Conseil d’Etat, 27 octobre 2008, n° 294914, Communauté de communes de la Tinée c/ M. K.

Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale qui assurent l’enlèvement des ordures ménagères et qui entendent gérer ce service comme une activité industrielle ou commerciale peuvent substituer une redevance en fonction du service rendu à la taxe d’enlèvement des ordures ménagères

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 294914

COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE
c/ M. K.

M. Xavier Domino
Rapporteur

M. Emmanuel Glaser
Commissaire du gouvernement

Séance du 24 septembre 2008
Lecture du 27 octobre 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 3ème sous-section de la section du contentieux

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juillet et 4 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE, dont le siège est situé 1870 route de La Tinée à Pont de Clans (06420) ; la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance du 5 mai 2006 par laquelle la présidente de la 5ème chambre de la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté l’appel qu’elle a interjeté du jugement du 13 octobre 2005 du tribunal administratif de Nice en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif l’a condamnée à restituer à M. Richard K. la somme de 32, 93 euros qu’elle avait réclamée à ce dernier au titre de la redevance pour enlèvement des ordures ménagères établie au titre de l’année 2002 ;

2°) réglant l’affaire au fond, d’annuler le jugement du tribunal administratif et de rejeter la demande que M. K. a présentée à ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de M. K. la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Xavier Domino, Auditeur,

- les observations de la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le tribunal administratif de Nice a, par un jugement du 13 octobre 2005, d’une part condamné la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE à restituer à M. Richard K. la somme de 32, 93 euros correspondant à la redevance pour enlèvement des ordures ménagères assignée à ce dernier au titre de l’année 2002, d’autre part rejeté comme tardives et donc irrecevables les conclusions de M. K. tendant à l’annulation de la délibération du 29 décembre 2001 par laquelle le conseil communautaire a fixé le tarif de la redevance pour 2002 ; qu’il ressort des pièces versées au dossier soumis aux juges du fond que le jugement du tribunal administratif a fait l’objet de deux notifications successives à la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE ; que la première notification en date du 4 novembre 2005, reçue le 7 novembre, indiquait qu’un pourvoi en cassation pouvait être introduit devant le Conseil d’Etat dans un délai de deux mois ; que la seconde notification en date du 10 novembre 2005, comportait la mention : " La présente notification fait courir le délai d’appel qui est de 2 mois ", ainsi que la mention manuscrite : " Annule et remplace notification du 4/11/2005 " ; qu’en rejetant par l’ordonnance attaquée, comme tardive et par suite entachée d’une irrecevabilité non susceptible d’être couverte en cours d’instance, la requête de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE enregistrée au greffe de la cour administrative d’appel de Marseille le 10 janvier 2006, sans rechercher si l’établissement public de coopération intercommunale requérant avait pu légitimement se fier aux indications de la seconde notification, la présidente de la 5ème chambre de la cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit ; qu’ainsi la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE est fondée à demander l’annulation de son ordonnance ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu’il résulte des dispositions des articles L. 2333-76 à L. 2333-79 du code général des collectivités territoriales que les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale qui assurent l’enlèvement des ordures ménagères et qui entendent gérer ce service comme une activité industrielle ou commerciale peuvent substituer une redevance en fonction du service rendu à la taxe d’enlèvement des ordures ménagères ; que la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE a institué une redevance d’enlèvement des ordures ménagères par délibération de son conseil communautaire du 25 novembre 2000 ; qu’elle a, par délibération du 29 décembre 2001, fixé le tarif de la redevance pour l’année 2002 sur le fondement duquel la redevance litigieuse a été mise à la charge de M. K. ;

Considérant que, malgré le caractère forfaitaire du montant de la redevance réclamée aux " foyers éloignés ", lesquels doivent assurer eux-mêmes le transport de leurs déchets ménagers depuis leurs résidences jusqu’aux containers installés à Roubion, avant que les déchets ainsi collectés dans des containers mis à la disposition des usagers ne soient acheminés par camion jusqu’à une station de transit puis à l’usine d’incinération de Nice, la redevance instituée par la communauté de communes, dont ne sont redevables que les usagers du service et qui comporte des éléments de proportionnalité du tarif à acquitter à la valeur du service rendu, ne saurait être regardée comme une taxe ; que, dès lors, le litige qui oppose M. K. à la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE au sujet du paiement de sa redevance concerne les relations entre un usager et un service public industriel ou commercial et relève de la compétence des tribunaux judiciaires ; qu’il suit de là que le jugement du tribunal administratif doit être annulé en tant qu’il condamne la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE à restituer à M. K. la somme de 32, 93 euros au titre de la redevance pour enlèvement des ordures ménagères établie au titre de l’année 2002 et que la demande présentée à ce tribunal par M. K. aux fins de restitution de la redevance doit être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstance de l’espèce, de mettre à la charge de M. K., la somme que réclame la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L’ordonnance du 5 mai 2006 de la présidente de la 5ème chambre de la cour administrative d’appel de Marseille est annulée.

Article 2 : Le jugement du 13 octobre 2005 du tribunal administratif de Nice est annulé en tant qu’il condamne la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE à restituer à M. K. la somme de 32, 93 euros au titre de la redevance pour enlèvement des ordures ménagères établie au titre de l’année 2002.

Article 3 : Les conclusions aux fins de restitution de la redevance pour enlèvement des ordures ménagères établie au titre de l’année 2002 que M. K. a présentées au tribunal administratif de Nice sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 4 : Les conclusions présentées par la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE LA TINEE et à M. Richard K..

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