Conseil d’Etat, 16 janvier 2008, n° 295023, Ministère de l’éducation nationale c/ Mlle K.

Les sanctions autres que celles instituées par les dispositions réglementaires précitées doivent être prévues par le règlement intérieur, celles-ci n’ont ni pour objet ni pour effet de subordonner l’application des sanctions prévues par les textes réglementaires à leur mention dans le règlement intérieur.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 295023

MINISTRE DE L’EDUCATION NATIONALE
c/ Mlle K.

M. Philippe Barbat
Rapporteur

M. Rémi Keller
Commissaire du gouvernement

Séance du 14 décembre 2007
Lecture du 16 janvier 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 4ème et 5ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 4ème sous-section de la Section du contentieux

Vu le recours, enregistré le 10 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présenté par le MINISTRE DE L’EDUCATION NATIONALE, DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE ; le MINISTRE DE L’EDUCATION NATIONALE, DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 24 mai 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy, sur appel de Mlle Ayse K., a annulé le jugement du 25 juillet 2005 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu’il a rejeté la demande de celle-ci dirigée contre la décision du recteur de l’académie de Strasbourg du 17 décembre 2004 confirmant l’exclusion définitive de cette dernière du lycée Jean Rostand, ainsi que ladite décision du 17 décembre 2004 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l’éducation, notamment son article L. 141-5-1 issu de la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004 ;

Vu le décret n° 85-924 du 30 août 1985 modifié ;

Vu le décret n° 85-1348 du 18 décembre 1985 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Barbat, Auditeur,

- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation, issu de l’article 1er de la loi du 15 mars 2004 : "Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. / Le règlement intérieur rappelle que la mise en œuvre d’une procédure disciplinaire est précédée d’un dialogue avec l’élève." ; qu’aux termes de l’article 3 du décret du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d’enseignement : "(.) Le règlement intérieur comporte un chapitre consacré à la discipline des élèves. Les sanctions qui peuvent être prononcées à leur encontre vont de l’avertissement et du blâme à l’exclusion temporaire ou définitive de l’établissement ou de l’un de ses services annexes. (.) Il ne peut être prononcé de sanctions (.) que ne prévoirait pas le règlement intérieur." ; qu’aux termes du 2° de l’article 8 du même décret, dans sa rédaction alors en vigueur : "(.) le chef d’établissement : (.) / e) (.) peut prononcer seul, dans les conditions fixées à l’article 3, les sanctions suivantes : l’avertissement, le blâme ou l’exclusion temporaire, de huit jours au plus, de l’établissement ou de l’un de ses services annexes (.)" ; qu’aux termes du II de l’article 31 du même décret : "Le conseil de discipline (.) a compétence pour prononcer à l’encontre des élèves l’ensemble des sanctions et des mesures mentionnées à l’article 3, dans les conditions fixées par ce même article." ; et qu’aux termes de l’article 31-1 du même décret : "Toute décision du conseil de discipline de l’établissement (.) peut être déférée au recteur de l’académie (.). Le recteur d’académie décide après avis d’une commission académique." ;

Considérant que, s’il résulte des dispositions ci-dessus rappelées que les sanctions autres que celles instituées par les dispositions réglementaires précitées doivent être prévues par le règlement intérieur, celles-ci n’ont ni pour objet ni pour effet de subordonner l’application des sanctions prévues par les textes réglementaires à leur mention dans le règlement intérieur ; que, par suite, en jugeant que le prononcé d’une sanction disciplinaire à l’encontre de Mlle K. sur le fondement des dispositions de l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation était subordonné à la mention de la sanction prononcée dans le règlement intérieur du lycée professionnel Jean Rostand de Strasbourg, dans lequel elle était scolarisée, alors même que cette sanction figurait au nombre de celles dont l’article 3 du décret du 30 août 1985 prévoit qu’elles peuvent être prononcées par le conseil de discipline et, sur appel, par le recteur de l’académie, la cour administrative d’appel de Nancy a entaché son arrêt d’une erreur de droit ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L’EDUCATION NATIONALE, DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE est fondé à demander l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 24 mai 2006 en tant qu’il a annulé la décision de sanction prononcée par le recteur de l’académie de Strasbourg le 17 décembre 2004 à l’encontre de Mlle K. ;

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 1er et 2 de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 24 mai 2006 sont annulés.

Article 2 : L’affaire est renvoyée devant la cour administrative d’appel de Nancy.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L’EDUCATION NATIONALE et à Mlle Ayse K..

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