L’extension des attributions initiales d’un syndicat de communes, qui ne peut intervenir que par décision du représentant de l’Etat dans le département, est subordonnée à l’accord d’une majorité qualifiée des communes adhérentes du syndicat.
CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 217251
COMMUNE D’HAUTMONT
M. Verclytte
Rapporteur
M. Glaser
Commissaire du gouvernement
Séance du 3 décembre 2003
Lecture du 7 janvier 2004
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-section réunies)
Sur le rapport de la 3ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 février 2000 et 8 juin 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMMUNE D’HAUTMONT, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE D’HAUMONT demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 9 décembre 1999 par lequel la cour administrative d’appel de Douai, à la demande du syndicat intercommunal du Val-de-Sambre (SIVS) a annulé le jugement du 16 juin 1997 par lequel le tribunal administratif de Lille, à la demande de la COMMUNE D’HAUTMONT, a annulé trois délibérations du comité syndical du syndicat susmentionné en date du 15 décembre 1995, et a rejeté la requête de la COMMUNE D’HAUTMONT devant le tribunal administratif de Lille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales, notamment ses articles L. 5211-17 et L. 5212-1 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Verclytte, Maître des Requêtes,
les observations de Me Luc-Thaler, avocat de la COMMUNE D’HAUTMONT et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du syndicat intercommunal du Val-de-Sambre,
les conclusions de M. Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non recevoir opposée par le syndicat intercommunal du Val-de-Sambre (SIVS) :
Considérant que le maire de la COMMUNE D’HAUTMONT a produit la délibération du conseil municipal l’autorisant à engager la présente instance ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce qu’il n’aurait pas été régulièrement habilité à saisir le Conseil d’Etat doit être écarté ;
Sur le pourvoi :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 5212-1 du code général des collectivités territoriales : " Le syndicat de communes est un établissement public de coopération intercommunale associant des communes en vue d’œuvres ou de services d’intérêt communal " ; qu’il résulte des dispositions du même code applicables en cas d’extension des attributions initiales d’un syndicat de communes qu’une telle extension, qui ne peut intervenir que par décision du représentant de l’Etat dans le département, est subordonnée à l’accord d’une majorité qualifiée des communes adhérentes du syndicat ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’aux termes de l’arrêté du préfet du Nord en date du 11 mai 1962, le syndicat intercommunal du Val-de-Sambre (SIVS) a pour objet " l’étude et la réalisation de projets de toute nature intéressant l’aménagement du Bassin de la Sambre " ; qu’eu égard à l’imprécision de cet arrêté, la cour administrative d’appel de Douai a commis une erreur de droit en jugeant que ces dispositions suffisaient à transférer au SIVS la compétence pour exploiter une usine d’incinération de résidus urbains ; que la COMMUNE D’HAUTMONT est fondée, pour ce motif, à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;
Considérant qu’il y a lieu, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant que la COMMUNE D’HAUTMONT, en sa qualité de membre du SIVS, a intérêt pour agir contre les délibérations attaquées, par lesquelles le comité syndical du SIVS a décidé de supprimer l’incinération des déchets industriels dans l’usine exploitée par ce syndicat, au profit de l’incinération d’ordures ménagères en provenance d’autres communes, d’autoriser la réalisation d’une étude préalable pour la mise aux normes de cette usine, et de fixer les tarifs d’élimination des déchets pour l’année 1996 ;
Considérant que si le SIVS soutient que la demande de la COMMUNE D’HAUTMONT devant le tribunal administratif était irrecevable faute d’être accompagnée des délibérations attaquées, d’une part, et faute pour la commune d’établir que son maire avait été régulièrement habilité à agir, d’autre part, ces fins de non-recevoir ne peuvent être utilement opposées en appel dès lors que le tribunal administratif n’aurait pu les opposer à la demande sans avoir préalablement invité la commune à régulariser sa demande sur ces points ;
Sur la légalité des délibérations attaquées :
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’arrêté préfectoral du 11 mai 1962 n’avait pas suffi à transférer au SIVS la compétence pour exploiter une usine d’incinération de résidus urbains ; que l’arrêté préfectoral du 21 janvier 1976 autorisant le SIVS à exploiter une telle usine, pris pour l’application de la réglementation sur les installations classées, n’a pas été précédé, comme le prévoit pourtant la procédure d’extension des compétences d’un syndicat intercommunal, de la consultation des communes adhérentes du SIVS et de l’accord d’une majorité qualifiée de celles-ci, et n’a donc en tout état de cause pas pu légalement conférer compétence au SIVS en matière d’élimination des déchets ; que cette compétence ne lui a pas non plus été conférée par l’arrêté préfectoral du 15 octobre 1990 l’autorisant à étendre ses compétences à la création de déchetteries, dès lors que la mission ainsi confiée au SIVS ne concerne pas les opérations de traitement des déchets stockés ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le SIVS n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé les délibérations de son comité syndical en date du 15 décembre 1995 décidant la suppression de l’incinération des déchets industriels banaux dans l’usine exploitée par ce syndicat, la réalisation d’études préalables pour la mise aux normes de l’usine d’incinération d’ordures ménagères et la fixation des tarifs d’élimination des déchets pour l’année 1996 ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la COMMUNE D’HAUTMONT, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, verse au SIVS la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’en revanche il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner le SIVS à verser à la COMMUNE D’HAUTMONT la somme de 1 524 euros que celle-ci a demandé au titre des frais exposés par elle en appel et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : L’arrêt du 9 décembre 1999 de la cour administrative d’appel de Douai est annulé.
Article 2 : La requête du SIVS devant la cour administrative d’appel de Douai, ainsi que ses conclusions devant le Conseil d’Etat, sont rejetées.
Article 3 : Le SIVS versera à la COMMUNE D’HAUTMONT une somme de 1 524 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D’HAUTMONT, au syndicat intercommunal du Val-de-Sambre et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
_________________
Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article2240