La France ouvre les appels locaux à la concurrence

Par Benoit Tabaka

Dans une décision du 18 juillet 2001, l’Autorité de régulation des télécommunications (ART) a défini les conditions et les délais de mise en œuvre de la sélection de l’opérateur pour les appels locaux à l’intérieur d’un même département. Ainsi, à partir du 31 décembre 2001, tout abonné pourra librement choisir l’opérateur téléphonique pour passer ses appels téléphoniques locaux. Cette décision intervient quatre ans après l’ouverture à la concurrence des appels longue distance, internationaux et dernièrement des appels d’un poste fixe vers les mobiles.

Dans le cadre de l’ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications, le consommateur a la possibilité, depuis le 1er janvier 1998, de choisir l’opérateur téléphonique qui transportera et facturera certaines de ses communications. Ce choix s’opère, soit lors de chaque appel en modifiant le premier chiffre du numéro appelé, soit en changeant d’opérateur téléphonique par défaut au travers du mécanisme dit de la présélection.

Le cadre juridique est fixé par l’article D. 99-16 du Code des postes et télécommunications qui prévoit que le catalogue d’interconnexion des opérateurs inscrits sur la liste établie en application du 7° de l’article L. 36-7 du Code des postes et télécommunications, doit comporter une offre de sélection appel par appel et une offre de présélection. Ce même article donne compétence à l’ART pour préciser les services concernés par ces dispositions ainsi que les conditions et les délais de mise en œuvre de la sélection du transporteur appel par appel et de la présélection.

Une ouverture à la concurrence progressive mais non totale

A l’occasion de la concertation mise en œuvre en 1997 pour définir les conditions de l’introduction du mécanisme de sélection de l’opérateur appel par appel, les acteurs présents avaient estimé que "les conditions initiales du développement des réseaux concurrents ne leur permettraient pas de collecter les appels locaux dans des conditions économiquement viables". Ainsi, ils avaient demandé l’exclusion, dans un premier temps, des appels locaux du champ des services de sélection du transporteur. Cette demande avait été entérinée par l’ART, par une décision du 17 octobre 1997, qui s’applique encore aujourd’hui tant pour le mécanisme de sélection appel par appel que pour la présélection. Cette décision donnait donc un monopole de droit à France Telecom pour acheminer et facturer l’ensemble des appels internes à la zone locale de tri, les numéros spéciaux, les numéros courts et d’urgence. La définition des zones locales de tri a été précisée par cette décision de l’ART du 17 octobre 1997. Ces zones correspondent, sauf en Ile-de-France et en Corse, aux départements métropolitains et d’outre-mer.

Aujourd’hui, les conditions tant techniques qu’économiques de l’interconnexion ont changé et permettent aux nouveaux fournisseurs du service téléphonique de proposer des offres de sélection du transporteur qui incluent les appels locaux. Ainsi, par une décision du 18 juillet 2001, l’ART ouvre donc à la concurrence la dernière porte du secteur des télécommunications. A partir du 31 décembre 2001, l’utilisateur final pourra choisir l’opérateur téléphonique qui acheminera et facturera ses appels passés à l’intérieur de son département. Ce changement devra s’accompagner d’une "nécessaire information des consommateurs par les opérateurs".

L’ART a, en effet, demandé aux opérateurs, lorsqu’ils décideront l’extension de leurs services de présélection aux appels locaux, de veiller à informer au préalable de façon détaillée leurs clients qui ont déjà souscrit à la présélection pour les appels longue distance. Cette information doit être acheminée dans un délai suffisant pour leur permettre d’exercer leur choix en pleine connaissance de cause sur "les conditions techniques et tarifaires de l’offre et les possibilités effectives dont ils disposent pour confier l’acheminement de leurs appels locaux à d’autres opérateurs".

L’abonné ne pourra pas pour autant se désengager totalement de France Telecom. L’opérateur historique continue d’assurer le raccordement physique de l’abonné, la facturation de l’abonnement aux clients, et la fourniture de l’acheminement des communications vers les numéros spéciaux, courts ou d’urgence.

Zone locale élargie contre zone locale de tri

A ce jour, l’ensemble des appels internes à la zone locale de tri est acheminé par l’opérateur historique. Cette zone correspond au département, sauf exceptions. Or, une autre zone existe : la zone locale élargie qui est "mouvante" autour de l’abonné. Elle existait bien avant la mise en œuvre de la concurrence dans le secteur des télécommunications et, au sein de celle-ci, France Telecom facture les appels passés au prix d’une communication locale.

Contrairement à la zone locale de tri qui correspond systématiquement au département, la zone locale élargie peut s’étendre au-delà du département. Un problème se pose dès lors que la personne appelée est située dans une zone locale élargie en dehors du département. En pratique, un tel appel autrefois facturé par France Telecom au prix d’une communication locale en raison de sa position dans la zone locale élargie, est désormais facturé comme un appel longue distance par l’opérateur alternatif. Ce changement de facturation est automatique en cas de présélection.

L’ouverture à la concurrence n’est donc pas systématiquement source d’économies pour le consommateur final.

Benoit Tabaka

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Citation : Benoit Tabaka, La France ouvre les appels locaux à la concurrence , 30 juillet 2001, http://www.rajf.org/spip.php?article582

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