Lorsqu’un exploitant agricole vend des parts d’une société civile agricole dans laquelle il exerce sa profession, la limite fixée par l’article 151 septies s’apprécie au regard de l’ensemble des recettes agricoles dont il dispose.
CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 288420
M. R.
M. Jean-Marc Anton
Rapporteur
M. Laurent Olléon
Commissaire du gouvernement
Séance du 17 septembre 2008
Lecture du 7 novembre 2008
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 8ème sous-section de la section du contentieux
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 décembre 2005 et 24 avril 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Christophe R. ; M. R. demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 18 octobre 2005 par lequel la cour administrative d’appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement du 30 septembre 2003 du tribunal administratif d’Amiens rejetant sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l’année 1996 et à la décharge de cette imposition ;
2°) réglant l’affaire au fond, de le décharger de l’imposition litigieuse ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Jean-Marc Anton, Auditeur,
les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. R.,
les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. R., qui exerce la profession d’agriculteur, a cédé le 29 octobre 1996 42 % des parts sociales d’une société civile viticole, réalisant une plus-value de 1 996 000 F qu’il n’a pas déclarée, l’estimant exonérée sur le fondement de l’article 151 septies du code général des impôts ; que l’administration a imposé cette plus-value au motif que les recettes de l’exploitation agricole de M. R. augmentées de sa quote-part des recettes de la société civile étaient supérieures à la limite fixée par cet article ; que M. R. demande l’annulation de l’arrêt du 18 octobre 2005 par lequel la cour administrative d’appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement du tribunal administratif d’Amiens du 30 septembre 2003 rejetant sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l’année 1996 ;
Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des termes de la requête d’appel de M. R. qu’il ne s’est pas explicitement prévalu sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales de l’instruction 4 A-6-83 du 9 juin 1983 et de l’instruction 5 E-4-97 du 13 août 1997, dont il s’est borné à rappeler certains termes dans un exposé des dispositions applicables, sans fonder sa demande en décharge sur leurs énonciations ; que, par suite, la cour administrative d’appel, en ne se prononçant pas sur ces deux instructions, n’a pas insuffisamment motivé son arrêt ;
Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 151 septies du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition en litige : "Les plus-values réalisées dans le cadre d’une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale par des contribuables dont les recettes n’excèdent pas le double de la limite du forfait ou de l’évaluation administrative sont exonérées, à condition que l’activité ait été exercée pendant au moins cinq ans et que le bien n’entre pas dans le champ d’application de l’article 691" ; qu’aux termes du I de l’article 69 du même code : "Lorsque les recettes d’un exploitant agricole, pour l’ensemble de ses exploitations, dépassent une moyenne de 500 000 F mesurée sur deux années consécutives, l’intéressé est obligatoirement imposé d’après son bénéfice réel." ; qu’aux termes de l’article 70 du même code dans sa rédaction alors applicable : "Pour l’application des articles 69, 69 A, 69 C, 69 D et 72, il est tenu compte des recettes réalisées par les sociétés et groupements non soumis à l’impôt sur les sociétés dont le contribuable est membre à proportion de ses droits dans les bénéfices de ces sociétés et groupements (.)" ;
Considérant qu’il résulte de ces dispositions que lorsqu’un exploitant agricole vend des parts d’une société civile agricole dans laquelle il exerce sa profession, la limite fixée par l’article 151 septies s’apprécie au regard de l’ensemble des recettes agricoles dont il dispose ; que, par suite, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que devaient être retenus pour le calcul de ce seuil le total des recettes provenant de l’activité agricole exercée à titre individuel par M. R. et la quote-part des recettes de la société civile correspondant à ses droits dans cette société et que, dans ces conditions, le montant de ces sommes ne permettait pas au requérant de bénéficier de l’exonération prévue à l’article 151 septies du code général des impôts ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. R. doit être rejeté ; qu’en conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées ;
Article 1er : Le pourvoi de M. R. est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Christophe R. et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
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Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article3201