Conseil d’Etat, 25 mars 2002, n° 235942, Elections municipales de Case Pilote (Martinique)

Il résulte de l’instruction que la liste "Emergence nouvelle" pour les élections municipales dans la commune de Case Pilote le 11 mars 2001, si elle faisait alterner des groupes de trois hommes et trois femmes, ne comptait, sur un total de 27 noms, que 12 candidates pour 15 candidats. Son enregistrement par le préfet était par suite irrégulier. La substitution le 10 mars 2001, soit postérieurement au dépôt des candidatures à la préfecture le 7 mars 2001, de la candidature de Mme Catherine Gateau à celle de M. Lucien Gateau n’a pas eu pour effet de régulariser cet enregistrement. Par suite l’enregistrement et la participation de cette liste au second tour, le 18 mars 2001, étaient également irréguliers.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 235942

Elections municipales de Case Pilote (Martinique)

M. Casas, Rapporteur

Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement

Séance du 22 février 2002

Lecture du 25 mars 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil dEtat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et Sème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 12juillet 2001, présentée par M. Pierre N. ; M. N. demande que le Conseil d’Etat :

1°) annule le jugement en date du 12 juin 2001 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France n’a que partiellement fait droit à sa protestation en annulant l’élection de M. Augustin Bonbois, de M. Edouard Régis-Constant et de Mmes Elisabeth Bernet et Marie-Gabrielle Sévère en qualité de conseillers municipaux de la commune de Case Pilote et a déclaré vacants les quatre sièges correspondants ;

2°) annule l’ensemble des opérations électorales qui se sont déroulées les 11 et 18 mars 2001 pour la désignation des conseillers municipaux de la commune de Case Pilote ;

3°) condamne les défendeurs à verser à M. N. la somme de 10.000F (1524,49 euros) sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Casas, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 264 du code électoral, dans sa rédaction issue de la loi du 6 juin 2000 : "Une déclaration de candidature est obligatoire pour chaque tour de scrutin. Sur chacune des listes, l’écart entre le nombre des candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un. Au sein de chaque groupe entier de six candidats dans l’ordre de présentation de la liste doit figurer un nombre égal de candidats de chaque sexe" ; qu’aux termes de l’article L. 265 du même code : "La déclaration de candidature résulte du dépôt à la préfecture ou à la sous-préfecture d’une liste répondant aux conditions fixées aux articles L. 260, L263 et L. 264. il en est délivré récépissé .... Récépissé ne peut être délivré que si les conditions énumérées au présent article sont remplies" ; qu’aux termes de l’article L 267 du même code : "Aucun retrait volontaire ou remplacement de candidat n’est accepté après le dépôt de la liste." ; qu’enfin, l’article L. 269 dispose : "Est nul tout bulletin établi au nom d’une liste dont la déclaration de candidature n’a pas été régulièrement enregistrée" ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la liste "Emergence nouvelle", conduite par M. Frantz Berose, pour les élections municipales dans la commune de Case Pilote le 11 mars 2001, si elle faisait alterner des groupes de trois hommes et trois femmes, ne comptait, sur un total de 27 noms, que 12 candidates pour 15 candidats ; que son enregistrement par le préfet était par suite irrégulier ; que la substitution le 10 mars 2001, soit postérieurement au dépôt des candidatures à la préfecture le 7 mars 2001, de la candidature de Mme Catherine Gateau à celle de M. Lucien Gateau n’a pas eu pour effet de régulariser cet enregistrement ; que par suite l’enregistrement et la participation de cette liste au second tour, le 18 mars 2001, étaient également irréguliers ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la participation irrégulière au scrutin de la liste "Emergence nouvelle", arrivée en tête au 1er tour et présente avec deux autres listes au second tour, où elle a obtenu 31% des voix, a été de nature à altérer la sincérité du scrutin dans son ensemble ; qu’il y a lieu, par suite, d’annuler l’ensemble des opérations électorales qui se sont déroulées les 11 et 18 mars 2001 à Case-Pilote en vue du renouvellement des conseillers municipaux ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. Pierre N. est fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Fort-de-France, par le jugement attaqué, s’est borné à annuler l’élection de MM. Augustin Bonbois et Edouard Régis-Constant et de Mmes Elisabeth Bernet et Marie-Gabrielle Sévère, candidats de la liste "Emergence nouvelle", et a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à l’annulation de l’ensemble des opérations électorales ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner MM. Armet et Montplaisir à payer à M. N. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. N. qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Armet la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les opérations électorales qui se sont déroulées les ll et 18 mars 2001 pour le renouvellement des conseillers municipaux de Case-Pilote (Martinique) sont annulées en totalité.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Fort-de-France en date du 12 juin 2001 est annulé en tant qu’il est contraire à l’article 1er de la présente décision.

Article 3 Les conclusions de M. N. et les conclusions de M. Armet tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Pierre N., à M. Armet, à M. Monplaisir et au ministre de l’intérieur.

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Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article602