérant qu’il appartient au Conseil d’Etat, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de statuer sur la demande de référé présentée par M. C. devant le tribunal administratif de Caen ;

Considérant que la mesure demandée par M. C. n’entre pas dans le champ de celles, de nature provisoire ou conservatoire, que le juge des référés peut ordonner sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative ; qu’il suit de là que la demande présentée par M. C. doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés par les parties et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la chambre de métiers de l’Orne, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à M. C. la somme que ce dernier demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit à la demande de la chambre tendant à ce que M. C. soit condamné à lui verser une somme au titre des frais qu’elle a exposés ;

D E C I D E :

Article 1er : L’ordonnance en date du 7 novembre 2001 du juge des référés du tribunal administratif de Caen est annulée.

Article 2 : La demande de M. C. tendant à ce qu’il soit ordonné à la chambre de métiers de l’Orne de prendre une position sur sa situation au sein de la chambre est rejetée.

Article 3 : Les demandes présentées par M. C. et la chambre de métiers de l’Orne sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Bruno C. et à la chambre de métiers de l’Orne.

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