Cour administrative d’appel de Lyon, formation plénière, 19 décembre 2003, n° 98LY00813, Chambre d’agriculture de l’Yonne

Les établissements publics à caractère administratif, dont la gestion désintéressée doit être présumée, sont exonérés de la taxe professionnelle dès lors que les services de nature commerciale qu’ils peuvent rendre ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d’attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique. Toutefois, même dans le cas où ces établissements interviennent dans un domaine d’activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, l’exonération de la taxe professionnelle leur reste acquise s’ils exercent leur activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales.

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE LYON

N° 98LY00813

CHAMBRE D’AGRICULTURE DE L’YONNE

M. CHABANOL
Président de la Cour

M. BENOIT
Rapporteur

M. BONNET
Commissaire du Gouvernement

Séance du 19 novembre 2003 _Lecture du 19 décembre 2003

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE LYON

(formation plénière),

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 mai 1998, présentée par la CHAMBRE D’AGRICULTURE DE L’YONNE dont le siège est 14 bis rue Guynemer, à Auxerre (89015), représentée par son président en exercice ;

La CHAMBRE D’AGRICULTURE DE L’YONNE demande à la Cour d’annuler le jugement n° 966514-97430 du Tribunal administratif de Dijon du 24 février 1998, rejetant sa demande en décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995 et 1996 dans les rôles de la commune de Migennes (Yonne) ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code rural ;

Vu l’ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs, ensemble le décret n° 2001-373 du 27 avril 2001 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 19 novembre 2003 :
- le rapport de M. BENOIT, président ;
- les observations de Maître LACROIX Hélène, avocat au barreau de Nanterre représentant la Chambre d’Agriculture de l’Yonne ;
- et les conclusions de M. BONNET, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1447 du code général des impôts : " La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée " ; que pour l’application de ces dispositions, les établissements publics à caractère administratif, dont la gestion désintéressée doit être présumée, sont exonérés de la taxe professionnelle dès lors que les services de nature commerciale qu’ils peuvent rendre ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d’attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique ; que, toutefois, même dans le cas où ces établissements interviennent dans un domaine d’activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, l’exonération de la taxe professionnelle leur reste acquise s’ils exercent leur activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la CHAMBRE D’AGRICULTURE DE L’YONNE, établissement public à caractère administratif, auquel d’ailleurs l’article L.511-4 du code rural ouvre la possibilité de gérer des services d’utilité agricole " conformément aux lois et usages du commerce ", exploite à Migennes (Yonne) un entrepôt frigorifique ; que les recettes réalisées par elle à l’occasion de cette exploitation résultent de manière prépondérante de la rémunération d’opérations de stockage effectuées au profit d’agriculteurs extérieurs à sa circonscription ou pour le compte d’industriels ou de grossistes de la filière agro-alimentaire ; qu’il est constant que cet entrepôt constitue la seule installation de cette nature dans un rayon de 130 kilomètres ; qu’ainsi, les services offerts par cet équipement n’entrent pas en concurrence avec ceux proposés par des entreprises commerciales ; que, par suite, les opérations concernées échappent au champ d’application de la taxe professionnelle tel que défini à l’article 1447 du code général des impôts ; qu’il en résulte, et sans qu’il soit besoin d’examiner l’affaire au regard de l’exonération prévue au 3° du I de l’article 1451 du même code au profit des chambres d’agriculture, que la CHAMBRE D’AGRICULTURE DE L’YONNE ne pouvait légalement être assujettie à la taxe professionnelle à raison de l’exploitation de cet équipement ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la CHAMBRE D’AGRICULTURE DE L’YONNE est fondée à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1995 et 1996 dans les rôles de la commune de Migennes ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Dijon n° 966514 -97430 en date du 24 février 1998 est annulé.

Article 2 : La CHAMBRE D’AGRICULTURE DE L’YONNE est déchargée de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1995 et 1996 dans les rôles de la commune de Migennes (Yonne).

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Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article2365