Conseil d’Etat, 25 juin 2004, n° 250573, Syndicat intercommunal de la Vallée de l’Ondaine

Il résulte de l’article 2.31 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, auquel fait référence le marché litigieux, que des entrepreneurs groupés sont solidaires lorsque chacun d’entre eux est engagé pour la totalité du marché et doit pallier une éventuelle défaillance de ses partenaires, l’un d’entre eux étant désigné dans l’acte d’engagement comme mandataire et représentant l’ensemble des entrepreneurs vis à vis du maître de l’ouvrage pour l’exécution du marché ; que les entreprises qui se sont engagées solidairement par un même marché à participer à l’exécution d’un même ouvrage sans qu’aucune répartition des tâches soit faite entre elles par le marché doivent être regardées comme s’étant donné mandat mutuel de se représenter. Cependant qu’en l’absence de stipulation particulière dans le contrat d’engagement, la désignation d’un mandataire pour représenter les membres du groupement auprès du maître de l’ouvrage n’a pas pour effet de confier à ce mandataire la représentation exclusive des autres entreprises solidaires devant le juge du contrat, qui gardent donc la possibilité de s’adresser à ce dernier pour obtenir le paiement du solde global du marché.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 250573

SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE

M. Aguila
Rapporteur

M. Piveteau
Commissaire du gouvernement

Séance du 4 juin 2004
Lecture du 25 juin 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 2ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 septembre 2002 et 27 janvier 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE, dont le siège est Mairie à Firminy (42702) ; le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt n° 01LY00955 du 25 juillet 2002 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon : d’une part, a annulé à la demande de la société Muller Travaux Publics et autres, le jugement n° 955306 du 1er mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître, leurs demandes tendant à la condamnation du syndicat requérant à leur payer le solde du décompte général du marché conclu pour la conception et la construction d’un collecteur communal, soit diverses sommes au titre de travaux supplémentaires ou modificatifs et des sujétions imprévues ; d’autre part, a renvoyé les sociétés susvisées devant le tribunal administratif de Lyon pour qu’il soit statué sur leurs demandes ;

2°) de mettre à la charge des sociétés Muller Travaux Publics, "Les carrières Foreziennes, EIFFAGE, PONCET, PARILLERON, BER-EST et SEITT la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Aguila, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat du SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la société Muller travaux publics et autres,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le groupement d’entreprises constitué par la société Muller Travaux Publics, la société "Les carrières foreziennes", la société Eiffage, la société Pailleron, la société Poncet, la société B.E.R. EST et la société S.E.I.T.T a conclu le 27 mai 1993 avec le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE un marché pour la conception et la construction d’un collecteur intercommunal ; que par l’arrêt attaqué, la cour administrative d’appel de Lyon, d’une part, a annulé le jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon avait rejeté les demandes de sept de ces sociétés ainsi groupées tendant à la condamnation du syndicat intercommunal à leur payer le solde du décompte général et, d’autre part, a renvoyé le jugement de l’affaire au fond au même tribunal ;

Sur les conclusions dirigées contre l’arrêt en tant qu’il statue sur les conclusions présentées par la société Muller Travaux publics, mandataire du groupement :

Considérant que la cour n’a pas dénaturé les conclusions de la société Muller Travaux Publics, mandataire du groupement, en estimant que celles-ci tendaient à la condamnation du syndicat intercommunal à payer le solde du compte unique du marché et non à la répartition de diverses indemnités entre les membres du groupement en application de la convention de droit privé passée entre les entreprises ; qu’elle a pu, par suite, juger que c’est à tort que le tribunal administratif de Lyon avait rejeté ces conclusions comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

Sur les conclusions dirigées contre l’arrêt en tant qu’il statue sur les conclusions des membres du groupement autres que le mandataire :

Considérant qu’il résulte de l’article 2.31 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, auquel fait référence le marché litigieux, que des entrepreneurs groupés sont solidaires lorsque chacun d’entre eux est engagé pour la totalité du marché et doit pallier une éventuelle défaillance de ses partenaires, l’un d’entre eux étant désigné dans l’acte d’engagement comme mandataire et représentant l’ensemble des entrepreneurs vis à vis du maître de l’ouvrage pour l’exécution du marché ; que les entreprises qui se sont engagées solidairement par un même marché à participer à l’exécution d’un même ouvrage sans qu’aucune répartition des tâches soit faite entre elles par le marché doivent être regardées comme s’étant donné mandat mutuel de se représenter ;

Considérant cependant qu’en l’absence de stipulation particulière dans le contrat d’engagement, la désignation d’un mandataire pour représenter les membres du groupement auprès du maître de l’ouvrage n’a pas pour effet de confier à ce mandataire la représentation exclusive des autres entreprises solidaires devant le juge du contrat, qui gardent donc la possibilité de s’adresser à ce dernier pour obtenir le paiement du solde global du marché ;

Considérant qu’en jugeant que la stipulation selon laquelle la SOCIETE MULLER TRAVAUX PUBLICS était chargée, aux termes de l’acte d’engagement, de "percevoir pour le compte des autres entreprises" les sommes qui leur étaient dues ne faisait pas obstacle à ce que les autres entreprises membres du groupement solidaire agissent en justice au nom du groupement pour demander que le maître d’ouvrage soit condamné à payer le solde du compte unique, la cour administrative d’appel, qui n’a pas dénaturé la portée de la stipulation contractuelle rappelée ci-dessus, n’a pas commis d’erreur de droit ; que la cour n’a pas non plus commis d’erreur de droit en jugeant que les entrepreneurs groupés de manière solidaire tiennent de leur qualité de membres d’un tel groupement intérêt pour saisir le tribunal d’une demande tendant à la condamnation du maître d’ouvrage à payer le solde des travaux faisant l’objet d’une compte unique ; qu’elle n’a pas dénaturé les conclusions des sociétés requérantes en estimant que celles-ci tendaient à la condamnation du syndicat intercommunal à payer le solde du compte unique du marché et non à la répartition de ce montant entre chacune de ces entreprises ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE la somme de 3 000 euros à titre des frais exposés par les sociétés Muller Travaux Publics, "Les Carrières Foréziennes, EIFFAGE, PONCET, PAILLERON, B.E.R-EST et SEITT et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des sociétés Muller Travaux Publics, "Les Carrières Foréziennes, EIFFAGE, PONCET, PAILLERON, B.E.R-EST et SEITT qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE est rejetée.

Article 2 : Le SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE versera aux sociétés MULLER TRAVAUX PUBLICS, LES CARRIERES FOREZIENNES, EIFFAGE, PONCET, PAILLERON, B.E.R-EST et SEITT une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE LA VALLEE DE L’ONDAINE, à la société Muller travaux publics, à la société "Les carrières foreziennes", à la société Eiffage, à la société Pailleron, à la société Poncet, à la société B.E.R. EST, à la société S.E.I.T.T et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

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